Au jour le jour: Pâques 2017

Jeudi Saint, on frappe à la porte de notre appartement de vacances: Un couple de dames, tablette à la main. L’une d’elle nous dit « `Pâques, c’est pas seulement les lapins en chocolat » elle enfonce la porte ouverte dans laquelle elles s’encadraient… « Et alors ? » je vois venir les témoines de Genova, et nous n’avons pas de plantes vertes, le dialogue se poursuit. « connaissez vous ce qui est arrivé à Jésus-Christ ? » bon ok, j’étais en train de lire un bouquin sur la vie des ours et des humains en Russie et je n’étais pas trop engageant. « Ben voyez vous, j’en connais assez sur le sujet, je sus pasteur … » je croyais pouvoir m’en tirer comme cela sans être impoli, elles font leur mission, et c’est aussi bien leur droit. « Quelle chance, j’ai jamais eu l’occasion de parler avec un pasteur  » … dans leur église, il n’y en a pas.

Elle ajoute « Que pensez-vous de cette phrase de L’évangile de Jean, Dieu a tant aimé le monde qu’il a donné son fils… » L’autre ajoute « Il est mort pour nous  » …

Je répond « je ne crois pas » … « vous ne croyez pas que Dieu a sacrifié son fils ? » « non, il n’était pas Taliban: Comment pouvez vous imaginer qu’un père sacrifie son fils, et pour le salut d’inconnus qui n’en ont cure ? »… « Alors pourquoi Jésus est mort ? » « parce qu’il a été exécuté après un jugement arbitraire prononcé par des jaloux » … « Jésus gênait ses contemporains, les gens du pouvoir et les romains, et il a été exécuté… comme le chante Guy Béart: « Celui qui dit la vérité, il sera exécuté« .

Les dames sont perplexes… J’ajoute « Dieu, ou ce qui lui ressemble, a offert son fils aux vivants pour leur donner les moyens de réaliser un monde meilleur, en observant les dix paroles de Moïse … Il n’était pas sensé finir sur une croix, tout le reste est élaboration littéraire et théologique dans le cadre de la culture de l’époque Les mots de la Bible ne sont pas les mots de notre actualité pour décrire ce que nous vivons… » Au moment de me lancer sur les « vérités de l’Apocalypse », je (ne) les ai (pas) rassurées en leur disant que c’était un texte codé pour rendre compte de la situation des judéo-chrétiens entre l’an 80 et 120… et qu’il n’y avait rien à en dire pour demain ou après demain, sinon que la situation géopolitique ne change pas vraiment depuis cette époque: Il y a l’ours Russe, (que je lisais), le dragon Chinois, le serpent coréen, l’aigle américain, et Walt Disney pour les mettre en scène, Apocalypse Now ! » …. J’ai mis fin à notre dialogue en leur souhaitant de belles fêtes de Pâques, et en reconnaissant leur courage d’aller ainsi de portes en portes, même si j’étais sceptique sur le discours qu’elles tenaient, « au revoir mesdames ».

N’empêche que je reste persuadé que Dieu, ou ce qui en tient d’être au sens commun, n’a jamais voulu tuer son fils… ce qu’en a fait la dogmatique chrétienne est une autre question.

Vendredi Saint: Le journal vous le décrit dans le détail, partout où sont mis à mort le droit, la vérité, la charité, l’égalité, la liberté, l’espérance… Rien, samedi saint, vraiment rien.

Vous croyez quoi ?

Rien ou n’importe quoi: On meurt à Mossoul pas seulement vendredi Saint.

On veut exécuter les condamnés même sans les chimiothérapies helvétiques aux USA même le Samedi Saint.

On vote en Turquie pour fermer la gueule des journalistes Samedi Saint aussi.

Et vous croyez que Dieu a mis à mort son fils aussi dans la Bible ?

Samedi saint, rien ne l’indique encore: Il est mort le rabbi de Nazareth il y a l985 ans (environ)… condamné pour outrage à l’empire Romain et pour avoir été pris pour roi par de braves gens qui n’avaient pas le droit de vote mais espéraient un nouveau mode de vie moins inégalitaire, plus chaleureux, plus charitable.

On ne change pas les règles de la vie comme cela, vous pourriez le comprendre, « Tout le monde a des emplois fictifs », On a toujours fait comme cela, les riches s’enrichissent et les pauvres restent pauvres: Heureusement, car s’ils devenaient riches, les riches seraient moins riches… Alors ne changez rien et les vaches seront bien gardées.

Samedi saint, C’est RIEN. Juste le début d’un long week-end, et demain est un autre jour. OK il y a des régions où on repeint les maisons, c’est pas rien, c’est déjà ça !

Après Vendredi Saint , Samedi Saint, vous m’attendez pour

dimanche de Pâques.    Le Christ est ressuscité, alléluia !

J’ai aimé le commentaire d’un ami: « Il est ressuscité parce qu’ils n’avaient pas accepté qu’il soit mort » !

Reprenons: Vous vous souvenez de Moïse qui reçoit les « Dix Paroles », il demande de la part de qui ? La réponse est « Je suis celui qui Je suis ». Le JE est important. C’est en hébreu naturellement dans la Bible. Cela a aussi un sens supplémentaire, avec une idée de verticalité: « Je suis debout celui qui est debout ». Le français permet aussi une variante: Je suis (du verbe être) et je suis (du verbe suivre).

Maintenant, je vous propose un exercice physique qui sera aussi spirituel: Vous vous souvenez – ou vous pouvez les trouver – des paroles de Jésus où il dit « Je suis ». Tour à tour, le bon berger, la porte des brebis, etc.

Je reprend mon commentaire de vendredi: « Dieu » a tant aimé le monde qu’il a donné son fils… Alors, ce « fils » a partagé ce qui lui tenait le plus à cœur: les « Dix paroles de Moïse » avec ses contemporains, « tout le monde » en d’autres termes.

Il n’était pas question de « sacrifice » bien sûr.

Voici l’exercice: Vous vous tenez debout, et vous dites « Je suis » … c’est bien vous.

Puis vous dites « Je suis le chemin, la vérité et la vie » comme Jésus l’a dit…

Alors si vous vous prenez au sérieux, et si vous prenez les paroles de Jésus au sérieux: Jésus sera ressuscité, aussi vivant que vous pouvez l’être…vous suivez ?

Vous connaissez « le chemin », vous connaissez « la vérité », vous aurez « la vie » … c’est déjà pas mal comme résurrection non ?

Joyeuses Pâques, même avec un lapin en chocolat et des œufs durs en salade.

Lundi de Pâques…

Un jour de congé dans un monde laïc, en fonction d’une fête religieuse, quelle incongruité ! Pareil pour le Lundi de Pentecôte et l’Ascension: Une proposition de supprimer ces congés officiels et ce sera les hurlements conjugués des « croyants et ceux qui ne croient pas » selon la formule contestée de l’Eglise Réformée de France, à propos des discours des candidats à l’élection présidentielle.

Donc les controverses sur la pertinence de la résurrection sont déjà d’hier, et le Jésus de Nazareth « au milieu de nous » renvoyé à Emmaüs dont il a aussi « disparu » aux yeux de ceux qui l’avaient pourtant reconnu comme un « inconnu ».

La foule immense en ce lundi est rassemblée au pied de l’estrade, des drapeaux flottent dans toutes les mains, la populace attend l’apparition du Président. Il apparaît enfin, drapé dans sa fierté comme un empereur romain, Erdogan lève les bras, et la foule hurle « Peine de mort, Peine de mort » comme un écho tragique au « Crucifie, crucifie ! » de Jérusalem un vendredi saint.

Les « voies du Seigneur » sont bien encombrées, et j’en suis triste, et en même temps serein: Il est là, a portée de voix dans le sourire de la caissière de mon supermarché, dans la remarque amusée sur « le temps qu’il fait » d’un parfait étranger à mes « amis FB », dans le baiser de notre fils de 40 ans, dans le regard attendri d’un grand père sur un enfant qui ne lui est rien, mais qui lui, fonce en trottinette à trois roues vers le Royaume, épris de liberté, de fraternité, et de justice.

Bien sûr ce n’est pas la foule turque, mais là bas, il y a 48,5% de citoyens qui ont besoin de notre aide au moins morale, avant de se faire exécuter: Quand je disais que rien ne change, le « principe de Peter » dit pourtant que « Quand cela va mal, cela ne peut aller que plus mal », avec « tout le bien » que je peux vous souhaiter, ce n’est pas évident.

A vous de voir…