Quels Dieu(x) pour les « petits prophêtes »

Comment percevoir l’engagement de Dieu dans l’alliance.

En considérant l’actualité de ce printemps 2023, nous ne sommes pas loin de devoir nous interroger sur l’avenir de la planète, comme les paysans de Palestine aux temps de Darius… Le monde courait à sa perte, Darius a l’air de le remettre dans une possible perspective, et Zorobabel est arrivé (hé hé) avec «DIEU et son discours». Mais ne nous y trompons pas, L’HISTOIRE de Darius avec la province de Palestine est un effet collatéral de sa politique et n’a pas beaucoup d’importance pour le reste du monde, sauf pour les juifs de la région qui vont en profiter pour se requinquer.

L’ensemble des textes proposés pour cette semaine de Vaumarcus 2023 font un peu froid dans le dos : Comme si rien ne change dans cette région, les opprimés ne sont pas toujours les mêmes (quoi que …) et les comportements inopportuns du peuple juif est la cause de ses déboires. Est-ce que le rassemblement à l’abri du Temple (reconstruit) est un objectif religieux ou politique : La question reste d’une brûlante actualité au 21e siècle, puisqu’en plus il faut partager l’esplanade avec les musulmans et les chrétiens. On n’est pas encore sorti de l’auberge (d’Emmaüs).

Le «présent» en question.

Il faut aussi se remettre dans le contexte de la culture locale de l’époque et dans la tradition hébraïque qui n’a pas du tout la même conception de l’histoire et de la politique de la région que nous pourrions avoir aujourd’hui : Le «peuple de Dieu» a un objectif : Manifester qu’il a une existence concrète après ses tribulations et ses échecs militaires et culturels et sociaux. Un objectif politique pour lequel « Dieu(x) » va être mis à contribution, avec plus ou moins de succès.

Cela a une conséquence concrète dans le discours narratif des textes de la bible, et pose des questions philologiques infinies aux traducteurs et aux théologiens qui tentent de donner un sens actuel à des textes anciens. Les «anciens» n’avaient pas cette problématique car ils baignaient dans cette culture, et les sens des paroles bibliques étaient évidents.

Dans son livre «Il n’y a pas de Ajar», Delphine Horvilleur, rabbine, dialogue avec le fils imaginaire d’Emile Ajar-Romain Gary et lui fait remarquer

«en hébreu, le verbe être, ça n’existe pas au présent.

Tu ne peux pas dire :

je suis ceci ou je ne suis pas cela.

Parce que tu ne peux dire ni « je suis », ni « je ne suis pas .

Tu peux conjuguer le verbe être au passé ou au futur.

Mais au présent, ça disparaît comme le lapin dans le chapeau du magicien. Bref, en hébreu, tu peux « avoir été » et tu peux être « en train de devenir », mais tu ne peux absolument pas « être »…1

En hébreu, il y a deux mode pour les verbes : Accompli et/ou Inaccompli.

C’est plus que la différence entre le «passé» et le «futur», Car entre les deux, il n’y a pas d’espace, même pas de «l’épaisseur d’une feuille de papier à cigarette».

Rappelez-vous la réponse du «buisson» à Moïse qui lui demande son nom :

«Eyé asher eyé» qu’on traduit habituellement de manière erronée, par «je suis qui je suis» .

«Je suis-eye» forme accomplie : Tout le monde sait que c’est le dieu d’Abraham Isaac et Jacob car nous avons appris ce qu’il a été et ce qu’il a fait jusqu’à aujourd’hui, à l’époque de chacun des patriarches comme de la notre. («Asher- celui qui») «Je suis-eye» forme inaccomplie, dont nous ne savons encore rien, est son identité souhaitée dans le futur.

Interrogée par Laure Jubran, de Nazareth, son amie rabbine2 elle aussi, donne son interprétation : «Je serai «ce3» que tu auras besoin que je sois …»

Cette «identité» ouvre les possibles infinis : Le consolateur, le rédempteur, le compagnon de route, l’inspirateur, le soutien moral (de préférence à immoral!).

Il est donc performant dans l’eucharistie – Ste Cène, et comme garantie des Dix Paroles à concrétiser Il est aussi «inexistant» si ce besoin est nécessaire comme argument (Voir Christian Bobin) ou sous toutes sortes d’identités : Dieu, Allah, Yahwé, Jehova, le soleil, ou l’instinct de survie.

Le seul critère : La confiance que son identité réponde à mon besoin, ( comme St Antoine pour retrouver mes clés…) Y compris sa famille au sens large : Jésus de Nazareth (accompli) image de dieu (inaccompli), Marie sa mère en particulier sous toutes ses déclinaisons (accomplies) pour une présence réelle (inaccomplie) à invoquer.

Dans les anciennes versions des traductions «Synodales», «Darby» ou «Segond» des bibles en circulation, nous trouvons le terme «Dieu des Armées». La TOB préfère la référence «Seigneur tout puissant» on peut aussi le dire «Le Capable de Tout», ce qui entraîne des conséquences théologiques dangereuses : Sa responsabilité dans les catastrophes naturelles (on a déjà donné!) les maladies et la mort, les accidents.

Pour la guerre, il faut plutôt chercher la responsabilité chez les humains.

Israel, Juda et la Samarie à l’époque Perse :

Les textes de référence de la semaine de Vaumarcus 2023 se situent entre – 530 et – 450 avant J-C. La (re)construction du 2e temple, interrompue par l’opposition des Samaritains, va reprendre.

C’est aussi la période de la constitution des corpus de textes qui vont servir à l’élaboration de la Thora et des livres historiques qui se figeront (presque) autour de -300 avec l’édition de la LXX à Alexandrie. Il fallait une harmonisation et une homogénéisation des sources et des traditions afin de permettre une «lecture universelle» incontestable des traditions d’Israël et du peuple hébreu.

Ainsi, il faut toujours rappeler que la Bible, toute inspirée qu’elle soit, n’est pas un livre d’HISTOIRE, mais un livre d’histoires et d’aventure des hommes et des peuples en relation avec leurs dieux, souvent différents, selon l’origine des traditions.

Avec l’avènement de Darius en Perse, l’empire menace d’éclater et différentes provinces sont constituées, avec des délégués-représentants du pouvoir, comme Zorobabel en Israël. Ils sont chargés de la reconstruction des villes et d’accompagner les exilés qui reviennent sur la terre de leurs ancêtres comme leaders d’opinions, et pour reconstituer une structure administrative «locale» indispensable pour éviter le sentiment d’une occupation étrangère.

Aggée intervient entre août et décembre 520, Zacharie prophète et prêtre le suit, entre – 520 et – 518, soit trois ans avant la dédicace du «Nouveau Temple».

Il introduit une nouvelle perception du divin, plus éloigné des contingences du temps. Malachie, enfin intervient entre – 480 et – 450 dans une Jérusalem au temple reconstruit … mais dont les effets bénéfiques promis et attendus ne se sont pas concrétisés.

Zacharie doit aussi affirmer la continuité sacerdotale après la disparition de Zorobabel (Qui fait partie des ancêtres de JC). Au chap 8, il décrit la décrépitude de la situation de la cité principale, mal vécue par les exilés, qui sont mal assimilés et ceux qui sont restés, méfiants envers ceux qu’ils considèrent comme des étrangers. La question se pose aux uns comme aux autres : Sont-ils même «vraiment juifs» même si cette dénomination est encore incertaine : Beaucoup ont fondé familles avec les occupants, et les exilés avec ceux qu’ils avaient comme voisins. La seule chose qui peut «sauver l’honneur» du peuple et lui garantir un avenir, c’est le rappel que nous trouvons au chap 8 : 16-17 :

16 Voici les préceptes que vous observerez : dites-vous la vérité l’un à l’autre ; dans vos tribunaux, prononcez des jugements véridiques qui rétablissent la paix ; 17 ne préméditez pas de faire du mal l’un à l’autre ; n’aimez pas le faux serment ; car toutes ces choses, je les déteste — oracle du SEIGNEUR.

Ces «préceptes» sont la base de la démocratie, même si cette notion est totalement anachronique. Il est probable que les «Dix Paroles» ont aussi fait partie du discours du 1er Zacharie4.

Il serait bon de les rappeler aujourd’hui à des politiciens qui n’ont rien à envier à ceux d’autrefois.

Conclusions (provisoires)

Ces textes «prophétiques» sont l’illustration de la mission traditionnelle des prophètes qui interprètent les «signes des temps» et proposent aux souverains des pistes pour s’en sortir. Ils décrivent des situations dans lesquelles ils impliquent un Dieu(x) (accompli) dont on subodore les réactions dans les avanies subies par le peuple. Ils offrent un cadre programmatique connu, mais pas vraiment respecté, en signalant que «Dieu(x) » (inaccompli) saura récompenser les observants fidèles à ce qui avait été promis autrefois à Abraham, Isaac, Jacob, Moïse par celui que tous reconnaissent comme le «Je suis-Eye» (Accompli) et qui sera «Je suis-Eye» (inaccompli pour le moment) le messie, le souverain des cieux, le dictateur providentiel, qui permettra la paix universelle, et des lendemains qui chantent.

Un peu de gymnastique intellectuelle est maintenant indispensable pour comprendre les enjeux de ces récits :

Les lecteurs des rouleaux et autres codex, devenus les bibles d’aujourd’hui ont sous les yeux les relations entre le peuple juif et l’image de « Dieu(x) » dans l’espace temporel Accomplis. Il faut en faire le meilleur usage en prenant les décisions qui nous engagent dans l’espace encore Inaccompli, pour ne pas répéter ce qui s’est passé autrefois. A quels dieux allons nous accorder notre confiance (foi) ?

Un « tout puissant » qui prend ses décisions sans nous et nous impose tourments et catastrophes ? « Mammon » et ses épigones qui promettent monts et merveilles en payant le prix fort ? L’incarnation de « Jésus de Nazareth » l’accompli exemplaire qui nous laisse la responsabilité d’appliquer les dix paroles dans la charité ?

Les générateurs de « fakes news » qui nous baladent et dont nous devons nous méfier, comme l’écrivait déjà Paul aux Éphésiens 4.14.

afin que nous ne soyons plus des enfants, flottants et emportés à tout vent de doctrine, par la tromperie des hommes, par leur ruse dans les moyens de séduction, 15 mais que, professant la vérité dans la charité, nous croissions à tous égards à l’image de celui qui est le modèle, Christ.

Ces textes sont d’une actualité qui m’impressionne, comme d’habitude.

1«Il n’y a pas de Ajar», Delphine Horvilleur. p.74. Ed Grasset, sept 2022

2Leora Ezrachi Vered

3Totalement indéfini … et probablement pas anthropomorphe … sauf que «à son image» laisse le doute.

4A partir du chap 9 c’est un autre prophète référence dont les récits recouvrent une période qui va jusqu’en 300 si on considère la campagne d’Alexandre le Grand sur la côte méditerranéenne et la destruction de Tyr en 330, bien décrite au chp 9.

Dieu(x) = il / elle ?

Avec le développement de la «Théologie féministe» elle est beaucoup question de l’identité de genre de «DIEU».

C’est une polémique certainement utile pour les personnes qui ne se sentent pas concernées par un «dieu» mâle et préféreraient une figure féminine. Dans l’antiquité déjà la question se posait et elle avait été entendue en développant l’idée de «Gaïa» la déesse mère, en opposition au mâle Ouranos. Marie occupe la place dans certaines dénominations en étant même devenue «Mère de Dieu».

Actuellement, il semble que cela préoccupe les théologien.ne.s qui en conséquence ne s’occupent pas du message essentiel de la foi judéo-chrétienne. Les conciles autrefois se penchaient sur le sexe des anges pendant que les empires se massacraient avec l’allégresse des persuadés de la bénédiction divine.

Aujourd’hui, la question des droits humains, de la liberté de conscience, de la justice sociale, du respect de la création me paraissent un élément plus important que le «sexe de dieu», et il serait urgent que nous mettions tout en œuvre pour rendre pertinents les principes des «Dix Paroles» et de la charité proposés par Jésus de Nazareth à la conscience de nos contemporains.

Les batailles autour de l’interprétation du mariage pour tous, de la liberté de ne pas se faire vacciner, les arguties pour spéculer sur les matières premières et abuser des failles légales pour affamer une partie de la planète sont dérisoires et mortifères.

Défendre les principes du christianisme dans des élections, ou les choix politiques sans un engagement et un mode de vie correspondant pour l’électeur est une négation évidente de la foi chrétienne qui devrait peser sur la conscience de chacun.

Dans la contribution ci-dessous, je ne prétend pas «régler le problème», mais j’essaie de le relativiser pour ne pas en faire une condition de crédibilité.

On peut tricoter le texte initial de Genèse 1 avec ce que nous savons de l’évolution. Cela ne justifie pas le «créationnisme» : cela illustre seulement la perspicacité des auteurs de la Genèse et leur imagination.

Au commencement, Dieu créa le ciel et la terre. 2 La terre était déserte et vide, et la ténèbre à la surface de l’abîme ; … 3 et Dieu dit : « Que la lumière soit ! » Et la lumière fut. 4 Dieu vit que la lumière était bonne. Dieu sépara la lumière de la ténèbre. –


Dans les océans, sorte de bouillon qui va devenir «de culture», la « vie » apparaît il y a environ -3,85 milliards d’années.

… »le souffle de Vie» planait à la surface des eaux…

Sous forme de traces de vie unicellulaire, d’organismes procaryotiques, les stromatolithes. des bactéries, structures bio-construites apparaissent il y a 3,4 milliards d’années.

Une théorie suppose que la vie se serait développée d’abord dans le sous-sol avant de remonter à la surface de la planète.

Dieu dit : « Que les eaux inférieures au ciel s’amassent en un seul lieu et que le continent paraisse ! » Il en fut ainsi. Dieu appela « terre » le continent ; il appela « mer » l’amas des eaux. Dieu vit que cela était bon.

Les algues bleues se développent Il y a 3 milliards d’années . Elles sont les premières à produire de l’oxygène par photosynthèse. Cet oxygène est à l’origine de la couche protectrice d’ozone autour de la Terre.

Les premières formes de vie complexes (pluricellulaires) sont trouvées dans des strates géologiques du Gabon datant de – 2,1 milliard d’années Ce sont les premiers eucaryotes : des organismes dont les chromosomes sont protégés dans un noyau.

A ce niveau de l’évolution les scientifiques évitent l’identification anthropomorphique de la source de la vie. Les premiers humains qui se sont interrogés sur l’origine du vivant y ont associé une divinité, animale, tectonique (montagne) , ou extraterrestre comme le soleil, la lune ou les planètes les plus visibles.

Une désignation de la «cause première» traditionnelle apparaît comme « un divin», qui se rapproche plus de la fonction d’Ouranos puis de Zeus1, d’où dérive le mot français de «dieu». Et de là, la dérive patriarcale qui masculinise la divinité créée à l’image de l’homme, a moins que ce ne soit le contraire, je ne veux choquer personne.

Les auteurs de la Genèse ont toutefois identifié un problème en racontant une création alternative :

Dieu dit : « Faisons l’homme à notre image, selon notre ressemblance, et qu’il soumette les poissons de la mer, les oiseaux du ciel, les bestiaux, toute la terre et toutes les petites bêtes qui remuent sur la terre ! » Dieu créa l’homme à son image, à l’image de Dieu il le créa ; mâle et femelle il les créa. 2

On retrouve cette idée dans l’image / symbole du Ying et Yang 

une unité formée de deux entités combinées.:

Mais revenons à l’origine de la vie et de son évolution :

Une cellule qui se divise produit deux nouvelles cellules identiques.

Ces deux nouvelles cellules se divisent chacune en deux et produisent ainsi quatre nouvelles cellules. 3

La division cellulaire est une propriété unique aux organismes vivants. Chaque nouvelle cellule contient le matériel génétique complet qui garanti l’identité des origines et donc la trace de la «source de la vie». Ce sont les filaments d’ADN. Les cellules ayant une durée de vie limitée, leur multiplication échelonnée dans le temps assure la survie de l’espèce.

Même si on qualifie la «première cellule» de «Mère» par analogie anthropomorphique, elle est encore sans identification «genrée».

La complexification de la nature a nécessité de nouvelles manières de perpétuer l’espèce, avec pour toutes sortes d’organismes la combinaison de cellules «mâles et femelles».

L’objectif étant toujours de sauvegarder l’originalité de l’espèce. Si ce mode de reproduction est commun à presque tous les animaux, il existe aussi chez les végétaux, qui sont également des organismes vivants. Certains ont des fleurs mâles et femelles sur les mêmes tiges et s’autofécondent. D’autres ont des fleurs mâles, et il faut un autre arbre femelle pour assurer la production de fruits et donc de graines. La fécondation se fait avec la collaboration des insectes, du vent, parfois des oiseaux comme les colibris.

A ce stade, les cellules se partagent de manière égale leurs caractères génétiques, qui vont se combiner de telle manière qu’elles vont former un nouveau «vivant» original et unique.

Le codage génétique se fait par le partage des filaments d’ADN qui gardent des traces généalogiques, et surtout le «brin» qui permet le processus de vie. C’est ce que le livre de la Genèse appelle «le souffle de vie» ou dans certaines traductions «L’Esprit de Dieu», a l’origine donc du vivant. Quelque chose d’intangible, peut-être même pas souffle ténu perçu par Elie à l’Horeb.

Remarquez qu’il n’est toujours pas genré, sauf dans le langage de communication et donc influencé par la culture… nous n’avons pas vraiment le choix : le «Il» s’impose mais c’est sans importance4.

La vie s’est développée sous des formes très diverses, et a presque complètement disparu dans des «extinctions» cataclysmiques, resurgissant d’héritiers d’un morceau de génome riche de potentiel de développement.

Ce qui est fantastique au sens propre, c’est que les bases fondamentales de la structure des mammifères et des oiseaux ont résisté à tous les anéantissements : 4 pattes, deux yeux, un squelette avec des articulations complexes – les épaules, on aurait pu faire plus simple – les vertèbres, un système digestif et respiratoire avec les variantes aquatiques ou aériennes.5

Les dinosaures, les lapins de garenne et les humains partagent un extraordinaire programme génétique de développement. Et tous ont en commun le «besoin» de survivre.

Et chez les humains, comment ça marche ?

Il faut sauter quelques époques et milliards d’années pour nous retrouver à l’aube de l’humanité, c’est à dire très tard dans le processus de l’évolution.

Quand la survie de l’espèce, la mort d’un individu s’est imposée au-delà de l’instinct de conservation, les premiers «Pourquoi» ont surgi : Pourquoi, lui, pas elle, elle et pas lui, eux, pas nous, nous et surtout pas eux ?

Qui veut que cela se continue, et sous quelle forme, quelle procédure sociale pour éviter la consanguinité, par exemple ? L’expérience a sans doute été déterminante.

Pour imposer les conditions de survie indispensable, les humains ont besoin de règles ou de précautions élémentaires pour assurer la descendance et ne pas se bouffer le nez au propre et au figuré. L’individu dominant, mâle ou femelle est le gagnant de toutes les variantes possible de compétitions. Les femmes portent les descendants, chasseurs ou guerriers, elles assurent la survie du groupe. Les chasseurs rapportent la nourriture que les femmes n’ont pas le temps de chercher. Ils rencontrent d’autres chasseurs et procèdent à des échanges qui deviendront commerciaux.

Le partage des tâches devrait être naturel, c’est sans compter que «je suis meilleur que toi»,

«j’ai plus d’enfants que toi»… «le chef me préfère pour porter sa descendance». «Je préfère ce mâle pour la qualité de mes enfants». Entre les sommets enneigés et les plages idylliques chaque groupe humain tribalisé trouve son mode de vie le plus adéquat à son environnement.

Puisqu’il faut survivre, et garder la ligne… Comment stabiliser la situation ?

Organiser des «combats de chefs» peut-être contre-productif, si l’issue est la mort du perdant, ce qui fait une paire de bras en moins. Le «turnover» des matriarches est sans doute plus hasardeux à cause des risques lors de la mise au monde des enfants.

Il faut que la désignation du «Chef» ou de «la Cheffe» se fasse sous l’autorité de la nécessité vitale.

L’instinct de survie est la nécessité vitale, mail il vient d’où  ?

On voit bien ou est la source du ruisseau, si on ne comprend pas comment l’eau arrive, sinon par la nécessité de couler… La nécessité de couler est causée par la même nécessité de survivre pour le groupe. La nécessité est antérieure à ce qu’on sait de l’origine du groupe, et de l’eau de la source. Quelqu’un ou quelque chose l’a voulu ainsi… C’est une énergie plus puissante que nous, plus permanente que nous, qui veut le commencement et qui signe aussi la fin de la partie.

La genèse l’appelle le souffle de vie, pourquoi pas. Quand le/la dominant/e veut quelque chose, il vaut mieux le réaliser, c’est moins perturbant. Et si on n’est pas d’accord, on tente de prendre sa place, ses prérogatives, ses signes distinctifs… et cela fini mal pour tout le monde. Caïn et Abel peuvent en témoigner.

L’expérience de la vie en société produit sur tous les continents et dans toutes les configurations humaines à peu près les mêmes règles :

Il y a une force/énergie qui nous précède et nous dépasse, elle est le fondement de notre existence.

Nous en racontons les origines et nous respectons les décisions que nous pouvons discerner.

– Il vaut mieux respecter ses parents : Ils ont l’expérience et nous guident dans nos apprentissages.

– On ne tue pas les membres de sa famille ou ses voisins cela perturbe l’ordre dans le groupe,

et entraîne des risques de vengeance.

– On ne vole pas ce qui manifestement fait partie des biens ou de la communauté d’autrui, surtout si c’est un proche. C’est aussi valable pour ses conjoints

– On ne raconte pas des fausses histoires pour se protéger en cas de mauvaise conduite.

La vérité est garante de la liberté.

En fait, vous avez remarqué, le chef, la cheffe, interprète ou incarne un peu le rôle de «l’Autorité» créatrice pour la durée de son règne… L’Autorité Originelle doit aussi bien fonctionner comme nous ?

Elle a son domaine, ses compétences, son pouvoir, ses objectifs, et si c’est aussi ceux du chef ou de la cheffe, tout va bien. L’autorité «locale» a une famille, des descendants, et on voit bien que cela devrait être comme chez nous : quand il y a de l’orage dans l’air on ne peut pas en douter !

Et voilà que surgit l’anthropomorphisme attribué à l’Autorité Originelle. Pas toujours «humaine» du reste, car l’«ours», colocataire des abris des premiers humains pensants, et plus puissant, bien que moins bavard, a aussi été affublé de la puissance originelle.

A ce stade, l’Autorité Originelle n’est toujours pas vraiment genrée, sinon par identification au système social du groupe. En tout cas on ne l’appelle pas d’un nom générique «dieu».

Le nom qui lui sera donné est souvent lié au lieu de résidence : Montagne, source, caverne, volcan, arbre, le catalogue est infini.

L‘Autorité Originelle localisée a un handicap majeur : Elle contraint ses adeptes à la sédentarisation, conséquence de l’évolution de l’humanité qui passe des chasseurs cueilleurs à la culture et à l’élevage. Le problème se pose quand un autre groupe veut vous prendre la place : Vous perdez vos «repères» références, et un peu de votre dignité…

On raconte que les hébreux, à la suite des Madianites nomades du Sinaï vont se libérer des divinités locales, en se référant à une autorité originelle morale qui a dicté ses conseils, connus comme les «Dix Paroles».

Au Sinaï, L’Autorité Originelle productrice flamboyante des «dix Paroles» a un curieux nom : «je suis qui dit je suis», ce qui est le nom de personne, sauf de celui ou celle qui le dit et le défend à l’exception de toute autre autorité.

L’Autorité Originelle va devenir genrée, puis avec le développement du «monothéisme» cette autorité va prendre des caractéristiques masculines ( de préférence) et féminine en cas de besoin de consolation ou de «couvaison».

L’ancien testament pour se limiter à la culture judéo moyen orientale, nous raconte que les hébreux n’ont qu’une idée : ressembler à leurs voisins et à leurs manières de considérer leur origine.

Pas de lieux particuliers ? Pas de problème on fait une caisse, on y met le symbole de l’autorité originelle, une tête de taureau, les stèles des dix paroles … on n’en sait rien, mais on promène la caisse. On imagine la divinité comme celles des voisins, puissant vengeur, jaloux amoureux de son peuple, maniant les bénédictions et les châtiments au gré des relations internationales.

La divinité reçoit le nom de YHWH … on ne sait pas comment il se prononce, on ne sait plus, mais il devient en effet sérieusement «mâle».

L’une des dix paroles exigera que ce nom ne soit pas utilisé vainement.

Le nom permet de le distinguer de toutes les autres divinités, et comme les autres divinités, il aura une comparse-compagne : Ashera… Ils seront un «couple divin».

Le couple va «être divorcé» assez tôt dans l’histoire : Ashera sera remplacée par la «shekina», la sagesse de Dieu . Les grecs lui ont donné ce titre : «Dieu», au 3e siècle à Alexandrie, faute de mieux.

Autour du 7e siècle avant J.-C. Les maîtres du divin = Prêtres selon l’acception courante, pour assurer le pouvoir religieux sur le peuple hébreu, imposent le monothéisme : Un seul divin, un seul lieu de culte à Jérusalem

Au 3e siècle av JC, a l’occasion de la traduction en grec des textes de l’ancien testament à Alexandrie par les 70 interprètes venus de toutes les régions où se pratiquait la religion juive, une version commune hébraïque a également été élaborée et harmonisée, dans la mesure de l’impossible6, pour mettre en évidence un monothéisme masculin, religieusement correct.

Jésus de Nazareth, qui va passer l’essentiel de sa mission sur terre à mettre en valeur les «dix paroles», va se présenter comme un «fils de Dieu», un des millions de «fils de Dieu» qui sont héritier de cette étincelle originelle qui nous encourage à vivre en respectant ces dix paroles, avec le code de la charité et de l’amour pour en rendre toute la subtilité.

Les peintres et sculpteurs vont s’emparer de l’image de Dieu, individualisée «masculine et patriarcale», un noble vieillard tendant la main au misérable humain qui aspire à la vie éternelle.

Jésus de Nazareth devenu «FILS DE DIEU», et «DIEU» soi même devient une icône plus ou moins asexuée regardant vers le ciel en attendant d’y accéder…

On regarde son cœur saignant, sa barbe blonde, ses souffrances sur les bois de la torture infamante décrétée par une foule en délire et la collaboration du pouvoir local de Pilate.

On médite sur ses miracles, ses succès de thaumaturge, sa marche sur les eaux ou son illumination sur la montagne. On ne pratique pas ses conseils, on ne met pas en œuvre ses paroles : Il n’est plus que l’idole de lui même, prétexte à l’accaparement du pouvoir divin à des fins suspectes si ce n’est pas franchement criminelle.

Alors comment parler de cette AUTORITÉ ORIGINELLE, nous qui en sommes porteurs :

«Je suis» (est) au milieu de vous dit le rabbi de Nazareth. Ce n’est pas ailleurs, pas au ciel – heureusement – toutes les fois où vous avez porté secours, aide et sollicitude à l’un de ces petits qui son victimes de la société, c’est à moi que vous l’avez fait… dit Jésus qui nous propose de faire comme lui… c’est risqué.

«Je suis» est au milieu de vous» si «vous» est un groupe de femmes, il est au cœur de ces femmes.

Si «Je suis» est au milieu de vous», un groupe LGBTQI+ il est de même au milieu.

Si «Je suis» est au milieu de vous», un concile ou un consistoire, il est «performant» si ses préceptes et ses encouragements à respecter VRAIMENT les dix paroles sont suivis.

Ni homme, ni femme… mais tellement pertinent et réel.

Alors, oui, nous sommes tous descendants de cette source vitale originelle. Mais elle n’est pas «père» ou «mère», à un moment de l’histoire de la terre où ces termes n’ont pas de sens.

Et vouloir «genrer» cette source de vie pour la rendre pertinente aujourd’hui me semble rater la cible, qui reste la protection de la vie, la liberté, et la justice, avec la charité de l’amour, ce «plus» qui fait le charme de notre existence.

Si les conciles et les théologiens souhaitent se battre sur le sujet, grand bien leur fasse, au moins pendant ce temps ils ne feront pas de bêtises…

Il/elle n’en reste pas moins, qu’héritier.e.s du «souffle divin» nous sommes frères et sœurs de générations en générations.

1Les dieux qui illustrent la création dans la culture Grecque.

2Voir : T. Römer, “L’éviction du féminin dans la construction du monothéisme”, ETR 78, 2003, p.167-180

3http://www.facmed-univ-oran.dz/ressources/fichiers_produits/fichier_produit_2527.pdf

4L’auteur de ces lignes est un théologien mâle victime de son atavisme.

5Les poulpes et leurs différentes variantes ont en commun avec nous les yeux… et sans doute une forme d’intelligence encore à explorer, mais la conversation psychanalytique est délicate dans ce cas !

6Quand on demande un avis à deux rabbins, ils donnent trois réponses différentes.

La vie éternelle, d’accord … mais où ?

Sans prétention de pertinence

Introduction :

Quelques réflexions suscitées par les thèmes actuels et les circonstances.

1. Les célébrations Pascales génèrent toujours des lignes de textes de la part des théologiens les plus divers, qui tentent de faire passer un message «spirituel» de circonstance dans les feuilles paroissiales ou les journaux de plus grand lectorat.

A part quelques astucieux/ses rédacteurs ou rédactrices, la platitude ou la vanité de ces textes est affligeante et incompréhensible pour qui n’a pas fait son caté en bonne et due forme.

2. La mort de mon beau-frère et d’un ami, et les célébrations qui en ont été l’occasion ont produit un mélange de convictions tout à fait intéressant entre les nouvelles formes de spiritualités, et la tradition judéo-chrétienne, de la plupart de ceux qui y ont participé, sur place à Genève, Fiesole ou par ZOOM.

3. Les explications multiples des chimistes et médecins qui tentent de faire comprendre les processus mis en œuvre pour permettre à l’ARN messager de nous protéger de l’épidémie de la COVID 19, sans altérer notre code génétique ADN qui n’est en aucun cas modifié avec son contenu millénaire,

4. Le livre «L’arbre Monde» de Richard Powers1 qui raconte à travers l’expérience de personnalités curieuses de la nature, les découvertes des multiples voies de communications entre les arbres, les champignons, et les animaux, dont nous faisons partie.

5. Les émissions de «TEMPS PRÉSENT» 25.02.2021

Et s’il y avait une vie après la mort ? Et si les récits de toutes sortes d’expériences troublantes de patients qui ont frôlé la mort étaient plus sérieux que ne le pensent les sceptiques ? Depuis les années 70, face aux innombrables témoignages d’expériences de mort imminente, des scientifiques tentent toujours de percer ce mystère. Des médecins livrent leurs dernières recherches. Patricia, Laurence, Lukas, et Véronique racontent ce moment unique qui a transformé leur vie.

6. Mes réflexions déjà publiées, à propos de l’instinct de survie, du «besoin de résurrection» chez les témoins de la résurrection de Jésus de Nazareth, et la présence au plus intime de nous mêmes des gènes codés de nos prédécesseurs de génération en générations qui vivent «en nous» en une intrication multiple et indéniable.

7. Le livre «Vivre avec nos morts» de Delphine Horvilleur, réflexion pertinente d’une femme rabbin, ancienne journaliste et admirative des histoires humaines.

A partir de là, je plonge dans l’incertitude et le doute fondamental qui m’habite normalement pour comprendre ce qui nous pousse à croire … ce que nous croyons.

Et surtout ce qui a conduit à en décrire les méandres dans la bible et les revues théo-logiques de toutes les époques.

1. La religion et la spiritualité aux risques de «la réalité brute».

Les grandes religions se méfient de ce qui ne fait pas partie de leurs dogmes et conciles millénaires. Ce qui ne rentre pas dans leurs pages est par définition dangereux. Si nous admettons – mais pas tout le monde – que la terre n’est pas plate. Et que le soleil est au centre de notre système planétaire, et pas au centre de l’univers, nous ne risquons plus rien.

Pour tout ce qui n’entre pas dans les confessions de foi, les gardiens de la conformité proclament «Il et grand le mystère de la foi».

Quand le mystère est ligoté dans les institutions, les anges y perdent des plumes.

Les caricatures de Charlie Hebdo déclenchent des vagues meurtrières, «pour sauver l’honneur du prophète» disait sur son grabat, un blessé au Pakistan, après une manifestation contre la laïcité en France. «Allah est grand» hurlait le pilote qui écrasait son avion sur les tours de New-York. Les musulmans Chiites et Sunnites sont certainement les victimes les plus nombreuses de l’intolérance islamiste universelle.

Depuis que les philosophes grecs et plus tard Nietzsche , Marx ou Freud, voir Sartre ou Camus nous ont appris à réfléchir sur la pertinence de nos réflexions et de nos actions, nous avons acquis une certaine souplesse d’analyse qui ne nous fait pas avaler toutes les «Fake News» de la culture du 21e siècle. Nous n’allons par mourir pour nos idées, mais nous prendrons notre temps pour mourir avec nos idées, aussi diverses soient elles. Nous avons la chance de vivre à une époque et dans des pays où il est encore possible – pour combien de temps ? – de proposer la tolérance et la bienveillance comme mode d’analyse de la réalité. Certains y ajoutent l’amour … ou la promotion de la «vie», ou «des vies» comme le soulignait Delphine Horvilleur à la Grande Librairie, puisque en hébreu, le mot «vies» n’existe pas au singulier ( «Le Haïm» = «A les vies»).

La laïcité qu’elle soit française ou helvétique, germanique, russe ou américaine nous offre toutes les possibilités de croire ou de ne pas croire, et surtout de nous permettre de vivre sans avoir peur de «l’œil de Dieu dans son triangle» au fronton de quelques bâtiment ou sous l’index de quelques censeurs qui n’ont que ce moyen pour exercer leurs pouvoirs.

Ce qui se passe dans les cerveaux humains, jusqu’à preuve du contraire, n’a pas d’impact sur la réalité à moins de mettre en œuvre un système qui en découlerait et régirait des actions qui conditionneraient d’autres humains  : Les dictateurs le pratiquent avec le succès que nous connaissons.

Et dans ce domaine au contraire, les judéo-chrétiens ont une certaine expérience avec les «dix paroles» attribuées à «Dieux» par Moïse. Elles sont un programme de survie qui a résisté aux siècles et aux tentations des puissants.

Aujourd’hui nous sommes confrontés à la réalité de la physique, de la chimie, et des méthodes scientifiques très éloignées des «mystères de la foi», mais pas tellement de notre besoin de comprendre, avec ce que la nature nous a donné, pour voir, apprendre, entendre, réfléchir le monde dans lequel nous sommes vivants.

La réalité à l’état «brut» ne s’accorde pas avec les idoles, quelles qu’elles soient.

En fin de vie terrestre et commune, tout devient équivalent et sans réelle importance,

d’où le «repos en paix» définitif sans crainte, sans châtiment, sans «prix à payer».

Prendre de l’avance peut être un avantage …

2. L’unité du vivant.

Je voudrai citer ici cet extrait du Courrier International à propos de la vie des arbres et des forêts, et relever les recherches de Suzanne Simard, :

C’est une spécialiste en écologie forestière à l’université de la Colombie-Britannique [Canada]. Elle étudie depuis vingt ans l’univers souterrain mésestimé. Elle s’est intéressée aux mycorhizes, nom donné au résultat de la symbiose entre un champignon et les racines d’un arbre. Depuis longtemps nous savons que cette symbiose permet aux plantes d’absorber plus facilement les éléments nutritifs contenus dans le sol. Suzanne Simard a mené des expériences inédites qui ont notamment montré qu’un bouleau et un sapin de Douglas s’échangeaient des molécules de carbone. Elle a également découvert que les mycorhizes reliaient les arbres non seulement au sol, mais aussi entre eux.

Je me réfère également à Patricia Westerford, docteur en sylviculture, longtemps réduite au rôle de «femme de ménage» après une thèse descendue en flammes par les autorités académiques qui ne pouvaient la prendre au sérieux. Elle est l’une des protagonistes de «l’Arbre Monde» le roman-récit de Richard Powers.

«Les revues de Salles d’attentes» contiennent régulièrement des articles de coaches divers qui s’intéressent à votre bien être – et accessoirement à vos revenus. Des groupes se promènent en forêt avec un.e guide, qui met en évidence certains arbres et encouragent les participants à les enlacer pour entrer en communication avec leurs facultés de transmettre leurs expériences pluriséculaires, afin de vous purifier des méfaits de la civilisation. Il y a toutes sortes de versions du même genre, avec ou sans intervention d’un «chaman» amérindien ou sibérien, et/ou consommation de substances favorisant le contact souvent qualifié de «spirituel».

Généralement considérées comme des propositions alternatives, je ne met pas en doute la déontologie des journalistes et des photographes qui en témoignent. On peut observer ces pratiques comme des manifestations folkloriques ou comme des thérapies «New Age», assez proches de celles des «faiseurs de secrets» dont les connexions sont encore mystérieuses, et incontestables quel que soit le crédit que nous leur accordons.

Mais revenons aux découvertes et aux intuitions de Suzanne Simard qui a aussi inspiré le livre «The End» de ZEP (Titoeuf) ou comment une forêt décide de se débarrasser de l’humanité.

Il y a eu la découverte inopinée que les Acacias, dont le feuillage est appréciés des Girafes. Le feuillage l’est beaucoup moins quand le premier arbre est attaqué… et que les autres deviennent amers et peu goûté de ces grands mammifères… Le premier arbre a généré des phéromones qui ont entraîné la modification du goût des feuilles pour le reste de la forêt : Il y a eu communication d’une information pour la sauvegarde de l’espèce.

Les recherches des mycologues ont conduit à prendre en compte les filaments de mycélium des champignons comme les vecteurs d’informations entre les plantes, voir comme vecteurs d’humidité ou d’éléments nutritifs pour les arbres ou les plantes en manque d’irrigation. Il arrive même que des racines d’arbres distants se rejoignent en sous sol et se greffent pour partager leurs vies et lutter ensemble contre les aléas de la nature.

Les arbres sont donc des êtres vivants dont l’intelligence n’est pas évidente à démontrer, mais dont on ne peut que constater la pertinence des décisions.

La capacité intelligente des racines à la recherche des nutriments et de l’eau dans le sous-sol, et encore la faculté des arbres à enlacer des roches ou des bâtiments, comme on le voit à la montagne, ou comme le montrent les photos de monuments en Amérique centrale ou en Asie du sud : A Angkor et les ruines Khmères.

Les vecteurs d’oxygènes des feuilles des plantes utilisent les mêmes éléments que les globules du sang pour véhiculer l’oxygène des poumons dans l’organisme…

Les arbres ont une partie de leur ADN en commun avec les animaux et donc les humains : C’est la partie qui code le «vivant» et ses composés assemblés en organismes aptes à se reproduire Donc a entreprendre un destin qui, sauf erreur de programmation, tend vers l’éternité, avec les évolutions sélectionnées pour une meilleure adaptation aux conditions de l’actualité.

Quand nous considérons l’origine de la vie sur cette planète, nous ne pouvons qu’être admiratifs, même si cela reste très mystérieux.

Les cultures ont aussi des traces de ces relations de communications : Les «Arbres à Palabres» des civilisations africaines ne sont pas seulement des parasols : Tous les arbres en sont pas «à palabres». On peut citer dans la Bible la rencontre d’Abraham avec les envoyés de Dieux sous les chênes de Mamré2,

Sur le continent européen, il y a la relation des druides avec les chênes sacrés3. Le chêne de St Louis (IX) sous lequel il rendait justice. On peut aussi citer les traces dans les expressions telles que «Arbres généalogiques» ou «branches de la famille» qui recouvrent des images suggestives ou des manières de présenter des familles.

3. L’héritage transgénérationnel.

Dans son livre , «Aï, mes aïeux»

«Anne Ancelin Schutzenberger livre, à travers son analyse clinique et sa pratique professionnelle de près d’une vingtaine d’années, une « thérapie transgénérationnelle psychogénéalogique contextuelle « .

En langage courant, ceci signifie que nous sommes un maillon dans la chaîne des générations et que nous avons parfois, curieusement, à  » payer les dettes  » du passé de nos aïeux. C’est une sorte de  » loyauté invisible  » qui nous pousse à répéter, que nous le voulions ou non, que nous le sachions ou pas, des situations agréables ou des événements douloureux. Nous sommes moins libres que nous le croyons, mais nous avons la possibilité de reconquérir notre liberté et de sortir du destin répétitif de notre histoire, en comprenant les liens complexes qui se sont tissés à travers les années.»4 C’est l’histoire des «secrets de famille.

Si nous voyons avec évidence l’héritage chromosomique d’une première génération de couples d’origine mixtes, ou les ressemblances entre les générations d’une même famille, il y a des transmissions plus contestées, comme «la bosse des maths», ou la sensibilité artistique, et plus encore mis en question, les héritages «tribaux et culturels» comme par exemple la judéité, à distinguer du judaïsme, qui favoriserait une forme de pensée ou d’appréhension de la culture .

Dans une famille où «on a toujours fait comme ça…» la transgression est ressentie comme une trahison des traditions. L’accomplissement de rites est la garantie de maintenir ses racines, éventuellement de les retrouver.

En préparant un service funèbre dans une famille durement éprouvée par l’accompagnement d’un défunt après 6 ans d’Alzheimer, l’épouse qui l’a accompagné jusqu’au dernier moment exprimait une joie sereine à l‘idée de la vie qui s’ouvrait à elle. Comme je m’en étonnais, elle me dit «C’est grâce à St Antoine : J’ai eu une longue conversation avec lui cette dernière semaine, et il m’a dit que je devais me réjouir de la mort de mon mari, enfin délivré de ses angoisses et de ses fantômes. St Antoine m’a encouragé à vivre heureusement avec mes enfants et mes petits enfants, et mon mari restera présent après de moi».

Pour un théologien protestant en charge de la cérémonie funèbre, je me suis remis en question : Qui est ce St Antoine, quand ce mot représente à Genève le bâtiment de la prison (désaffectée), ou éventuellement St Antoine de Padoue5, une paroisse de la ville, ou encore un «père de l’Église» dont l’histoire est racontée par St Athanase ?

J’ai trouvé une explication dans le fait que cette dévotion avait aussi été celle de la mère de la veuve, espagnole, descendante de Marranes6, dont la religiosité «catholique» était plutôt une manière de se conformer à l’air du temps à l’époque de la dictature franquiste.

Ainsi, la «présence» des anciens dans l’héritage génétique leur permet de ressurgir fortuitement, comme ce dialogue avec St Antoine, toutes ses identités confondues, qui résume les paroles de Jésus de Nazareth : «Avec la foi comme un grain de moutarde vous pouvez transporter les montagnes», et «Tout ce que vous demanderez au Père, il vous l’accordera…» une parole au cœur du messagedu «Père du Désert», comme le rapporte St Athanase au 3e siècle ap.JC.

Le bonheur comme le mystère est à portée de foi…

4. Les curieuses manifestations de «l’âme»

La grande émotion qui accompagne le décès d’une personne très proche nous fait envie de la conserver près de nous, ou tout au moins à notre portée. Un besoin ancestral qui a déterminé les rituels de sépultures, et les cimetières mémoriaux précisément situés. Le corps ou les cendres sont localisés, mais la personne nous est «présente» partout.

Rationnellement et objectivement nous pouvons dire que ses héritiers ont dans leurs ADN le matériel génétique qui est la garantie de la présence en eux du défunt. Les proches ont le sentiment d’avoir partagé avec le décédé des moments forts qui ont aussi modifié leur propre vie.

Les médecins, psychiatres, et neurologues sont aujourd’hui perplexes devant les témoignages de «morts imminentes» que les personnes qui les ont éprouvés osent raconter sans avoir peur d’être considérés comme «hallucinés» ou psychiquement suspects.

En résumé, tous ces récits convergent : A la suite d’un accident vasculaire cérébral (AVC), d’un accident de la route, d’une complication après une opération cardiaque, un coma naturel ou artificiel, les témoins racontent qu’ils étaient considérés comme «A l’article de la mort» ou proche de la «mort cérébrale» et qu’ils se sont «vu» hors de leurs corps physiques, comme flottants au-dessus de la scène réelle. Ils entendaient les personnes autour de leur «pas encore dépouille». Ils les voyaient intervenir, procéder aux gestes de réanimation, s’interroger sur l’opportunité d’un acharnement thérapeutique.

Ils décrivent aussi une douce lumière à l’extrémité d’un tunnel, avec une sorte d’invitation à s’y diriger. Il y a aussi, et simultanément, les liens affectifs qui s’expriment, ceux qu’ils devraient quitter, ou pas. Les tâches qui restent à faire pour être tout à fait en paix, ou ne pas laisser le «petchi» à ceux qui restent.

Et une fois le pour et le contre évalué… le retour dans le corps et à la vie… avec les séquelles normales, la rééducation et la restauration des fonctions vitales, par les techniques ordinaires de la médecine, qui attesteront d’un miracle pas toujours explicable «Après ce que vous avez vécu»… en fait après ce moment où vous n’avez plus vécu. Le cœur s’est arrêté, le cerveau n’était plus irrigué, mais vous êtes revenus à la vie.

Pour certaines personnes, cela a changé leur vie : Elles ont définitivement réorienté leurs activités, leur manière de penser, leurs relations avc les autres.

Mais il y a aussi des cas plus dramatiques, qui ont un très mauvais souvenir de cette expérience, qui rend la «mort» effrayante : question : Qu’est-ce qui est effrayant, le vécu passé ou ce qui reste à vivre ?

5 L’environnement électromagnétique7

Le dernier intervenant dans le documentaire de «TEMPS PRÉSENT»8 un scientifique hollandais qui a particulièrement observé les récits des «revenus à la vie» relève que les phénomènes de «décorporations» sont communs. Les perceptions ou les visions des situations ne se font pas à partir d’un autre «corps» qui flotterait dans l’air, mais serait le «point de vue» d’une conscience (faute de meilleures définition) qui n’aurait pas de consistance particulière, mais la faculté de s’incarner (ou pas) dans ce laps de temps incertain.

Il évoque également les découvertes de la physique Quantique, et les expériences d’intrication des atomes, sur lesquels on observe des réactions identiques à distances.

En tirant sur le fil de sa démonstration – sans y accorder autrement une pertinence convaincante – cela rejoint les tentatives des mediums pour entrer en contact avec les défunts, ou les hommes ou femmes célèbres décédés «Esprit es-tu là» pour faire tourner les tables, et le plus souvent le tiroir caisse.

Nous savons par expérience que nous pouvons écouter la radio, notre portable, la TV, le wifi et les grésillements des lignes à très haute tension partout, ou presque. Il suffit d’avoir un «récepteur» calibré sur les fréquences disponibles pour recevoir un signal.

De même nous envoyons dans le «cloud» – mais ce sont aussi des serveurs bien terrestres – nos pensées les plus profondes ou les plus triviales.

Il ne serait donc pas étrange d’envisager que les «traces» des vivants de toutes les époques se trouvent aussi dans l’atmosphère et accessibles grâce à un récepteur adapté, qu’il soit physique et électromagnétique ou «spirituel». Si nous acceptons l’hypothèse que les perceptions extracorporelles sont le fait d’une entité immatérielle, et donc, pour faire simple sont «spirituelles»… encore que l’écoute les mains jointes ne favorise rien du tout.

Nous devons cependant tenir compte des témoignages de ceux qui, comme cette amie avec St Antoine, ont perçu une présence amicale, qualifiée d’«Ange Gardien» pour orienter un processus de décision, ou détourner les circonstances d’une issue fatale.

Il y a ceux qui vivent avec cette présence rassurante, mais immatérielle, d’un être aimé qui ne «quitte pas» la personne qui en a exprimé le besoin ou la nécessité … sur Facebook ou Whatsap. Il y a les «guérisseurs» et «faiseurs de secrets» qui lèvent les brûlures des traitements contre les cancers, ou effacent les verrues.

Et encore : La vision de Marie Madeleine devant le tombeau de Jésus de Nazareth, vide, le matin de Pâques : Un ange qu’elle prend pour le jardinier. Les disciples dans la «chambre Haute», fermée après la crucifixion et la mise au tombeau qui se trouvent e présence de Jésus, qui encourage Thomas à le toucher9. Et Paul sur le chemin de Damas qui entend Jésus lui demander «Pourquoi me persécutes-tu ?10»

Et les fillettes de la grotte de Lourdes qui devinent Marie avec ses vêtements traditionnels d’apparition.

Les apparences sont trompeuses quand il faut décrire une «vision de ce genre : Toutes les Maries se ressemblent à partir d’une certaine époque : tunique-robe bleue, voile blanc, regard à 10h10…

Tous les Jésus sont conformes aux peintures du 15e siècle : Un grand blond aux yeux bleus et à la barbe bien taillée… Si vous ne voyez pas dans le style du cliché, votre vision n’est pas valable !

Qu’en est-il alors des Revenants fantômes, qui sont différents des présences ressenties ?

Delphine Horvilleur les évoques dans son livre «Vivre avec nos morts»11 en insistant sur la nécessité de respecter ceux qui nous ont quittés, en racontant leurs expériences de la vie réelle, avec ses bonheurs et ses travers, pour donner de la qualité à la vie de ceux qui restent et les protéger des revenants qui les hanteraient pour avoir «raté» leur cérémonie funèbre.

Restent, les «Apparitions non sollicitées» d’indispensables accompagnants, comme St Antoine évoqué plus tôt, ou Jésus de Nazareth hors du cadre temporel et géographique, voir ecclésial.

Est-ce qu’il n’y aurait pas de la part d’«apparus»12 une réelle volonté de se rendre «présents» en agglomérant suffisamment de substance pour devenir concrets et être «ressuscité» comme dans le récit de l’apparition dans la chambre haute à Jérusalem, et l’invitation faite à Thomas de toucher les plaies de Jésus, pour être convaincu de sa présence vivante , malgré les «portes fermées», comme de supers hologrammes ?

Conclusions

Pour couper court à toutes les interrogations : Ce que j’ai essayé de mettre en relation n’implique pas d’y croire ou de ne pas y croire.

Je mettrai en citation l’histoire racontée par Delphine Horvilleur et Marc-Alain Oaknin :

Un jeudi soir dans la salle de la Yeshiva13 il y a une grande discussion entre deux vieux rabbins qui se demandent si «Dieu existe» et avec arguments et contre arguments. Ils en arrivent à la conclusion  : «Définitivement, Dieu n’existe pas»…

Le lendemain soir, les juifs de la Yeshiva se rendent à la Synagogue pour l’ouverture du Sabbat, et voient les deux rabbins s’y rendre avec eux. Un des témoins de la querelle de la veille les interpelle : «Vous venez à la Synagogue malgré votre conclusion d’hier soir ?» Et les rabbins répondent «Cela n’a rien à voir !»

Si ce que vous croyez sincèrement vous aide à vivre, alors n’hésitez pas, car, comme le rappelait St Antoine d’Egypte, selon les paroles de Jésus de Nazareth «si vous avez la foi, même aussi modeste qu’un grain de moutarde, vous pourrez déplacer les montagnes»14 «Demandez à Dieu et vous recevrez…»

C’est comme vous croyez, je n’en doute pas une seconde.

Bernard van Baalen le 27.avril 2021

1Ed Cherche midi 2018

2Genèse 18:1-16

3 En Europe, le bois sacré semble avoir été un élément important du paysage mythologique de la Grèce  et de la Rome antique, et de la pratique des cultes celtiques, germaniques, nordiques et slaves. (En anglais Hollywood)

4 Paru en mai 2015 Desclée de Brouwer Résumé du catalogue AMAZON

5Né à Lisbonne, et franciscain-Cordelier contemporain de St François, Les croyants s’adressent à lui pour retrouver leurs clés, porte-feuilles ou leurs lunettes !

6 Les marranes sont, à partir du XV e siècle, les Juifs de la péninsule Ibérique et de ses colonies (Espagne, Portugal, Amérique latine) convertis au catholicisme qui continuaient à pratiquer leur religion en secret.

7La 5G en fait partie, mais n’y ajoute rien.

8 26 févr. 2021

9Jean 20:19-31

10Actes 9:4-5

11Ed Grasset, Mars 2021

12 (J’invente le terme!)

13Maison d’étude juive

14Assez perturbant pour les géographes !

La résurrection et la mort.

Pourquoi introduire une note sur la mort

dans les documents de préparation du Camp Biblique Oecuménique de Vaumarcus sur le thème des récits concernant Jésus Ressuscité, entre la mise au tombeau et l’Ascension :

Nous avons abordé cette question en nous interrogeant sur l’opportunité de mentionner les textes de la Passion, car avec la mort de Jésus sur la croix, il n’y a pas de résurrection à envisager, si l’Évangile de Marc se termine sur la mention du « tombeau vide » (Mc. 16:8). comme le laissent supposer quelques manuscrits. Ou au contraire, les récits de résurrection découlent théologiquement de la passion…

Mais le thème choisi était « Jésus Ressuscité, entre la mise au tombeau et l’Ascension » à répartir sur 6 jours… et nous avons découvert dans une relecture des textes que la thématique du « ressuscité » ouvrait des perspectives passionnantes pour nos propres expériences de vie.

Toutefois, si Jésus est ressuscité, il n’en est pas moins mort, comme c’est le destin de chacun d’entre nous : Alors qu’est-ce que la mort, et surtout la peur du « passage » de « l’autre côté » pour autant qu’il y ait autre chose… du point de vue de ceux qui restent.

Une construction pour survivre.

La mort est une composante de la vie que nous devons tous affronter. Abruptement, nous savons que cet événement atteint une personne, qui cesse de vivre, point. Mais cet événement interroge ceux qui survivent, continuent leur vie sans la personne décédée, qui, généralement, ne sait pas ce qu’il y a de l’autre côté de la vie. Cela a été le cas de tout temps. Les archéologues ont parfois envisagé que les premières sépultures aient été le signe d’un changement dans l’évolution de l’humanité. L’inquiétude qui découle de la fin de vie, va très vite entraîner des rites funéraires, et des mythes, sur les besoins supposés des défunts, au delà de leur état de « vivants ».

Ceux qui « savent » vont accompagner les vivants, et vont rapidement devenir des autorités en la matière : Ils peuvent dire qui va dans quelle case de l’organisation de l’au delà, et à quelles conditions. L’attrait du pouvoir n’est pas loin et les religions en ont toutes utilisé les ressources pour consolider leurs convictions et conditionner leurs fidèles

1. L’expérience de la mort de l’autre.

Le décès d’un proche est souvent l’objet de l’interrogation de la famille : La cause de l’angoisse ou de la quiétude de son départ, des ses souffrances endurées sereinement ou douloureusement. Nous considérons sa vie, ses relations, son parcours pour tenter d’envisager ce qui serait éventuellement une autre manière de « rester parmi nous ».

Les rituels nous ont habitués à considérer notre vie comme incertaine du point de vue des grands principes de la foi judéo-chrétienne : en témoigne la « confession des péchés » de la liturgie genevoise, datant de Théodore de Bèze1, « Seigneur Dieu, Père éternel et tout-puissant, nous reconnaissons et nous confessons, devant ta sainte majesté, que nous sommes de pauvres pécheurs, nés dans la corruption, enclins au mal, incapables par nous-mêmes de faire le bien, et qui transgressons tous les jours et en plusieurs manières tes saints commandements, ce qui fait que nous attirons sur nous, par ton juste jugement, la condamnation et la mort.
Mais, Seigneur, nous avons une vive douleur de t’avoir offensé, et nous nous condamnons, nous et nos vices, avec une sérieuse repentance, recourant humblement à ta grâce et te suppliant de subvenir à notre misère. Veuille donc avoir pitié de nous, Dieu très bon, Père de miséricorde, et nous pardonner nos péchés pour l’amour de ton Fils Jésus-Christ, notre Sauveur.

Suivent les « Paroles de Grâces » exprimées par le pasteur du haut de la chaire…

Les manquements seront certainement portés au bilan, et les bonnes actions au crédit, mais de quoi ? Pas très rassurant !

Nous n’en savons pas plus aujourd’hui que les anthropopithèques d’il y a 400’000 ans. La science, ne nous explique rien, la philosophie nous aide, la psychanalyse soigne nos angoisses, et l’absolution devrait nous libérer… de quoi ? C’est frustrant, surtout quand notre santé est atteinte et que cela s’ajoute aux soins dont nous espérons l’efficacité.

1 1519 – 1605

Nous avons vu dans un autre article1, que les cultures offrent toutes sortes de scénarios pour les « fins ultimes », pour autant que nous y accordions crédit. Mais toutes ont le défaut de ne pas nous épargner l’angoisse du passage, même si l’humour s’y glisse souvent quand nous ne sommes pas concernés.

  1. La proposition de Jésus de Nazareth

Le rabbi qui avait été confronté au deuil de ses amis avait eu des réactions étonnantes vis a vis de la mort : Mat.18:19-23

19 Un scribe s’approcha et lui dit : « Maître, je te suivrai partout où tu iras. » … 21 Un autre des disciples lui dit : « Seigneur, permets-moi d’aller d’abord enterrer mon père. » 22 Mais Jésus lui dit : « Suis-moi, et laisse les morts enterrer leurs morts. » 23 ¶ Il monta dans la barque et ses disciples le suivirent.

Jésus a été appelé à ramener à la vie quelques uns de ses amis ou leurs proches : Le plus célèbre est Lazare raconté dans l’Évangile de Jean 11:1-45 Le récit est circonstancié, je relève cette parole : 25 Jésus dit à Marthe: « Je suis la résurrection et la vie : celui qui croit en moi, même s’il meurt, vivra ; 26 et quiconque vit et croit en moi ne mourra jamais. Crois-tu cela ? » Plus loin, alors que Lazare est déjà au tombeau, Jésus dit encore à Marthe : « Ne t’ai-je pas dit que, si tu crois, tu verras la gloire de Dieu ? » 41 On ôta donc la pierre Alors, Jésus leva les yeux et dit : « Père, je te rends grâce de ce que tu m’as exaucé. 42 Certes, je savais bien que tu m’exauces toujours, mais j’ai parlé à cause de cette foule qui m’entoure, afin qu’ils croient que tu m’as envoyé. » 43 Ayant ainsi parlé, il cria d’une voix forte : « Lazare, sors ! ».

Il y a également la guérison du fils du centurion et de la belle-mère de Pierre Mat 8:5-13 et Luc 7:1-10, et encore la fille de Jaïrus : Marc 5:21-43 , Matthieu 9:18-26 et Luc 8:40-56 . qu’il va « réveiller » Je ne préciserai pas ici les raisons de l’insertion de ces récits dans le texte biblique, mais je souligne que « la mort » n’est pas un problème pour Jésus… Il rend la vie pour peu que les proches aient « la foi » en « la résurrection et la vie ».

Avant la mort, il y a la souffrance, et là encore Jésus intervient avec pertinence : Marc2 :1-12 raconte la descente par le toit d’un paralytique qui sort avec son brancard sous le bras. Avec l’homme à la main « sèche » Marc 2:27-3:6 comme lors de la guérison des lépreux : Luc 17:11-22 Jésus remet en relation les exclus de la société.

Dans le récit de l’aveugle né, nous touchons à la question que tout le monde se pose : Jean 9 : 1 Jésus vit, en passant, un homme aveugle de naissance. 2 Ses disciples lui firent cette question: Rabbi, qui a péché, cet homme ou ses parents, pour qu’il soit né aveugle? 3 Jésus répondit: Ce n’est pas que lui ou ses parents aient péché; mais c’est afin que les œuvres de Dieu soient manifestées en lui

Nous retrouvons là la préoccupation de la plupart de nos contemporains, quand ils considèrent leur propre vie. Elle n’est pas autant affectée, mais « on ne sait jamais ».

Cette angoisse devant la mort a un effet paralysant, aveuglant, dans tous les cas handicapant, et le Jésus de Nazareth que nous connaissons comme le « Christ » a voulu nous « rendre libres » Jean 8:31-36 31 ¶ Jésus donc dit aux Juifs qui avaient cru en lui : « Si vous habitez ma parole, vous êtes vraiment mes disciples, 32 vous connaîtrez la vérité et la vérité fera de vous des hommes libres. » … « En vérité, en vérité, je vous le dis, celui qui commet le péché est esclave du péché. 35 L’esclave ne demeure pas toujours dans la maison ; le fils, lui, y demeure pour toujours. 36 Dès lors, si c’est le Fils2 qui vous affranchit, vous serez réellement des hommes libres.

1Voir les références en fin d’article.

2Un « Fils » que vous reconnaissez … « Celui qui m’a vu a vu le Père »..Jean 14:9.

3. Le déplacement de la peur de la mort.

Nous voyons que la crainte de ce qui va se passer « après la vie » est essentiellement une perturbation de notre existence avant notre propre mort. Jésus a « libéré des vivants » au parcours contrariés sans doute aussi par leurs peurs de « ne pas bien faire ». C’est le conformisme, la « bien-pensance », le « politiquement » ou « religieusement » correct, lié à nos confessions de foi et à la dogmatique en cours dans nos communautés qui, comme les pharisiens et les sadducéens obscurcissaient leur conception le la foi : Marc 12 :18 ¶ Des Sadducéens viennent auprès de lui. Ces gens disent qu’il n’y a pas de résurrection. Ils lui posaient cette question :19 « Maître, Moïse a écrit pour nous : Si un homme a un frère qui meurt en laissant une femme, mais sans laisser d’enfant, qu’il épouse la veuve et donne une descendance à son frère … 20 Il y avait sept frères. Le premier a pris femme et est mort sans laisser de descendance. 21 Le second a épousé cette femme et est mort sans laisser de descendance. Le troisième également, 22 et les sept n’ont laissé aucune descendance. Après eux tous, la femme est morte aussi. 23 A la résurrection, quand ils ressusciteront, duquel d’entre eux sera-t-elle la femme, puisque les sept l’ont eue pour femme ? » 24 Jésus leur dit : « N’est-ce point parce que vous ne connaissez ni les Écritures ni la puissance de Dieu que vous êtes dans l’erreur ? 25 En effet, quand on ressuscite d’entre les morts, on ne prend ni femme ni mari, mais on est comme des anges dans les cieux. 26 Quant au fait que les morts doivent ressusciter, n’avez-vous pas lu dans le livre de Moïse, au récit du buisson ardent, comment Dieu lui a dit : Je suis le Dieu d’Abraham, le Dieu d’Isaac et le Dieu de Jacob1 ? 27 Il n’est pas le Dieu des morts, mais des vivants. Vous êtes complètement dans l’erreur. »

Et l’erreur est pérenne… en fait tout le monde se fiche pas mal du statut de cette femme et de celui de ses maris. Comme pour la Samaritaine de Jean 4:1-42 qui bien qu’ayant eu 7 compagnons et « n’a pas de mari ». Elle reçoit « l’eau vive » qui la libère de l’opprobre extérieure et de sa culpabilité, la rendant même communicante de l’Évangile.

Nous voyons dans ces références que la notion de « résurrection » ne se limite pas à celle de la « mort » physique. Est-ce que nous ne disons pas d’un ami qui change de vie qu’il est comme « ressuscité » ou qu’une opération chirurgicale a « ressuscité » un patient dont le pronostic vital était engagé, par exemple après un accident.

1La citation avec le présent exprime que Dieu est celui qui est avec chacun des patriarches, et non pas dans la continuité… une astuce linguistique impossible à rendre en français.

4. La résurrection accessible et communicative ?

Dans l’Évangile de Jean, à la fin, nous trouvons ces paroles : Jn 20:21. Alors, à nouveau, Jésus leur dit : « La paix soit avec vous. Comme le Père m’a envoyé, à mon tour je vous envoie. » 22 Ayant ainsi parlé, il souffla sur eux et leur dit : « Recevez l’Esprit Saint ; 23 ceux à qui vous remettrez les péchés, ils leur seront remis. Ceux à qui vous les retiendrez, ils leur seront retenus. »

C’est une sorte d’«ordre de mission » dont on peut légitimement comprendre qu’il ait été particulièrement mis en évidence par les hiérarchies ecclésiastiques déjà en place à l’époque de la rédaction de l’Évangile de Jean. L’objectif poursuivi par Jésus est de libérer les croyants de la peur de la mort et des châtiments qui vont avec, pour nous permettre de vivre dans la paix et la sérénité. Bon, il ne s’agit pas de vivre comme un sacripant et d’obtenir l’absolution d’un « clerc légitime et assermenté » pour recommencer le lendemain, si ce n’est pas plus tôt. C’est la « Pensée Magique » originale que Jésus de Nazareth met en œuvre, en opposition à celle qui est privilégiée par les amateurs de pouvoir et les exploitants de la crédulité des fidèles. Car ces instruments de contrôle sont de puissantes machines économiques : Les voyants extralucides et les pompes funèbres n’en sont que la partie émergée de l’Iceberg, avec les excès du « Temple Solaire » et de la « Scientologie ».

La pertinence de la proposition de Jésus de Nazareth, qui n’est pas exactement celle des église de toutes les dénominations, est qu’elle permet d’aborder la dernière étape de la vie sans peur et sans remords, puisque c’est dans la partie « vivante » que tout se passe. L’amour, la haine, la générosité et la pingrerie ne peuvent s’exercer que du vivant de celui ou celle qui en fait bénéficier ses semblables : Son « enfer » sera d’en subir les conséquences, sa « résurrection » d’en recevoir la sérénité, et cela n’a pas de prix.

5 . Qui a l’autorité de pardonner ?

La réponse à LA QUESTION de l’habilitation à partager le pardon est dans la relation interpersonnelle que nous avons avec nos proches. La psychanalyse peut aider à trouver le chemin, un/e psychologue, un ecclésiastique, un ami peut accompagner la démarche, mais elle reste personnelle dans notre rapport avec les règles fondamentales que nous avons héritées quasi « génétiquement » et mises en évidence par le récit des tables de la Loi de Moïse. C’est la seule et unique règle de vie proposée par le Rabbi de Nazareth. Une « pensée magique » qui fait ses preuves, comme nous pouvons le constater tous les jours.

Maintenant si vous avez « besoin » d’un rituel, d’un moniteur de conscience, vous êtes libres… à « condition » qu’il n’y en aie aucune autre que votre libre décision.

6. le cas particulier de Jésus de Nazareth à Gethsémané1.

Paradoxe du récit biblique de la Passion : La prière de Jésus semble indiquer que pour ce qui le concerne, il vit ce que tous les humains pressentent à l’approche de la mort et de la souffrance possible. Lui qui a toujours proclamé ses convictions à propos de la « vie éternelle » ou de la « résurrection » qu’il mettait en œuvre pour les autres est confronté à un choix que les évangiles nous ont heureusement épargnés: Échapper à l’arrestation et à la mort par une entourloupe divine, ou assumer ses choix de vie jusqu’au supplice infligé pour avoir été fidèle à l’injonction divine et non pas pour une faute pénalement condamnable dans l’absolu. Souvenez-vous d’un autre dénouement-résurrection où la « faute » traditionnelle est révoquée par la bienveillance vitale. La lapidation est évitée comme le raconte Jean 8,1-11. La coutume veut la mort de la femme convaincue d’adultère, et Jésus renvoie les intellectuels juristes en leur donnant le choix de jeter la première pierre s’ils sont eux mêmes sans péchés… Chacun s’examinant quitte le terrain et Jésus ne condamne pas la femme non plus.

Au « Jardin des Oliviers » ceux qui vont intervenir sont envoyés pour l’arrêter… les théologiens diront que c’était pour que soit proclamé le royaume de Dieu… qui reste un risque vital pour celui qui respecte la « loi de Dieu ». Jésus de Nazareth nous a habitué à aller jusqu’au bout de nos convictions, avec l’idée que la résurrection serait à l’autre bout du « tunnel » qui semble s’ouvrir au moment de la mort.2 Il va en faire la démonstration en ne reniant rien de ses convictions, Marc 14:33 raconte¶ Jésus emmène avec lui Pierre, Jacques et Jean. Et il commença à ressentir frayeur et angoisse. 34 Il leur dit : « Mon âme est triste à en mourir. Demeurez ici et veillez. » 35 Et, allant un peu plus loin, il tombait à terre et priait pour que, si possible, cette heure passât loin de lui. 36 Il disait : « Abba, Père, à toi tout est possible, écarte de moi cette coupe ! Pourtant, non pas ce que je veux, mais ce que tu veux ! »

Rappelez-vous Jean 14 :6 Jésus dit : « Je suis le chemin et la vérité et la vie. Personne ne va au Père si ce n’est par moi.7 Si vous me connaissiez, vous connaîtriez aussi mon Père. Dès à présent vous le connaissez et vous l’avez vu. » Jésus se révèle ici comme totalement humain, avec la peur instinctive de la souffrance. La perspective de la résurrection ne l’atténue pas : C’est la limite de la « pensée magique » : Non pas la peur de la mort, mais de ce qui la précède. Aller jusqu’au bout de ses convictions est l’unique exemple que Jésus va donner, sachant que sa résurrection se fera sous d’autres formes, avec d’autres personnalités, quelles que soient les époques.

En annexe je vous donne un exemple du 20e siècle qui m’a beaucoup touché, à cause de mes amis chiliens qui connaissaient Victor Jara. Il est lui aussi allé jusqu’au bout de ses convictions.

Bernard van Baalen

le 12 novembre 2019

1 Dans les évangiles synoptiques (Marc, Matthieu, Luc), Gethsémani ou « le pressoir à huile » est le lieu où Jésus a prié avant son arrestation .

2 La fameuse « lumière blanche au fond du tunnel » aperçue par les personnes ayant réchappé de peu à la mort, dont font part certaines victimes d’arrêts cardiaques, correspondent à un regain de l’activité cérébrale lorsque la circulation sanguine cesse dans le cerveau.

Annexes.

La mort du chanteur Víctor Jara, le 16 septembre 1973,

Né le 28 septembre 1932 dans une famille paysanne. Encouragé par sa mère à faire de la musique et des études, Victor Jara s’essaye à la comptabilité, puis il passera deux ans au séminaire en vue de la prêtrise. Il est désillusionné par l’immobilisme de l’Église Romaine1. Finalement Victor Jara sera enseignant, metteur en scène de théâtre, poète, auteur-compositeur-interprète et militant politique Il a développé le théâtre chilien, allant de pièces de théâtre produites localement à des œuvres classiques du monde, ainsi qu’un travail expérimental de dramaturgie . Il a également joué un rôle central parmi les musiciens néo-folkloriques, avec de nouvelles sonorités dans la musique populaire, qui ont créé le mouvement Nueva Cancion Chilena (Nouvelle chanson chilienne).

Engagé aux côtés de l’Unité Populaire, proche de Salvador Allende, Víctor Jara, 40 ans, fut arrêté le jour même du coup d’Etat, le 11 septembre. Enfermé au stade Chile, il est supplicié plusieurs jours de suite. Dans le stade, avec sa guitare, il chante :

« En marche sur le long chemin »

Un des chants très populaires au Chili de cette époque, que tout le stade va reprendre :

Ven, ven, conmigo ven,

ven, ven, conmigo ven.

Vamos por ancho camino,

nacerá un nuevo destino, ven.

Ven, ven, conmigo ven,

ven, ven, conmigo ven.

al corazón de la tierra

germinaremos con ella, ven.

El odio quedo atrás

no vuelvas nunca,

sigue hacia el mar

tu canto es río, sol y viento

pájaro que anuncia la paz.

Amigo tu hijo va,

hermano tu madre va,

van por el ancho camino

van galopando en el trigo, van

Ven, ven, conmigo ven,

ven, ven, conmigo ven.

Llegó la hora del viento

reventando los silencios, ven.

Viens, viens avec moi viens,
Viens, viens, viens avec moi.
Nous allons un long chemin,
Un nouveau destin va naître, viens.
 

Viens, viens avec moi viens,
Viens, viens, viens avec moi.
au cœur de la terre
Nous allons germer avec elle, viens.

La haine est laissée pour compte
ne reviens jamais
continue d’aller à la mer
Votre chanson est rivière, soleil et vent
Oiseau annonçant la paix

Ami ton fils s’en va,
frère ta mère s’en va,
ils vont sur un grands chemin
ils galopent dans le blé, ils vont

Viens, viens avec moi viens,
Viens, viens, viens avec moi.
L’heure du vent est venue
Briser les silences, viens.

Les militaires lui broient les mains à coups de crosses pour lui faire passer l’envie de jouer de la guitare. Sans les mains, il continue de chanter.

Il est finalement abattu, de 44 balles, dont le coup de grâce. Sa femme récupère le corps abandonné dans un terrain vague et l’enterre clandestinement. En 2009, le corps est exhumé et son enterrement officiel peut enfin avoir lieu.

Le stade de Santiago porte son nom.

1 le congrès de Medellín de la CELAM, en 1968, fit le choix prioritaire des pauvres, « engageant l’Eglise pour le développement intégral de tout l’homme et de tous les hommes vers une libération. Dom Helder Camara en a été l’une des figures marquantes. L’épiscopat conservateur était plus « réservé », sauf l’archevêque de Santiago qui a fait de son mieux pour protéger ses collaborateurs progressistes.

Pourquoi raconter les récits de la Résurrection ?

Jésus entre la crucifixion et Pentecôte

Propositions de réflexions autour de l’expérience humaine des lecteurs et auditeurs du 21e siècle.

Pour l’équipe théologique de préparation du Camp Biblique Oecuménique de Vaumarcus 2020

Si nous pouvons comprendre le sentiment des amis de Jésus de Nazareth après sa mort, lorsqu’ils se retrouvent dans le projet commun d’annonce du « Royaume de Dieu ». Il s’agit bien d’une incitation à changer le mode de perception des Dix Paroles pour les faire passer des « commandements à ne pas transgresser », à un encouragement à aimer Dieu, et donc son prochain, avec imagination, pour se libérer des culpabilités et des infirmités mortifères. (Voir mon article Jésus, après la mise au tombeau.)

Je rappellerai à cette occasion la phrase de Marshall McLuhan1 « Le medium est le message » ce qui se démontre à l’évidence dans notre pratique de la Bible comme vecteur de la « Bonne Nouvelle ». Mais là il faut bien distinguer le texte (medium) de son support (Le livre papier ou électronique) . Le texte est vecteur du « message » : il comporte aussi bien les paraboles, les récits apologétiques2, les souvenirs, et les interprétations des sentiments éprouvés par les rédacteurs. Le texte ne peut dans ce cas pas être LE message, puisque, les prédicateurs de toutes les époques l’ont bien exprimé, le message peut aussi bien devenir pertinent à travers d’autres citations, textes, anecdotes et récits biographiques. Il ne faut pas oublier non plus qu’au début de la diffusion des récits que nous trouvons dans les évangiles et le livre des actes, il n’y avait pas de support écrit, mais une transmission orale.

Il n’en reste pas moins, ou plus, que la présence de ces récits dans le second testament doit répondre à une nécessité que je voudrai essayer de recadrer dans le contexte de l’époque et des pratiques de communication que nous connaissons aujourd’hui

Les auteurs du Livre des Actes, des épîtres, mais de tout le Second Testament en fait, sont confrontés à la nécessité de « faire passer » le message de manière plus « contrôlée » pour évter les dérives. Ils sont dans une situation culturelle où toutes sortes d’histoires, de légendes, de mythologies traversent le monde gréco-romain et oriental. Les philosophes proposent des conception du monde et des relations humaines qui visent à organiser la société en fonction des nécessités politiques et sociales dont ils sont proches : Une organisation pyramidale dont l’empereur, voir Dieu, est au sommet, ou horizontale dont le « peuple » est souverain, si tous les citoyens sont égaux (plus ou moins) et rassemblés dans un consensus délibératif.3

Comme le Live des Actes nous le présente4 dans le cas de Paul : dire que « Jésus est ressuscité » n’entre pas dans les catégories intellectuelles des philosophes d’Athènes.

Mais les philosophes ne sont pas les « clients » privilégiés des disciples de Jésus de Nazareth, ceux qui sont visés sont ceux qui souffrent de leur situation présente, ou qui sont responsables de la vie de leurs contemporains, et accessoirement de leur propre vie.

  1. La validation du « porteur de la bonne Nouvelle »

Le premier testament nous a abondamment expliqué que les Juges, les Prophètes, les Rois ont été adoubés5 par une autorité précédente sur l’injonction de la divinité, ou de l’oracle, ou de la nécessité de la situation6

Les récits des « Aventures de Jésus de Nazareth » sont largement répandus dans le judéo-christianisme qui se constitue dès le rétablissement des relations entre les témoins de la vie de Jésus, après le choc de sa mort peu glorieuse aux yeux du monde.

Nous sommes aussi à une époque ou fleurit ce que nous appellerions aujourd’hui le « story telling » : « conter des histoires » car les personnes capables de lire sont rares, et les écrits le sont encore plus. La transmission des faits et gestes de Jésus et de ses amis se fait essentiellement oralement, et ce sera le cas jusqu’à l’invention de l’imprimerie, sauf pour les érudits qui ont accès aux bibliothèques, essentiellement dans les monastères. Donc c’est le « discours qiu est le message » pour reprendre l’idée de McLuhan.

Jésus qui se présentait comme un « fils de l’homme » soit un humain ordinaire, va recevoir le titre de « Fils de l’Homme » comme attribut divin. Le récit de son baptême va être souligné par une parole céleste : « Celui-ci est mon Fils, écoutez-le »7 et la « confession de Pierre »8 qui sera le « premier Pape » (?) le précisera quand Jésus lui dira que c’est sur cette « pierre » qu’il bâtira son église9.

D’où sortait-t-il, celui qui avait grandi à Nazareth, fils de Marie et de Joseph le charpentier ? Contesté se son vivant, mais né d’un miracle conceptuel, facilement compréhensible par les auditeurs du récit de sa naissance. Comme tous les êtres divins connus, il est nés de la conjugalité de (d’un) Dieu avec une vierge très humaine, qui devient « sainte » par l’action du Saint-Esprit : une évidence incontrôlable 40 ou 50 ans plus tard.

Ce qui est vraisemblable, dans l’éducation et l’évolution d’un jeune juif sera naturellement aussi le parcours de Jésus de Nazareth reconstitué lorsqu’il est devenu un « people » à l’époque. J’utilise intentionnellement ce terme car il traduit précisément la nécessité pour une personne connue pour son franc parler et son discours disruptif, d’avoir quelque chose de commun, ou en tout cas de compréhensible par ses auditeurs.

Qu’avons nous besoin de savoir quelle fut l’enfance de Roger Federer ou de Martina Navratilova pour admirer ou critiquer leurs manières de jouer ou de renvoyer la balle ?

Pourtant, ils se font aimer et admirer quand on en sait un peu plus sur leurs parents, l’école qu’ils ont fréquentée, et leurs premiers coachs qui ont fait d’eux ce qu’ils sont devenus. La curiosité des auditeurs est une constante « historique » !

Eugène Drewermann  a publié en 1992 un ouvrage important sur la nativité de Jésus qui est la meilleure introduction à sa méthode pour interpréter, avec la « psychologie des profondeurs », les grands textes et problèmes religieux. Pour accéder de façon neuve à la naissance et à l’enfance de Jésus racontées dans l’évangile de Luc, il les relie à l’héritage des mythes égyptiens et grecs qui racontent la naissance divine d’un homme (Pharaon) ou la naissance humaine d’un sauveur divin (Asclepios, le dieu grec de la médecine). Drewermann estime que là, plus que dans l’Ancien Testament, il faut chercher la source et le sens de ces récits, du merveilleux qui les entoure. En réintériorisant les symboles et les mythes de la naissance de l’homme-Dieu, les  » archétypes  » universels des naissances extraordinaires, l’homme ordinaire peut redevenir lui-même et réconcilier en lui-même la raison et le sentiment, le conscient et l’inconscient, l’enfant qu’il demeure dans l’adulte qu’il est devenu, le divin et l’humain qui sont présents en tout fils de Dieu.10

  1. L’importance de la « Pensée Magique »11

C’est une forme de pensée qui s’attribue la puissance de provoquer l’accomplissement de désirs, l’empêchement d’événements ou la résolution de problèmes sans intervention matérielle. C’est aussi une forme d’expression prisée par les hommes politiques12 et les chefs religieux toutes tendances confondues et de tous les temps.

La pensée magique illustre une réalité comme support d’un projet ou d’une politique, d’une société idéale en dehors des contingences terrestres.

C’est le mode d’expression favori de la presse people, GALA, PARIS-MATCH, Point de Vues-Images du Monde vous font rêver de princesses, d’actrices et d’acteurs à qui vous souhaitez ressembler et qui vous poussent à croire que c’est donc possible : La Télé-réalité est votre référence, la religiosité est l’offre historiquement la plus ancienne .

Si l’abus de « la pensée magique » est critiquable voir condamnable quand elle devient escroquerie, elle n’en reste pas moins indispensable en publicité. En rhétorique elle sert pour faire découvrir un processus intellectuel qui vous permettra d’évoluer dans votre approche du monde, de la société ou de votre avenir. Car c’est en passant au tamis de la critique votre mode de pensée que vous déterminerez ce qui ressort de la « Pensée Magique » ou de la réalité qui est à votre portée, même idéalement.

  1. Du bon usage de la « Pensée Magique »

L’idée même de « la résurrection des morts » est une mise en œuvre de « la pensée magique » nécessaire à la communication du message, comme le souligne l’apôtre Paul dans sa lettre aux Corinthiens (15)

Bref, que ce soit moi, que ce soit eux, voilà ce que nous proclamons et voilà ce que vous avez cru. 12 Si l’on proclame que Christ est ressuscité des morts, comment certains d’entre vous disent-ils qu’il n’y a pas de résurrection des morts ?

La critique de la pensée magique est évoquée ici par Paul lui même :

13 S’il n’y a pas de résurrection des morts, Christ non plus n’est pas ressuscité, 14 et si Christ n’est pas ressuscité, notre prédication est vide, et vide aussi votre foi. 15 Il se trouve même que nous sommes de faux témoins de Dieu, car nous avons porté un contre-témoignage en affirmant que Dieu a ressuscité le Christ alors qu’il ne l’a pas ressuscité, s’il est vrai que les morts ne ressuscitent pas. 16 Si les morts ne ressuscitent pas, Christ non plus n’est pas ressuscité. 17 Et si Christ n’est pas ressuscité, votre foi est illusoire, vous êtes encore dans vos péchés. 18 Dès lors, même ceux qui sont morts en Christ sont perdus. 19 Si nous avons mis notre espérance en Christ pour cette vie seulement, nous sommes les plus à plaindre de tous les hommes. 20 Mais non ; Christ est ressuscité des morts, prémices de ceux qui sont morts.

3 Ils partagent un repas avec son rituel qui leur « ouvre l’esprit ».

Les pèlerins d’Emmaüs sont un bon exemple pédagogique13 :

Il s’agit donc de prendre argument de la résurrection, et d’en donner des exemples vécus par les premiers adhérents au « Royaume de Dieu » pour que les paraboles, les récits de miracles deviennent acceptables, pour les auditeurs de toutes les époques, voir crédibles, donc utiles pour la communication du message.

  1. Ils expriment leur perplexité après les événements de la crucifixion.
  2. Ils rencontrent une personne qui éclaire la situation en expliquant « les Écritures » en fait en leur montrant que défendre un idéal est risqué.

4 Ils en concluent qu’ils ont partagé un moment / le repas eucharistique avec le « ressuscité ». Et ils vont partager la nouvelle plus loin.

Le message d’Emmaüs. C’est que, certainement, vous allez courir des risques en défendant les mêmes idées que Jésus de Nazareth, mais cela vaut la peine, puisque la vie vous permet d’essayer …

De même la 2e « pêche Miraculeuse » ou « Pique-nique au bord de l’eau »14 n’atteste pas le miracle de la résurrection, mais insiste sur la nécessité de collaborer avec tous les groupes de fidèles, malgré leurs approches différentes, puisqu’ils s’accordent au moins sur l’idée que le message (du ressuscité) reste pertinent.

  1. Ils ne l’ont pas reconnu !

L’intérêt de la lecture actuelle des récits de la résurrection, c’est qu’elle nous permet de comprendre que « la Pensée Magique » était utilisée avec ses limites à l’intérieur même du récit : Les apparitions de Jésus ressuscité le présente pratiquement toujours comme inconnu des témoins, alors qu’ils ont vécu avec lui des mois, voir des années.

Les contemporains des auteurs de notre second testament ne sont pas plus candides que nous : L’idée même de « vie après la mort » est hautement hypothétique. La résurrection des corps est un concept qui renvoie à une « autre réalité » : Le « ciel »,l’ « Au-delà », le « séjour des morts », l’ « Hadès » de la mythologie. Ce ne peut être une « réalité humainement vérifiable ». Mais c’est une référence qui est comprise dans la catégorie de « la Pensée Magique », autrement exprimée comme « Le mystère de la foi ». Et donc si vous y adhérez, vous écoutez le récit de « résurrection » (Medium) en y cherchant le sens du « message ».

Prenons par exemple le récit de l’apparition dans la « Chambre Haute, toutes portes fermées »15 précise le récit. Une situation hautement improbable d’apparition d’un hologramme pas encore inventé. Il s’agit bien cependant des interactions entre Thomas, le sceptique, et ses amis, reprenant le cours de leur « mission » dans de nouvelles conditions. Il s’agit bien de « toucher » cette nouvelle réalité : Les disciples sont maintenant « les Porteurs du Christ » en intégrant ce qui fait leur souffrance, la mort de Jésus, une blessure qu’ils portent tous, et l’espoir que tout n’est pas perdu, puisqu’ils (s)ont « le medium/message » du récit.

Dans ce cas, le merveilleux de l’apparition, ne doit pas être majoré comme l’événement extraordinaire et « pointe du texte ». C’est ce qui permet pourtant de le faire entendre par la plupart des auditeurs : Ce qu’ils proposent est ce que le « Fils de Dieu » a offert comme alternative aux règles culpabilisantes des religions en cours.

Ils sont ceux qui ont « perçu » la présence de Jésus de Nazareth dans la réalité de leur expérience,16 depuis la crucifixion… cette dernière ne relevant pas seulement de « la Pensée Magique » bien entendu. Donc ils sont légitimés dans leurs mission : La plupart d’entre -eux seront les premiers « évêques », Missionnaires « consacrés », promoteurs de ce qu’ils ont « vu ». Paul lui même s’en justifiera après sa rencontre désarçonnante avec Jésus sur le « Chemin de Damas »17.

5 Les limites de l’idée de « Résurrection » comme « Pensée Magique »

Nous avons vu plus haut que les lieux de résidence des ressuscité sont dans le meilleur des cas « de verts pâturages » , de moelleux nuages célestes, avec une sonorisation angélique. Si vous n’êtes pas conformes pour y accéder, on peut vous y aider : en vous accordant l’absolution de ce qui vous empêcherait d’y arriver. Il y a aussi des officines qui vous offriront un ticket d’entrée moyennant financement d’une institution antichambre, quand ce n’est pas en payant directement le délégué religieux autoproclamé ou élu de service, le prophète, ou le gourou chrétien ou New Age, « la Pensée Magique » a toujours un bon rendement pour ceux qui savent s’en servir …

Mais le salut est gratuit… il est bon de s’en souvenir.18

Quand un « home riche demande à Jésus ce qu’il doit faire pour avoir la « vie éternelle », alors qu’il a l’impression d’avoir fait tout ce que la religion exige, Jésus lui recommande de vendre tous ses biens et de les donner aux pauvres.19..

Encore une remarque à propos de l’encouragement a « avoir Jésus dans son cœur »,

C’est une expression largement utilisée dans les églises évangéliques et le mouvement charismatique20. Elle est le plus souvent comprise comme un gage de salut personnel. Si cela implique d’  « aimer Dieu et son prochain comme soi-même », cela n’empêche pas de considérer ceux qui n’ont pas «  Jésus dans leur cœur » comme des gens peu ou pas fréquentables, ce qui est assez loin de la « Bonne Nouvelle ». C’est un exemple de « Pensée Magique » peu encourageante pour la pédagogie, qui implique alors une forme de culpabilité pour celui qui est considéré comme ayant « le cœur comme une belle pomme à l’extérieur, mais cœur pourri à l’intérieur »21

Après, vous faites comme vous le sentez : l’important est que vous ne soyez plus inquiet, que vous soyez libre et que vous vous sentiez aimé de Dieu donc re-suscités C’est l’essentiel de la résurrection vécue « avec le ressuscité. »

Le 14 août 2019

Voir aussi : « Jésus, après la mise au tombeau »

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Publié le 21 08 19

1Herbert Marshall McLuhan 1911-1980, canadien. Professeur de Littérature Anglaise et théoricien de la communication, il est un des fondateurs des études contemporaines sur les .médias. Exemple : l’Iphone est le média qui vous fait acheter la technologie qui vise à enrichir ses producteurs.

2L’apologétique consiste à défendre de façon cohérente une position. Le terme vient du grec apologia (ἀπολογία), qui signifie « justification, défense (contre une attaque) » en particulier en théologie. Il découle d’un parti pris dogmatique ou culturel qui vise à justifier une question de foi.

3L’aréopage à Athènes, le Sénat à Rome.

4Actes 17:16-34

5Approuver, confirmer, légitimer, officialiser.

6Samuel désigne David pour succéder à Saül défaillant.(Livre de Samuel)

7Mt 3:17, Mc 9:7 à la Transfiguration, = Mt 17:5

8Mt 16:13-20 « Tu es le Christ, le fils du Dieu vivant » une affirmation ien plus tardive que l’événement évoqué.

9id. Mt 16:13-23. Ce qui attestera l’idée que Jésus est l’initiateur de l’Eglise …

10 De la naissance des dieux à la naissance du Christ Ed Seuil 1992
http://www.seuil.com/ouvrage/de-la-naissance-des-dieux-a-la-naissance-du-christ-eugen-drewermann/9782020331302

11 Ce type de pensée se manifeste principalement au cours de l’enfance et est, à l’âge adulte, appréhendé par la médecine comme un symptôme d’immaturité ou de déséquilibre psychologique. La pensée magique est souvent associée au mysticisme et au courant du New Age

12 Notablement Boris Johnson et le Brexit, Donald Trump et l’Amérique, Jaïre Bolsonaro et le Brésil idéal, Mélanchon et les lendemains qui chantent ou Blocher et une Suisse sans étrangers et sans Europe.

13Luc 24 :18-35.

14Jean 21:1-25

15Jean 20:26 les disciples étaient à nouveau réunis dans la maison, et Thomas était avec eux. Jésus vint, toutes portes verrouillées, il se tint au milieu d’eux et leur dit : « La paix soit avec vous. »

16 29 Jésus dit : « Parce que tu m’as vu, tu as cru ; bienheureux ceux qui, sans avoir vu, ont cru. »

17Actes 9:1-30

18 Romains 3.23-26 : Car il n’y a point de distinction, puisque tous ont péché, et sont privés de la gloire de Dieu, Et qu’ils sont justifiés gratuitement par sa grâce, par la rédemption qui est en Jésus-Christ, Que Dieu avait destiné à être une victime propitiatoire; par la foi, en son sang, afin de manifester sa justice par le pardon des péchés commis auparavant, pendant les jours de la patience de Dieu; Afin, dis-je, de faire paraître sa justice dans ce temps-ci, afin d’être reconnu juste, et comme justifiant celui qui a la foi en Jésus.

19 Mt 19 :16-26  Un homme s’approcha et dit à Jésus: «[Bon] Maître, que dois-je faire de bon pour avoir la vie éternelle?»

20 Quand Jésus dit de lui-même « Je suis le Chemin, la Vérité et la Vie » (Jn 14, 6), Il ne dit pas qu’Il indique le bon chemin, qu’Il proclame la vérité et qu’Il donne accès à la vie. Non, il faut prendre la citation au pied de la lettre : Il EST vraiment le chemin : c’est la conformité au Christ dans chacune de nos pensées et de nos actions qui doit guider notre vie. Il EST la vérité. Ce n’est pas un discours qui indique la vérité, c’est sa personne elle-même, ce qui inclut, là aussi, son attitude, ses actes et ses paroles. Et Il est Dieu Créateur, la vie elle-même. Avant la vie, un Dieu vivant était là et le sera même après la fin de l’univers. https://www.reponses-catholiques.fr/rencontrer-jesus/

21Message des responsables de l’enseignement religieux « évangéliques » invités amicalement dans la Paroisse de Lancy Sud en 1980.

Jésus, après la mise au tombeau.

Poursuivant mes interrogations sur les miracles incroyables de la Bible,

je me suis intéressé aux besoins de la communauté naissante des fidèles

de raconter leurs expériences de « résurrections »

du Rabbi de Nazareth, « qui ne pouvait pas finir comme ça. ».

.

  1. La nécessité de « la résurrection ».

Tous les biblistes s’accordent sur le fait que les récits concernant « Jésus Ressuscité » ne sont pas vraiment cohérents, ni coordonnés chronologiquement.

Il est parfois connu, ou reconnu, ou encore identifié comme tel. Jésus ressuscité sur la route de Damas se comporte comme un cogneur qui doit se présenter à Paul1, qui ne persécute pas Jésus en tant que tel, mais ceux qui lui sont fidèles

Les auteurs des « textes » qui figurent dans le 2e testament ont écrits au plus tôt 20-30 ans après les faits. Paul est le plus ancien à en parler. Les auteurs des Évangiles écrivent entre 80 et 120 ap. JC donc au mieux 50 ans après les événements dont ils relatent les circonstances. Les évangélistes ont chacun leurs objectifs et leurs publics cibles. Ils ont le souci de faire passer LE message, et non pas l’aspect miraculeux du messager, sauf que sous cet angle, et à l’époque cela aide.

Paul écrit Mais si le Christ n’est pas ressuscité, vide alors est notre message, vide aussi votre foi. 15 Il se trouve même que nous sommes des faux témoins de Dieu, puisque nous avons attesté contre Dieu qu’il a ressuscité le Christ, alors qu’il ne l’a pas ressuscité, s’il est vrai que les morts ne ressuscitent pas.

16 Car si les morts ne ressuscitent pas, le Christ non plus n’est pas ressuscité
17 Et si le Christ n’est pas ressuscité, vaine est votre foi ; vous êtes encore dans vos péchés. 18 Alors aussi ceux qui se sont endormis dans le Christ ont péri.19 Si c’est pour cette vie seulement que nous avons mis notre espoir dans le Christ, nous sommes les plus à plaindre de tous les hommes.

20 Mais non ; le Christ est ressuscité d’entre les morts, prémices de ceux qui se sont endormis. 21 Car, la mort étant venue par un homme, c’est par un homme aussi que vient la résurrection des morts.

(1 Cor. 15:14 ss.)

Il est évident que pour Paul, la question de « la vie après la mort » est un des premiers soucis de ses contemporains. La peur des châtiments éternels va être au cours des siècles un argument de pouvoir que Jésus de Nazareth avait pourtant essayé de contrer2. Déjà à cette époque il était évident que la mort était un moment de séparation définitif entre le connu et la croyance religieuse3.

La diversité des récits, des circonstances, des témoins exprime manifestement le besoin de rendre le message universel. Il est destinés à tous, quel que soit son statut ou son orientation sexuelle. (!)

A la fin du 1er siècle et le début du second, la séparation entre les « chrétiens » et les « juifs » n’est pas universelle. Il y a les « judéo-chrétiens » qui sont des fidèles de la Synagogue et dont nous découvrons l’existence dans les « écrits » non canoniques mis à jour par l’École Biblique de Jérusalem.

Il y a encore une constellation de croyants, qui ne sont pas des « sectes », mais des « courants spirituels ». Certains sont bien connus, comme les pharisiens et les sadducéens, critiqués par Jésus de son vivant. Il y a les moins connus : Les esséniens, retirés dans les déserts, dont Jean le Baptiste était sans doute proche.

Il y a aussi les « Craignants Dieu » ces « non juifs » qui admirent les convictions du judaïsme et son éthique, fondée sur les « dix Paroles », mais qui ne seront jamais autorisés à entrer dans la « communauté juive ». Et il y a aussi tous les juifs dispersés dans le bassin méditerranéen. Ils sont admirés par les populations locales, qui apprécient leur manière de célébrer leur Dieu et de suivre ses préceptes. Cela les change des processions et autres obligations vis à vis des divinités locales ou impériales : Le judaïsme est une école de liberté, de critique de la religion, et les idées de Jésus de Nazareth s’inscrivent dans la continuité de cette spiritualité.

2 Le rayonnement de Jésus, le Rabbi de Nazareth

Toutes les populations qui vivent entre la Méditerranée et le désert de Moab, du Mont Liban au désert du Sinaï, ont croisé la route du Rabbi de Nazareth à un moment ou un autre lors de ses déplacements dans la région. Ils en ont entendu parler par ses disciples, envoyés deux par deux, pour annoncer le « Royaume de Dieu » : Un état du monde où régneront la paix, la justice, la solidarité, la fraternité et, par dessus tout, la bienveillante « charité » qui permet d’interpréter la « loi divine ». L’interprétation de la loi était enfermées, voir confisquée, par le Sanhédrin4, entre les murs du temple d’Hérode le Grand, restaurateur, ou usurpateur, des privilèges liés au Temple qu’il avait « restructuré », pour le dire sans prendre de risque.

Donc tous sont bouleversés, et se demandent si c’était « vrai » que le Royaume s’était approché : Il y avait eu l’épisode de la femme pas lapidée5, les repas pris malgré les interdits alimentaires ou des relations humaines, Jésus mange avec les pécheurs et les gens de mauvaise vie6.

Tout de même, quand il avait résumé son enseignement « sur la Montagne »7 cela avait frappé les imaginations. C’était plein de « bon sens » et en même temps cela collait parfaitement avec une conception ouverte du message divin, ou ce que nous pensions qu’il pouvait être. Nous avions même partagé les provisions que nous avions avec nous ce jour là… comme une multiplication de la nourriture…d’habitude on ne le fait pas trop.

Donc, si nous voulons croire que c’est possible, il faut en chercher tous les signes qui nous restent, tous les souvenirs, et toutes les habitudes prises en sa compagnie. Comme par exemple l’écouter répondre aux questions, en marchant dans la campagne, en prenant quelques épis de blé, même le jour du Sabbat8, pour bien assimiler que le Sabbat est fait pour l’homme et non le contraire.

Jésus allait à la Synagogue, parfois il en était expulsé quand il soulignait la pertinence de ce qui était lu9. Mais il allait aussi le long des rives du Jourdain, où se rassemblaient les « non conformes » venus écouter Jean le mangeur de sauterelles. Et probablement encore aux sources du Jourdain dans la région de Césarée de Philippe, au Sanctuaire d’Asclépios, où se pratiquaient les rituels de guérison. Il avait même demandé comment ses amis le considéraient à ce moment là « Au dire des hommes, qui est le Fils de l’homme10 ? » 14 Ils dirent : « Pour les uns, Jean le Baptiste, pour d’autres, Elie ; pour d’autres encore, Jérémie ou l’un des prophètes. » 15 Il leur dit : « Et vous, qui dites-vous que je suis ? » 16 Prenant la parole, Simon-Pierre répondit : « Tu es le Christ, le Fils du Dieu vivant. »11

Tout ce dont ses amis avaient été témoins ne pouvait pas s’évanouir comme des « propos insignifiants ». Ils avaient couru des risques, certains avaient quitté leurs familles, leur travail, leurs espérances d’héritage, pour le suivre sans garantie autre que la confiance dans ses paroles 12 … Leurs expériences de la vie ordinaire en sa compagnie, que ce soit en Galilée ou autour de Jérusalem, et en particulier à Béthanie, chez Marthe et Marie les avait marqués.13

OK, tous n’ont pas été cool avec lui quand il avait été arrêté,14 mais nous pensions qu’avec ses « légions d’anges »15 il s’en tirerait. Tu parles, entre deux malfrats, il a fini assez peu glorieusement, en ne nous laissant aucune chance d’en faire un « Roi ».

Oui, mais… Car il y a ce « mais » qui les taraude : Si nous suivions malgré tout ses traces, en reprenant ses paroles, certainement inspirées par Dieu… En tout cas conformes à ce qu’on peut attendre de Dieu, en tout cas de ce Dieu d’Israël dont il prétendait être l’un des fils, comme vous et moi, fils et filles de Dieu.

Il n’y a pas de raison que cela ne finisse pas par « marcher » son idée de « Royaume de Dieu ». Sauf que … c’est comme les « mais », le sauf que : Ses amis sont un peu moins doués pour faire des discours. Ils peuvent raconter, et ils en ont à raconter, sur ce que Jésus a fait, sur ce que Jésus a dit, sur ce qu’il a obligé ses auditeurs à faire, et sur ce qu’il a fait tout naturellement pour montrer qu’il n’y avait pas de risque de se noyer en arrivant au port lors d’une tempête16…Quand on a de l’eau jusqu’à la ceinture, on ne peut pas se noyer17 … quoi que …

Donc en rentrant à la maison, et en se racontant, en se souvenant des événements récents, on en arrive à la conclusion que « c’est faisable ». On va même rituellement se donner des forces en prononçant le rituel du repas,18 comme si on était pas désespéré, mais au contraire, lancés dans une nouvelle aventure…

Et puis il y a eu cette histoire de femmes qui ne l’ont pas retrouvé pour l’embaumer19… cela aurait été super si on avait pu le conserver comme une momie. Elle aurait attiré les foules et on aurait pu le vénérer, comme un saint et raconter que « c’est bien lui » qui nous a mis en route20… Peut être qu’il est retourné en Galilée, ou que ses amis l’ont repris pour ne pas le laisser aux Romains.

Il n’y a pas de doute, Jésus était là, à l’auberge … peut être d’Emmaüs21, mais c’est aussi arrivé à d’autres qui se sont dit, « ensemble on va y arriver. »…

Dans la salle du dernier repas,22 après quelques jours, ses amis se sont retrouvés.

C’était chaleureux : Nous étions en sécurité , Judas avait suivi son destin… La conversation tournait autour de ce qu’il fallait faire « maintenant ». Les uns comme les autres étaient pressés de reprendre la route avec lui. Enfin « comme » avec lui, car tous se voulaient être ses porte-paroles. La discussion était tellement pleine d’espoir que manifestement, on « sentait sa présence » . Pas de doute « Il était là ».

Six mois, six ans ou plus tard, on a raconté ce moment historique en ajoutant que Thomas n’était pas vraiment convaincu… il avait mis le doigt sur la blessure que nous avions tous, tellement « Il » nous manquait.

Et vous savez, quand on raconte cette histoire, les gens y croient23, c’est incroyable !

Peu de temps plus tard, la routine a repris… Pierre est retourné à Capharnaüm, où il a retrouvé ses amis. Ils ont vite été assimilés aux « disciples de Jésus », comme c’était la coutume pour désigner les accompagnants des Rabbins enseignants.

Si Pierre avait été quelque peu « fragile » au moment du jugement de Jésus, pour ne pas en dire plus, le courage de ses amis, des amis de Jésus, tous autant qu’ils étaient avait eu sur lui une forte influence.

Ils revenaient donc d’une virée de pêche24, et Zébédée les attendait sur le rivage avec un petit feu, pour faire griller quelques poissons avant de rentrer au village.

La convivialité, le moment est plus détendu, et les conversations sont animées : Qu’est-ce qu’on va faire maintenant ?

Zébédée avait une bonne nouvelle : Le centurion dont Jésus avait guéri le serviteur25 voulait faire quelque chose pour sa communauté, et il a décidé de reconstruire la synagogue en plus grand26, pour accueillir les « nouveaux » adeptes des idées de Jésus de Nazareth. Car c’est une évidence : ils arrivent le jour du sabbat d’un peu partout, et ils sont de toutes les traditions.

Vous vous souvenez que Jésus leur avait promis qu’ils seraient « pêcheurs d’hommes »27 (et de femmes!) Si nous nous associons avec tous ceux qui propagent l’idée d’un Royaume de Dieu qui nous sorte de nos difficultés et nous rende heureux, cela ouvre des perspectives … Mais qui va croire à ça, puisque finalement « Çà s’est fini en « Queue de poisson », c’est le cas de le dire.

Bon, le prochain sabbat est celui du « don de la loi », et comme tous les sabbats, nous serons présents à la célébration, et le matin suivant, « les confiants » en Jésus de Nazareth partageront quelques unes de ses paroles et des situations qu’il nous a fait vivre.28 Donc il faut trouver ce qui serait le plus significatif dans nos souvenirs :

Nous devrions raconter que Jésus avait pris avec lui Pierre, Jean et Jacques, et il était monté sur la montagne pour prier. Il nous avait rappelé l’importance de suivre les commandements de Dieu et il nous avait éclairé sur les différents aspects de cette injonction : Pas de théorie, de la pratique Il nous avait laissés un moment et Pendant qu’il priait, l’aspect de son visage changea et son vêtement devint d’une blancheur éclatante.

30 Et voici que deux hommes s’entretenaient avec lui: c’étaient Moïse et Elie; 31 apparaissant dans la gloire, ils parlaient de son prochain départ qui allait s’accomplir à Jérusalem. 29

C’est ça qu’il faut raconter à « Chavouot » le prochain sabbat  30: Cela attestera que Jésus est bien détenteur de l’autorité que nous confère la Loi de Dieu, puisque les deux porteurs de la loi les plus importants sont avec lui pour en authentifier le témoignage…

Jacques, le frère de Jésus sera certainement d’accord avec cette proposition31.

Après les retrouvailles dans la maison du dernier repas, il avait été décidé que le groupe se disperserait pour ne pas donner prise aux espions romains et aux délateurs du Sanhédrin. Nous avions convenu que, selon la tradition, Jacques le frère de Jésus, serait le responsable du groupe. Marie Madeleine, son fils Judas, et Marie, la mère de Jésus avaient été exfiltrés entre Jérusalem et Bethléem, où ils sont incognito 32: En cas de problèmes avec les romains, ils seraient les premières cibles d’une purge destinée à éliminer les héritiers de cette nouvelle version du Judaïsme.

Mais revenons sur la berge, autour du feu :33 Il y avait maintenant d’autres barques qui rentraient : Des pêcheurs que Jésus avait rencontré le long du rivage et qui ne fréquentaient pas la Synagogue de Capharnaüm, et se considéraient pourtant comme Juifs. Simplement, ils refusaient les règles stupides des Pharisiens qui exerçaient un pouvoir exorbitant sur les communautés. Il y avait aussi des fondamentalistes Esséniens de passage vers le Mont Liban, et quelques romains qui allaient vers les sources du Jourdain pour rendre un culte à Asclépios en espérant une guérison pour un proche ou pour eux mêmes.

Pierre qui avait la parole facile, fit un discours de circonstance34, rappelant que le message de Jésus de Nazareth restait valable, et que la meilleure preuve était la présence de tous ces gens … Il a aussi proposé les Paroles d’ouverture et de clôture du repas comme bénédiction.

Il n’y a aucun doute, Jésus était présent dans la foule… sinon, rien ne se serait passé.

Etienne Nodet de l’Institut Biblique de Jérusalem explique la « Pêche Miraculeuse »

de Jean 21 et Luc 5:1-11 comme une illustration de ce qui s’était passé :

Le groupe des disciple étaient déprimés, partis à la pêche faute de mieux, il faut bien vivre… Sans beaucoup de succès.

Ils se reprennent en se remémorant les encouragement de Jésus à peut-être changer de méthode pour témoigner de leur espérance. Lancer les filets « de l’autre côté » est une aberration quand on connaît le métier. Les bateaux sont équilibrés pour que le poids des filets ne les fasse pas chavirer, et la répartition des charges est faite en conséquence.

Symboliquement dans le récit, ils changent donc de perspective et décident de s’y prendre autrement, et d’aller à la rencontre des autres croyants… qui viennent avec leurs barques pour leur donner un coup de main : Les disciples ne seront plus seuls à témoigner, et c’est bien un signe de résurrection, «Ça», non ?

Et puis il y a eu toutes les occasion ou les fidèles les plus proches ont vécu comme en sa présence réconfortante… Seulement avec le temps qui passe, ils se font plus rares. Marc a peut-être recueilli les souvenirs des véritables « témoins », Mathieu les a complétés, et Luc, plus prolixe, a trouvé des traces écrites de diverses origines, sans oublier Jean qui a voulu en faire une œuvre-témoin, plus « théologique »

Mais, au moment où il n’était pas encore question de rédiger des Évangiles, il fallait se rendre compte que la mort de Jésus était en quelque sorte définitive sur le plan terrestre. Il fallait, comme pour les récits de la liturgie dans la Synagogue, trouver un parallèle qui illustrerait désormais l’absence de Jésus, « corporellement ressuscité ».

Il y avait Elie et son char de feu qui monte au ciel35… et quelques autres prophètes ou personnages célèbres36 qui quittent la réalité des vivants sans pour autant perdre de leur influence… Quelques années plus tard, les croyants vont raconter qu’il est ressuscité – on ne cessait de le raconter – et qu’il est « monté au ciel37 », à sa mort, comme tout le monde, même si il est évident que c’est une image.

Cela reportait sur la communauté des croyants la responsabilité du témoignage, comme on l’expérimentait tous les jours. Et pour la fête des 50 jours après Pâques, les fidèles de Jésus de Nazareth étaient tellement nombreux à Jérusalem38 que Pierre dut faire un discours pour susciter de l’aide, motiver les fidèles, pour que la « Bonne Nouvelle », l’Évangile, soit proclamé partout et accessible à tous .

Chacun des auditeurs, enfin sans doute, presque tous, ont senti cette chaleur les toucher, et transformer leurs vies… C’était comme des langues de feu39, ont-ils raconté plus tard, quand il a été nécessaire de mettre de l’ordre dans les divers récits qui se propageaient sur l’aventure de Jésus et de son mouvement… Et si les synagogues se fermaient souvent à ces « illuminés » qui prétendaient « changer la Loi », les amis de Jésus eux s’organisaient pour devenir indépendants.

3 Le destin de ces souvenirs :

Ces moments exceptionnels sont concentrés – racontés – sur une période très courte, entre Pâques et Pentecôte, pour que les récits restent dans le cadre rituel des célébrations liturgiques. Les récits vont se figer dans une interprétation littérale : C’est écrit, c’était comme ça. Les auteurs de la Bible ont connu Jésus vivant – certainement pas – donc c’est « vrai ».

Les contemporains de Jésus étaient des gens ordinaires, avec une intelligence normale. Ils comprenaient ses images et ses paraboles en sachant bien que cela voulait « dire quelque chose d’important » mais que la réalité était différente :

Libérer un paralytique 40ne lui rendait pas la marche, mais le réintégrait dans la communauté : Il n’était plus vu comme un « cas » mais comme un frère. Guérir un

aveugle41 c’était ouvrir les yeux des témoins sur une nouvelle réalité. La main qui n’était plus « sèche »42 pouvait se tendre à nouveau pour aider son prochain.

Elie sur son char de feu n’a pas été enlevé par les extraterrestres43. L’ascension de Jésus nous confie une responsabilité ici et maintenant.

S’il est ressuscité, Jésus de Nazareth l’est essentiellement (C’est le cas de le dire) dans notre manière de le rendre vivant, en continuant à proposer le Royaume de Dieu comme une alternative à l’absurdité du monde actuel … quelles que soient les époques. Les deux testaments nous en racontent les circonvolutions, les espoirs et les problèmes qui s’y opposent… C’est « diablement » difficile.

On peut le dire aussi, et nous pouvons nous y encourager, en partageant symboliquement le pain et le vin, en toutes occasions

4 Les « credos » qui troublent la perception

de la résurrection.

Beaucoup de nos convictions sont marquées par notre adhésion formelle ou informelle aux credos habituels de nos églises : Nous avons été persuadés qu’il fallait « croire » à tous les termes qui les composent, faute de quoi nous étions sur le chemin de la perdition. Cela entraînait également les obligations nécessaires à notre salut en vue de la résurrection des morts, soit pour nous libérer de nos péchés, autrement dit de nos manquement aux articles du credo et nos absences des lieux qui les conservent. La performance des rites tient lieu de passeport pour le « ciel » et l’observation des règles est contraignante.

Une des conséquences notable a été que les croyants se sont trouvés soumis aux « Gardiens du Temple », qui contrôlaient nos vies « spirituelles ». Ils étaient moins regardants pour l’application des principes du « Royaume de Dieu » dans le quotidien de la survie ici bas. Mais comme leurs descriptions des flammes de l’enfer, illustrées par l’apocalypse, effrayaient le bon peuple, ils ont proposé des rabais sur les tickets d’entrée. Ils se sont fait – se font toujours, mais pas tous – de jolis magots sur la détresse des candidats à la vie éternelle.

Il faut dire que le grand bazar de l’éternité a toujours eu du succès et des conséquences monumentales, si nous nous référons par exemple aux Pyramides Pharaoniques, au Livre des Morts Tibétains, aux diverses réincarnations possible dans les « religions orientales », aux « totems animistes », origines des humains et réceptacles de leurs âmes en errance.

Les chrétiens ont eu le besoin de mettre un peu d’ordre dans ces croyances, peut-être pas sans une arrière pensée de pouvoir quand même.

Aujourd’hui, il s’agit aussi de clarifier la différence entre « résurrection » et « réincarnation », ce que les credos ont affronté dès l’origine.

4.1 Le Credo de Nicée Constantinople

Généralement compris comme « le »credo de l’Eglise Catholique Romaine

C’est est une profession de foi de consensus, à une période conflictuelle entre les différentes églises qui prétendaient détenir « la vérité », et donc avoir la « vraie foi ».

Il résume les points fondamentaux du christianisme en un temps particulier : Négocié lors du Concile de Nicée en 325 et il sera complété au concile de Constantinople en 381. Il est partagé par les confessions chrétiennes majoritaires44.

Il s’agissait de fixer les notions essentielles, qui étaient soit mises en doute, soit détournées ou interprétées de manières divergentes par les différents courants qui traversaient les églises : chacune prenant dans sa culture des éléments traditionnels de la religion locale, en les « christianisant » au mieux, et au pire, en prétendant que seuls les initiés pouvaient comprendre, moyennant le fameux « ticket d’entrée » qui permettait de bénéficier également des avantages dès ici bas.(Népotisme)

Je crois en un seul Dieu, le Père tout puissant,
créateur du ciel et de la terre, de l’univers visible et invisible,
Je crois en un seul Seigneur, Jésus Christ,
le Fils unique de Dieu, né du Père avant tous les siècles :
Il est Dieu, né de Dieu,
lumière, née de la lumière,
vrai Dieu, né du vrai Dieu
Engendré non pas créé,
de même nature que le Père ;
et par lui tout a été fait.
Pour nous les hommes, et pour notre salut,
il descendit du ciel;
Par l‘Esprit Saint, il a pris chair de la Vierge Marie, et s’est fait homme.
Crucifié pour nous sous Ponce Pilate,
Il souffrit sa passion et fut mis au tombeau.
Il ressuscita le troisième jour,
conformément aux Ecritures, et il monta au ciel;
il est assis à la droite du Père.
Il reviendra dans la gloire, pour juger les vivants et les morts
et son règne n’aura pas de fin.
Je crois en l‘Esprit Saint, qui est Seigneur et qui donne la vie;
il procède du Père et du Fils.
Avec le Père et le Fils, il reçoit même adoration et même gloire;
il a parlé par les prophètes.

Je crois en l’Eglise, une, sainte, catholique et apostolique.
Je reconnais un seul baptème pour le pardon des péchés.
J’attends la résurrection des morts, et la vie du monde à venir.

Je souligne ici quelques termes fondamentaux :

Je crois en un seul Dieu, reprend le « Shema Israël » credo du judaïsme affirmant l’unicité de la divinité, contre les tendances polythéistes.

Jésus était ni un Dieu différent, ni un demi Dieu .

Il est le Fils unique de Dieu … vrai Dieu, né du vrai Dieu pour lutter contre les hérétiques qui refusaient la filiation de Jésus, ou qui ne le considéraient que comme un prophète dans la succession des prophètes d’Israël.(Islam)

Il ressuscita le troisième jour, c’est ce qui nous intéresse dans la perspective des récits de la résurrection : Comme le rappelait l’apôtre Paul c’est une condition de la « vérité » chrétienne. C’est exactement ce qui fit rire les grecs de l’Aréopage quand Paul essaya de les convaincre lors de son passage à Athènes. En conséquence, J’attends la résurrection des morts, et la vie du monde à venir. Ce qui va conditionner mon comportement religieux, et donner un pouvoir exorbitant à ceux qui détiennent les clés de « l’au delà ».

Il faut se souvenir que les philosophes comme les observants des diverses religions de l’époque n’avaient pas les connaissances que nous avons aujourd’hui. Le « bon peuple » ne savait pas lire, et était bien incapable de tester les termes de cette confession de foi, qui paraît si évidente encore aujourd’hui à de nombreux croyants, j’ajouterai, « heureusement » pour eux.

4.2 La Confession de foi « réformée » ou « Symbole des Apôtres »

A l’époque de la renaissance, avec le développement de l’imprimerie, les théologiens ont essayé de quitter les perspectives « dogmatiques » conditionnelles et contraignantes, pour retrouver l’essentiel de la « Bonne Nouvelle » non pas dans les conciles, mais dans les textes de la Bible, que tout le monde45 pouvait lire.

La confession de foi devenait ainsi plus conforme à la lecture de la bible, et sans possibilité de biaiser sur son interprétation, quoi que

Je crois en Dieu, le Père tout-puissant, créateur du ciel et de la terre. (Genèse 1,1, Ésaïe 44,24, Apocalypse 15,3)

Je crois en Jésus-Christ son fils unique, notre Seigneur,

qui a été conçu du Saint-Esprit, et qui est né de la vierge Marie

Mat.1, :18-20 & 23)

il a souffert sous Ponce-Pilate, (Matthieu 27,13) il a été crucifié, il est mort, il a été enseveli, (Matthieu 27,35,50 & 60) il est descendu aux enfers ; (1 Pierre 3,19, Éphésiens 4,9)

le troisième jour, il est ressuscité des morts ; (Matthieu 28,6)

il est monté au ciel, (Actes 1,2)

il siège à la droite de Dieu le Père tout-puissant ; (Actes 7,56)

il viendra de là pour juger les vivants et les morts.

(2 Timothée 4,1, Apocalypse 20,12)

Je crois en l’Esprit-Saint ; (Romains 15,13, 1 Corinthiens 6,19)

je crois la Sainte Église universelle,

(Éphésiens 1,22, Matthieu 16,18, 1 Timothée 3,15)

la communion des saints, (Éphésiens 4,22, 1 Corinthiens 10,16, 1 Jean 1,7)

la rémission des péchés, (Luc 24,47, Actes 5,31, & 13,38)

la résurrection de la chair

(Matthieu 17,22, 20,19, 22,31-32,  28,6-7, Jean 5,21, 11,25,

1 Corinthiens 15,35-37, )
et la vie éternelle. Amen.

(Jean 3,36, 4,14, 1 Jean 5,13, Romains 6,22-23, 1 Timothée 1,16)

Nous retrouvons la profession d’unicité du Dieu Créateur : Je crois en Dieu, le Père tout-puissant et la filiation de Jésus : Je crois en Jésus-Christ son fils unique, notre Seigneur, Conformément aux écritures le troisième jour, il est ressuscité des morts, il est monté au ciel…46 Et, in « cauda venenum »47 mais c’est plus « culturel » que théologique : la résurrection de la chair et la vie éternelle. Heureusement, on n’en défini plus les lieux. Mais on ne peut pas laisser le bon peuple gérer son salut, car « croire à la vie éternelle » en chair et en os demande quelques explications, que d’aucuns seront naturellement prêts à négocier contre espèces sonnantes et trébuchantes.48L’ancien évêque de Newark et professeur à Harward, J-S Spong49 souligne que dans le monde contemporain, il est possible, avec une culture religieuse conséquente, de comprendre les divers symboles de la foi chrétienne. Mais pour les destinataires de la « Bonne Nouvelle » au 21e siècle ces déclarations de foi ne font plus sens : Il est urgent de les réinterpréter, en se référant toujours aux fondamentaux bibliques, qui sont les pistes du « Royaume de Dieu »50. C’est encore un terme qu’il faut aussi transcrire quand il ne reste plus que des despotes corrompus dans les royaumes survivants, et que les « Princes des Eglises » ne sont pas à l’abri des journalistes à l’affût des moindres dérapages.
5 Une proposition de compréhension de « la résurrection »J’oserai proposer – vous l’avez déjà pressenti – que « la résurrection » est cette sensation, voir cette émotion, ressentie quand nous vivons des moments exceptionnels, que ce soit en communion avec d’autres dans une célébration chrétienne, ou une émotion amoureuse. Mais pas seulement : Les fans de Johnny Hallyday ou de Claude François évoquent également ce sentiment de présence ressuscitée. Les familles touchées par un deuil sentent aussi cette communion avec l’être cher décédé, a l’occasion d’un partage de son souvenir.La présence du Christ ressuscité est ressentie par les « brancardiers de Lourdes » dans l’accomplissement de leurs missions d’accompagnement. Comme Jésus est présent indépendamment de l’Eucharistie, qui le confirme, dans les célébrations de Taizé, sur la Place St Pierre à Rome, ou au St Sépulcre à Jérusalem. Il est aussi ressuscité dans la chapelle des Petites-Soeur de Jésus, au repas des « Compagnons d’Emmaüs » réunis en présence « ressuscitée », elle aussi, de l’Abbé Pierre.La résurrection est une autre manière de regarder la communauté, celle de deux personnes ou d’une grande assemblée, ou au Camp Biblique Œcuménique de Vaumarcus. L’aspiration au « Royaume de Dieu » doit cependant nous rendre attentifs aux manipulations possibles, aux faux prophètes, aux « Messies Improbables » plus avide de pouvoirs que de bonheur universel 51L’accès au « ciel » n’est pas le « paradis» : Les atolls polynésiens sont aussi ravagés par les ouragans. Si le Bhoutan est le pays où se mesure «Le Bonheur national brut », ce n’est pas pour tout le monde. En été, les chalets d’alpages demandent une certaine adaptation pour être paradisiaques.La « vie éternelle » ne se négocie pas, elle se découvre tous les jours en vivant pleinement le moment présent. Les disciples de Jésus de Nazareth l’ont découverte en vivant avec lui l’expérience de la rencontre de l’autre, comme Jésus le leur avait expliqué 52: « Qui vous accueille m’accueille moi-même, et qui m’accueille, accueille celui qui m’a envoyé. Qui accueille un prophète en sa qualité de prophète recevra une récompense de prophète, et qui accueille un juste en sa qualité de juste recevra une récompense de juste. Quiconque donnera à boire, ne serait-ce qu’un verre d’eau fraîche, à l’un de ces petits en sa qualité de disciple, en vérité, je vous le déclare, il ne perdra pas sa récompense. »
Jésus n’a pas fait allusion à une éternité de la vie53, la « récompense » est cette autre notion du bonheur de vive à laquelle nous sommes invités.Et là … le credo n’y est pour rien, sauf que… quand on le dit ensemble, alors on est en communion avec tous ceux , parce qu’ils « savent », pour qui cela a été important…comme un sentiment de résurrection partagé.

« Le seigneur est ressuscité » …  « Il et vraiment ressuscité ». C’est la salutation pascale dans les pays orthodoxes… Genève, le 21 août 2019

Voir aussi : Pourquoi raconter les récits de la Résurrection ? Publié le 21 08 19

1Actes 9 : 1-27 la conversion de Paul, qui n’a jamais rencontré Jésus de Nazareth de son vivant.

2Marc 12:18-27 ,la feme aux sept maris

3Les Saducéens ne croyaient pas à la résurrection des morts.

4Tribunal et « Conseil d’administration » du Temple

5Jean 8:3-11

6Luc 15:2

7Matthieu 5, 6, 7. Un projet de vie.

8Mt 12:1-8

9Luc 4:16-30 Jésus expulsé de la synagogue de son village, Nazareth,

10C’est devenu un « titre » alors que l’usage était de signifier « Un humain »

11 (TOB/matthieu-16-13) Tu es le Christ, le Fils du Dieu vivant. Une affirmation théologique élaborée par la communauté.

l’importance de Pierre est également soulignée pour le développement de l’Eglise … pas envisagé à l’époque.

12TOB Luc 4:1-11 Ramenant alors les barques à terre, laissant tout, ils le suivirent.

13Luc 10:38-42

14Mc 14:66-70

15Mt 26:53

16Matth. 8, 23-27 et Luc 8, 22-25

17Mc 4:31-41 & Lc 8:23-25

18 1 Corinthiens 11:17-34 L’eucharistie-Cène à Corinthe comme signe de solidarité et d’unité

19Mt 28:1-10

20Voir le cœur du St Sépulchre à Jérusalem : Le tombeau vide est « plein » de l’attente mystique des visiteurs.

21Luc 24:18-35

22Jean 20 : 19-29

23Cf infra p. 7, les credos.

24Jean 21:1-ss est une reprise de Luc 5:1-11 …ou réciproquement.

25Mt 8:5-13

26Synagogue byzantine judéo-chrétienne construite entre le II e siècle et le V e siècle.

27Mt 4:19 & Lc 1:17

28JS.Spong, La Bible dévoilée, raconte que l’Evangile de Marc séquencé en paragraphes était lu à la Synagogue parallèlement aux parachas (passages) qui racontaient l’histoire de Moïse depuis Pâques…Au début, les croyants en Jésus de Nazareth faisaient célébration commune avec les juifs … puisqu’ils étaient juifs !

29 Luc 9.28-36

30ou « Pentecôte »

31Actes 12:17 & 21:18

32 Le 27 mars 2008 – James Cameron, Simcha Jacobivici et plusieurs spécialistes ont présenté la découverte du tombeau de la famille de Jésus à Talpiot. La contestation de cette identification de la tombe familiale ressort plus d’un attachement à la tradition qu’au respect des hypothèses archéologues. Les fouilles ont été suspendues par les autorités israéliennes pour éviter les polémiques. Cette découverte ne changerait rien au message de Jésus !

33A Tabgha. Tout près de Capharnaüm.

34Actes 2:14-41 (il aurait pu prononcer un discours semblable ailleurs … selon le choix des auteurs des textes)

352 rois 2 : 1-25

36 Apollonios de Tyane, philosophe et aussi appelé « fils de Dieu »

37Définitions physique : Espace que l’on voit au dessus de nos têtes voir aussi : Atmosphère, firmament, air.

Définition religieuse: Expression symbolique d’un espace absorbant les corps et les âmes des défunts, sorte de « trou noir » spirituel dont on ne revient pas…

38Encore une fois : Actes 2:14-41

39« Notre coeur ne brûlait-il pas… » racontent les pèlerins d’Emmaüs Luc 24:32

40Mt:9:6, Mc 2:5, Lc 5:24

41Mt 12:22, Mc 8:22 & 10:46 (Bartimée) Lc 18:35 , Jn 9:6

42 Mt 12,9-21 ; Mc 3,1-6 ; Lc 6,6-11

432 Rois 2 11-12 Tandis qu’ils poursuivaient leur route tout en parlant, voici qu’un char de feu et des chevaux de feu les séparèrent l’un (Elisée) de l’autre ; Elie monta au ciel dans la tempête.

12 Quant à Elisée, il voyait et criait : « Mon père ! Mon père ! Chars et cavalerie d’Israël ! » Puis il cessa de le voir.

44Et assez globalement par les membres du COE.

45Les versions de la bible en langues courantes ont été longtemps interdites par Rome ( sans polémique!)

46Grand Père est décédé, où est-il maintenant ? « Il est au ciel » … curieux quand on a suivi l’enterrement au cimetière., il doit y avoir un truc qui ne passe plus !

47Trad : « le venin est dans la queue ».

48Surtout si vous soutenez financièrement la paroisse… et aussi son pasteur …

49« Jesus for the non religious » J.-S.Spong Harpers & Collins . San Francisco 207

50« Eternal life » a new vision, J.-S.Spong Harper One, 2009

51Retournez lire 1 Samuel 8 et la description du roi .

52Mt 10:40-42

53 Luc 18:18-25

JE SUIS … qui ? יהוה comme on ne l’attend pas.

Claude Vigée, dans son livre « Dans le Silence de l’Aleph » 1nous rappelle que la genèse commence avec la lettre Beth Berechit. Avant, dans l’alphabet, Aleph, le caractère hébraïque est silencieux. Il ne « dit » rien mais il contient « tout » puisqu’il est à l’origine.

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Il contient toute la Torah, toutes les « paroles » divines, toute la « sagesse de Dieu » et les fins dernières dans un soupir…

Il est « JE SUIS » qui s’adresse à Moïse dans le buisson, il est PAROLE VIVANTE et non écrite, exprimée par Jésus de Nazareth2, et au cœur de la spiritualité hébraïque et donc aussi de la nôtre.

Introduction :

Il est passionnant de cheminer dans la pensée humaine et de découvrir que les nécessités du moment ont façonné la spiritualité, marqué la compréhension du monde, influencé les manières de vivre et de s’organiser pour créer des civilisations, des cultures et des religions.

Depuis l’apparition du « mâle Alpha »3 dans la meute, dans la tribus humanoïde des chasseurs cueilleurs, comme chez la plupart des mammifères rescapés de l’époque des dinosaures, nous avons ramassé des souvenirs, des mythologies, des rituels qui ont eu un impact sur les individus, les familles, les groupes-tribaux. Ces identifications ethniques, et les nations qui sont actuellement héritières de ces cheminements hasardeux ou conscients, sont les fruits des aspirations du pouvoir pour les uns ou d’une réflexion philosophique pour d’autres.

Aussi haut que nous remontons dans les strates archéologiques, nous trouvons – et nous n’avons pas encore tout exploré – des témoignages de ces progrès que nous appelons « civilisations » sans trop savoir si c’est positivement ou négativement comme le XXe siècle nous l’a hélas prouvé.

Les deux « Testaments » de la Bible témoignent de cette évolution et expriment avec perspicacité les étapes de nos prises de conscience et de notre situation dans la création. Les humains sont en ce sens, une espèce très particulière, et pour l’instant la seule qui articule et verbalise son évolution de manière consistante.

La Bible n’est pas LA révélation ultime des VERITES, mais elle a bien servi ceux qui en ont fait usage à leurs profits. Elle n’a pas été expurgée des bonnes idées pour se libérer des entraves à la liberté de penser. Elle va nous permettre d’accéder à une compréhension ouverte et tolérante de nos contemporains. Contemporains de toutes les époques, ce qui n’est pas rien.

Nous aborderons quelques textes bibliques en utilisant des techniques de partage modernes, pour décrypter les enjeux des « auteurs » qui les ont proposés à un moment donné, pour répondre à une attente ou une nécessité sociale, politique ou religieuse.

1. « JE SUIS m’a envoyé vers vous » Pour dé-masquer « Dieu » !

Il faut lire le livre de l’Exode au 21e siècle en utilisant, la technique de la Lectio Divina4,

qui laisse le texte résonner/raisonner en nous, sans a priori historique ou spirituel.

Nous découvrons que l’affectif y prend une place importante. Les références de la religion populaires sont prépondérantes, surtout pour des « laïcs » qui ont une formation biblique élémentaire. C’est d’autant plus vrai pour les textes du premier testament, souvent évoqués dans le « catéchisme », comme une partie de « l’Histoire Sainte » de Jésus de Nazareth.

Dans le cadre de la préparation théologique du Camp Biblique Œcuménique de Vaumarcus, sur les « Je Suis » dans l’évangile de Jean, nous avons fait le détour par Exode 3, qui nous raconte la rencontre de Moïse et de « Dieux 5». Lors de la mise en commun des réflexions induites par notre Lectio Divina, nous avons constaté que les participants d’âges très divers plaçaient leur représentation de DIEU au centre d’un schéma, où ils se situaient eux mêmes en périphérie.

Les « intentions de prières » qui en ont découlées s’adressaient à sens unique vers une divinité omnipotente … Il y avait les demandes générales du genre « paix dans le monde » ou « protection contre les catastrophes », par contre très peu de demandes qui auraient pu déboucher sur des relations interpersonnelles, de solidarité ou d’assistance.

Des « post-it » sont utilisés pour mettre en évidence la relation entre les participants et celui qui dit « JE SUIS ». Les descriptions de cet interlocuteur conduit en effet à ce que la tradition va interpréter par une sorte de mot-valise « Le Seigneur », pour traduire le tétragramme YHWH imprononçable selon la « Loi »6. Dans les anciennes Bibles : « L’Éternel » va devenir le « Nom de Dieu », que le conseil donné à Moïse de « ne pas l’appeler en vain » soit ou non respecté.

Exode 3:6  écrit: « JE SUIS le dieu de ton père, dieu d’Abraham, Isaac et Jacob. » Il faut rappeler qu’ici le verbe être est au présent, pour l’attribuer à des patriarches qui ont vécu à des époques différentes.

Exode 3:12 : « « JE SUIS avec toi, et voici le signe que c’est moi qui t’ai envoyé – délivrer ton/mon peuple d’Égypte – Vous servirez dieu sur cette montagne »

Exode 3:14 : « Tu parleras au fils d’Israël « JE SUIS m’a envoyé vers vous… »

Exode 4:12 et 4:15 : JE SUIS avec ta bouche et je t’enseignerai ce que tu dois dire »

Sans oublier Exode 6:3 : « JE SUIS apparu à Abraham, Isaac et Jacob comme Dieu puissant, mais sous mon nom « Le Seigneur » (YHWH) je ne me suis pas fait connaître d’eux ».

Nous sommes héritiers de toute la pédagogie / Théologie hébraïque des tribus d’Israël.

Après de multiples divagations culturelles et géographiques cela nous a conduit à une interprétation contre laquelle s’élevait justement cette manière originale de percevoir Dieu, ou plutôt la « trace de Dieu » que constituent les « dix Paroles » qui sont le seul signe verbalisable de cette « divinité  incroyable ».

2 le schéma « normal » à l’époque de Moïse comme à la nôtre.

Il faut revenir à l’expérience de la « Lectio divina » et situer « JE SUIS » dans ce cadre expérimental :

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Il semble assez évident que nous étions d’accord pour dire que « JE SUIS » était au milieu de NOUS dans la mesure où nous formions un cercle, et ce « TOUT AUTRE » était au centre du cercle. Nous nous adressions à lui, en croyant/espérant que, de ce centre, il interviendrait d’une manière ou d’une autre, selon notre intime conviction. C’est bien ainsi que nous le percevons parfois.

Nous avons notre divinité avec un nom « Dieu », dont on dit qu’il s’est « incarné » dans une figure humaine exemplaire « Jésus de Nazareth » a un moment de l’Histoire7.

Il a eu une mère : « Marie » la bienheureuse, comme tous les Pharaons et autres dieux dont la mythologie a signalé le passage sur la terre des mortels.

Quelques privilégiés ont saisi l’enjeu de ce schéma, son immuabilité,

comme son impossible pertinence en dehors de la « foi ».

Ils se sont proclamés interprètes du divin, et garants de la foi, si entente.

C’est l’origine de la caste des Inter-prêtres…. DEUS EX MACHINA est la norme.

Il faut plaire à la divinité par des rituels sélectifs pour chaque objectifs : Fécondité, pluie, etc.

Les « demandes » adressées à Dieu relèvent de l’action « supérieure » externe au groupe.

Dieu intervient dans le Mystère de la foi – si cela marche – et me place dans la catégorie des « pêcheurs » naturellement coupables et responsables, si cela ne marche pas.

Le salut m’est accordé à titre personnel et rarement bénévole, par l’intermédiaire « mandaté ». L’accomplissement de ma prière reste le « fait du prince » si c’est une élection sacerdotale, ou la conjonction des petits hasards de la vie que le croyant appelle « miracle » , mais il ne faut pas trop attendre du ciel comme nous le rappelait l’Ecclésiaste 8.

3 L’improbable gestion du Mâle Alpha

dans l’organisation humaine.9

Le sociologue Dany-Robert Dufour risque une comparaison entre les mammifères à forte cohésion de meute, comme les loups, conduits à la chasse par le mâle dominant, et les chiens, héritiers/descendants des canidés dont le dressage à supprimé l’instinct d’obéissance à leur semblable le plus « fort » génétiquement.

Le dressage des meutes de chiens – mais c’est aussi valable pour le chien familial – va remplacer le semblable par le « maître chien », tout autre, qui organisera les activités des animaux et en assurera la subsistance et la survie.

Pour revenir à l’espèce humaine des « mammifères grégaires » – on ne peut se tromper sur la qualification – la Femelle Alpha productrice de la descendance, le fait avec le(s) mâle(s) à disposition, le meilleur sera le plus choisi. Nous pouvons en trouver la trace dans le récit de la Genèse, lorsque « Dieu fait l’humain à son image, mâle et femelle il les créa »10

Mais nous trouvons aussi dans ce même livre de la Genèse11, un autre récit d’origine qui va structurer la société « biblique » : l’homme est créé de la terre « Adam » pour cultiver le sol, puis sa femme, issue de son propre corps pour l’assister. La division des individus « Alpha » se singularise, c’est le moins qu’on puisse dire.

Chacun étant « Maître chez lui » la situation se complique quand les groupes se rencontrent, voir se confrontent pour le territoire de chasse et de cueillette.

Nous sommes loin dans le passé et ce sont naturellement des conjectures :

Il y a deux solutions : le « combat des chefs » dont nous avons un écho dans l’histoire de Caïn et Abel12 ou Jacob et Esaü, qui proposent la « négociation entre les chefs »13. La raison voudra

pour la survie de tous que la négociation se développe avec un langage commun.

Reste la question de la légitimité du chef «  Alpha », si la coexistence entre les groupes humains doit être organisée avec plus de références incontestables.

Si nous remontons encore sur une autre piste archéologique, entre Lascaux et Altamira pour faire court, les humains ont longtemps cohabité14 dans les mêmes grottes que les ours.

La plus ancienne trace connue d’association possible entre l’ours et la culture humaine se trouve dans la grotte du Regourdou, en Périgord .15 L’animal était plus puissant et il a sans doute été considéré comme supérieur par la force ou la résistance. De ce fait il est considéré comme une émanation de ce qui devait « gouverner les astres et la pluie ». Mais plus important, il était « tout autre » que l’espèce humaine… Dans les religions scandinaves et nordiques, l’ours est resté longtemps associé ou identifié à la divinité. Les légendes dans les cultures où vivent des ours en sont la trace évidente.

L’étape suivante sera d’interpréter les signes donnés par cet animal tutélaire.

Ce sera le développement du « chamanisme », de l’organisation religieuse, des « prêtres interprètes » de la « volonté des dieux », Nous retrouvons la comparaison faite par Dany Robert Dufour à propos des meutes de chiens : Le « maître Chien » devient le « Mâle Alpha » de la meute, comme le grand interprète du divin devient le leader de la tribu,16

Dans une compétitivité du pouvoir, il partagera ce rôle avec le « chef » géniteur et/ou guerrier auquel il conférera sa légitimité.

Comme Samuel qui désignera Saül puis David comme rois d’Israël.17

La religion serait donc un mode d’expression ethnoculturel dont on fait usage à bien plaire.

Dans la culture hellénistique, le lieu du divin est, identifié en gros par la montagne de l’Olympe, où règne « ZEUS » – dont le terme « DIEU » est en fait la traduction. Nous avons appris depuis longtemps que la mythologie grecque à l’époque de la rédaction du Second Testament n’était pas vraiment prise au sérieux comme « croyance » mais permettait, par ses typologies, de décrire les heurts et malheurs, les bienfaits et les hauts faits de la vie courante.

Le « bon sens » renvoyait « Aux Dieux » les pouvoirs surnaturels et aux prêtres le soin d’en organiser les rituels, qui, s’ils ne font pas de bien, ne font pas de mal.18

A titre d’illustration de la conviction relative des grecs à l’époque de l’Apôtre Paul : Lorsqu’il traverse Athènes, il voit une autel au « dieu inconnu ». Selon sa culture religieuse, il pense que les philosophes grecs ont la « foi » en ces divinités dont il constate les temples érigés sur l’Acropole.

Invité à s’exprimer à l’aréopage devant les citoyens intellctuels de la ville, il se lance dans un discours identifiant le « dieu inconnu » de l’Autel entrevu avec le « dieu de Jésus Christ, mort et ressuscité ». Ce qui déclenche les rires de l’assemblée et contraint Paul à se réfugier à Corinthe

pour se familiariser avec la culture grecque et ses croyances.19

4 Aménophis IV> Akhenaton et la divinité solaire, un faux ancêtre, et une filiation incertaine20.

Reprenons alors les textes d’Exode et situons la problématique dans son contexte socio-culturel à l’origine de l’intuition Mosaïque.

L’histoire des religions nous fait remonter de quelques siècles avant l’ère chrétienne, au temps des pharaons, et des intrigues religieuses entre les différents temples de la vallée du Nil.

Leurs divinités impliquent des propriété foncières et donc des revenus agricoles pas toujours équitablement négociés . Le pouvoir du Pharaon, lui même divin, pour autant que sa mère soit restée vierge en le mettant au monde, est contesté et contestable. Le rôle du Pharaon comme « chef de guerre » doit, par la force des choses, être soutenu par la population productrice des ressources agricoles, et de la soldatesque.

En Égypte, le rôle du Pharaon était de servir « les dieux » et d’obéir aux prêtres qui sont garants de l’orthodoxie. Aménophis IV se trouve paralysé par le clergé qui dispose de la garde des symboles divins tangibles et surtout des territoires dont il exploite la production pour ses propres revenus. Tout le monde s’épuise, y compris les travailleurs migrants qu’il faut inviter pour compléter la main d’œuvre nécessaire aux exigences somptuaires des temples : Plus c’est beau, plus c’est Divin.

En reprenant ici le concept du « Mâle Dominant » et de son substitut divin, les prêtres accordent à leurs dieux des pouvoirs fort utiles pour exploiter leurs contemporains.

Avec la territorialisation et la sédentarisation des tribus ou des peuples, la construction des temples est une bonne résidence pour des statues vénérables et vénérées.

Mais quand le nomadisme est le mode de vie du groupe, il y a deux possibilités : Soit profiter des Autels locaux, ce qu’ont fait les hébreux nomades à Béthel, Horeb (Sion), Garizim, Hébron, etc soit mettre le « divin » en boîte et le transporter avec tout son fourbi de place en place. C’est l’Arche de l’Alliance avec son problématique contenu et ses « accessoires de camping »21.

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Aménophis IV22 propose une intéressante alternative, sans doute suggérée de l’intuition d’un clan nomade particulièrement démuni : Troquer les dieux en matières périssables contre une évidence brûlante mais indispensable à la vie : Le soleil : Il brille sur les bons et sur les méchants, Il n’est pas enfermable dans un temple, ni une pyramide. Il se moque bien des ordres et désordres des prêtres, tous temples confondus. Pourvoyant à tous coups de soleils, sécheresse et inondations selon son humeur. Il est surtout inaccessible aux mains accapareuses des mafias religieuses traditionnelles.

Aménophis IV va donc tenter de changer le monde, en tout cas dans la vallée du Nil, et remplacer les cohortes de divinités par un Dieu unique et éminemment céleste inaccessible, dont la régularité du retour ne s’était jamais démentie 23 Il va proclamer de son poste privilégié et pharaonique que le divin supérieur de tous les dieux est « ATON » le soleil.

C’est là qu’Aménophis IV devient Akhenaton, un pharaon exceptionnel.

Je m’en veux d’être rabat joie, mais il faut bien dire qu’avec son fils les choses ont assez mal tourné pour l’intuition d’Akhenaton. Très vite rattrapé par les « Frères Egyptiens Traditionalistes », le jeune roi ne résistera pas à la révolte des prêtres. Tout Ank Aton fut sans doute accompagné dans la mort, estourbi et majestueusement enseveli sous le nom de « Tout Ank Amon » avec sa garniture funéraire, pour la plus grande joie de Lord Carnavon et du Musée des Antiquités du Caire.

Ainsi tout reviendra dans l’ordre : Quand on sait où est Dieu, et comment on s’en sert,

la vie est plus facile, mais pas pour tout le monde.

5 Les mythes des patriarches migrateurs

Les nomades du « Croissant Fertile »24 se sont fait des divinités bien ancrées sur le sol qu’elles fertilisaient annuellement, avec une bonne grosse déesse dans le style des statues de Botero..

Déjà les changements climatiques rendent les territoires du moyen orient plutôt inconfortables pour les nomades. Quelques uns se rendent en Egypte pour se faire engager comme saisonniers. Ils y avaient été invités par un Joseph25, l’un des leurs, qui s’était fait une place au soleil chez la femme de Potiphar, puis comme 1er ministre du Pharaon – c’est ce qu’on raconte, mais n’y accordez pas trop crédit : il n’y a pas trace de cette histoire sur les hiéroglyphes égyptiens pourtant bien renseignés.

Bref après quelques générations, les Nilotiques se sentent un peu à l’étroit sur leurs terres entre les déserts, puisqu’ils doivent partager leurs récoltes avec ces immigrants sans documents d’établissement, et pourtant bien utiles pour bâtir des pyramides et les temples, et garder les enfants des femmes de la noblesse.26

Plus tard, à l’époque de Ramsès 2 27 Le Souverain « Mâle Alpha » caractéristique, va faire construire des monuments pharaoniques par des esclaves issus de populations nomades, attirées par la sécurité de l’approvisionnement généré par les crues du Nil, ce fleuve qui n’est pas soumis aux aléas du climat de la méditerranée orientale.

Ces travailleurs, soumis à une forme d’esclavage, avaient une extrême difficulté à comprendre l’enchaînement des causes et des effets d’une action collective ou individuelle. La perspective la plus large était sans doute la famille, et à terme la mort de l’individu. L’humain n’est qu’un grain de sable. Une des caractéristique de cette forme d’asservissement est la conviction que le statut des esclaves est « voulu par les dieux ».28

Les droits limités, à part travailler, fournissent de bonnes raisons de se révolter.

Les migrants vont se retourner vers leurs ancêtres pour échapper au joug pharaonique.

Ils vont refaire le lien avec cette forme de spiritualité qui ne s’encombre pas de « Veau d’Or »

et de chats en onyx.

L’un des leurs, pourtant éduqué à la cour du pharaon, avait été obligé de s’enfuir un peu rapidement à la suite d’une dispute qui avait mal tourné. Il s’était mis à la disposition de Jéthro,

un éleveur qui transhumait dans le Sinaï. 29 .

Nous retrouvons donc Moïse sur la montagne « Horeb »30 quelque part entre le golfe persique et la Mer Rouge, avec son idée de charte pour survivre ailleurs qu’en Egypte et en bonne intelligence avec ses voisins … Sauf que les Égyptiens ne voulaient pas vraiment voir leur personnel se syndiquer, se mettre en grève et larguer les amarres pour des cieux supposés plus cléments. C’était aussi sans compter sur les prudents à la mentalité presque helvétique qui pensaient que ce n’était pas le moment, la bonne saison, le bon leader, la bonne direction.31

L’intuition qui va animer la démarche de « Moïse », c’est le souvenir de cette divinité insaisissable et improbable des Madianites, pourtant disponible tous les jours et indépendamment de nos humeurs. Une référence qui pourrait aider ces esclaves à « sortir d’Egypte ».

Moïse va donner au peuple quelques bonnes raisons de bien se comporter, en mettant en évidence des règles élémentaires de savoir vivre en familles. Des règles valables aussi à la dimension de la tribu, voir du peuple.

Moïse est un leader spirituel, intermédiaire entre le Divin et les humains, mais pas un « Chef Alpha » c’est ce qu’il fait remarquer au « buisson » Exode 3 :11 ¶ Moïse dit à Dieu : « Qui suis-je pour aller vers le Pharaon et faire sortir d’Égypte les fils d’Israël ? » 

Exode 4 :10 ¶ Moïse dit au SEIGNEUR : « Je t’en prie, Seigneur, je ne suis pas doué pour la parole, ni d’hier, ni d’avant-hier, ni depuis que tu parles à ton serviteur. J’ai la bouche lourde et la langue lourde. »

11 Le SEIGNEUR lui dit : « Qui a donné une bouche à l’homme ? Qui rend muet ou sourd, voyant ou aveugle ? N’est-ce pas moi, le SEIGNEUR ? 12 Et maintenant, va, JE SUIS avec ta bouche et je t’enseignerai ce que tu devras dire. ».

13 Moïse dit : « Je t’en prie, Seigneur, envoie-le dire par qui tu voudras ! »

14 La colère du SEIGNEUR s’enflamma contre Moïse et il dit : « N’y a-t-il pas ton frère Aaron, le lévite ? Je sais qu’il a la parole facile, lui. … quand il te verra, il se réjouira en son cœur.

Bref, sans responsable de l’information, et avec un promoteur autrement plus éloquent, notre messager n’avait plus beaucoup d’arguments pour ne pas refiler la mission à son frangin Aaron, qui prendra la parole à sa place quand cela deviendra trop intimidant. Donc tout seul en présence d’un buisson prétendu ardent, il va recevoir les « DIX PAROLES » qui vont permettre de vivre libre, après avoir suivi la procédure d’exil indispensable auprès du Pharaon.

6 Une relation à Dieu qui évite l’objectivation

et la dépendance à « un autre » :

Exode 4 :12 « JE SUIS avec toi, dit–il. Et voici le signe que c’est moi qui t’ai envoyé : quand tu auras fait sortir le peuple d’Egypte, vous servirez Dieu sur cette montagne. »

13 Moïse dit à Dieu : « Voici ! Je vais aller vers les fils d’Israël et je leur dirai : Le Dieu de vos pères m’a envoyé vers vous. S’ils me disent : Quel est son nom ? – que leur dirai–je ? »

14 Dieu dit à Moïse : « JE SUIS QUI JE SERAI. » Il dit : « Tu parleras ainsi aux fils d’Israël : JE SUIS m’a envoyé vers vous. »

15 Dieu dit encore à Moïse : « Tu parleras ainsi aux fils d’Israël : Le SEIGNEUR, Dieu de vos pères, Dieu d’Abraham, Dieu d’Isaac, Dieu de Jacob, m’a envoyé vers vous. C’est là mon nom à jamais, c’est ainsi qu’on m’invoquera d’âge en âge.32

Comme la grammaire de l’époque n’était pas encore configurée par l’académie, la fameuse phrase :« JE SUIS QUI JE SERAI. » donnera lieu à toutes sortes d’interprétations toutes plus passionnantes les une que les autres, pour signifier essentiellement ce que Dieu a si bien résumé : Il dit : « Tu parleras ainsi aux fils d’Israël : JE SUIS m’a envoyé vers vous. »

Plus tard, on a expliqué : C’est le Dieu D’Abraham, Isaac et Jacob.

Surtout ce « divin » n’était pas réductible à un temps, à un objet, ni à un lieu particulier, ce qui pourtant lui arriva à l’insu de son plein gré, sur l’esplanade de Jérusalem particulièrement consacrée aux horions inter-religieux.

La pédagogie du « buisson »33, a été de persuader Moïse qu’il avait une mission : Avant, tu disais « je suis les ordre d’un autre » en courbant l’échine. Maintenant tu dois te montrer à la hauteur en t’affirmant « JE SUIS porteur de la règle » qui nous permettra de vivre là où coulera le lait et le miel, pour autant que j’y élève mon bétail et que nous entretenions nos ruches… sans les piquer aux voisins et en bonne entente avec eux…

Donc en ce temps là, comme on raconte dans les histoires, ces nomades, avaient suivi leurs troupeaux avec armes et bagages. Ils avaient émigrés dans le delta du Nil. Installés, ils sont devenus des cultivateurs . Ils étaient aussi les ouvriers bâtisseurs de villes et de temples.

Si Moïse prend de l’autorité, il tente de la faire partager par son peuple… Il ne veut pas être le Grand Prêtre d’une nouvelle divinité, il ne veut même pas en récupérer une dans la liste des viennent ensuite en dehors de l’Égypte. Le sens du divin qu’il tente de faire passer est dans l’être de la personne. L’être humain qui s’affirme est le seul garant de la règle de vie qui s’impose comme condition minimum.

Ce sont dix règles de vies sans effet contraignants autres que le consentement commun.

Et si on y parvient, alors on se réjouira ensemble et ce sera la célébration de ce « JE SUIS » enfin universel…

Ces itinérants qui n’avaient pas encore inventé le char, devaient se contenter d’une divinité mobile. Elle devait être assez légère pour être déplacée de campement en campement, éventuellement dans un coffre décoré de chérubins, qu’on appellera, en temps utile, « Arche de l’Alliance » chez les hébreux.

Le « dominant divin tout autre » est géré par les descendants d’Aaron, les lévites, qui organisent la « tente d’assignation », la version Camping du Temple. Comme l’explique Thomas Römer : A la longue cela devient un peu encombrant !

Pas de chance très vite le schéma de base refait son apparition : Le Veau d’Or en est un épisode, mais aussi cette phrase critique d’Exode 6:3 : « JE SUIS apparu à Abraham, Isaac et Jacob comme Dieu puissant, mais sous mon nom « Le Seigneur » (YHWH) je ne me suis pas fait connaître d’eux » : sous entendu « Ils l’ont inventé ! ».

La célébration sur l’Horeb rassemblera le peuple, et l’holocauste (sacrifice) offert est l’incinération complète de l’offrande, de ce fait il n’y a pas de reste pour alimenter un clergé !

Le besoin de se conformer aux exigences de la culture religieuse va imposer la présence des dix paroles sous forme tangible, comme référence divine : Si on n’a plus d’idole, au moins on a quelque chose à montrer34. Le pentateuque 35 va mettre en évidence ce besoin de conformité et cette lutte incessante pour asseoir la légitimité du peuple hébreu- D’abord avec la « Tente d’Assignation » et « L’Arche de l’Alliance » puis avec la construction longtemps repoussée du « Temple », refusée à David et concédée à Salomon. Il sera finalement construit par Josias.

On y incinère rituellement l’holocauste, mais on y brûle aussi toutes sortes d’animaux, dont le clergé fait sa nourriture, en encaissant les taxes religieuses. Il faut bien entretenir ces gens et leur rôle de contrôleur du rituel.

La règle devient impérative : Ce sont « Dix Commandements ». Elle se vénère comme norme à côté de la divinité dont on tait le nom. Le « SEIGNEUR » est identifié comme « Puissant » avec tous les attributs des divinités « normales », et naturellement « la meilleure » pour ses adeptes. Pour accompagner les Dix Paroles, on mettra dans la « caisse » quelques objets dont on ignore aujourd’hui l’inventaire, mais qui pourraient bien être une « Tête de Veau » et quelques autres objets symboliques en or offerts par des amis qui voulaient se faire bien voir, ou spoliés chez des ennemis pour se venger des pertes subies.

Les fidèles de Moïse vont se baser sur ces débuts prometteurs pour élaborer un ensemble de textes devenus « bibliques » inspirés par toutes sortes de sagesses, de disputes et de trouvailles. Ils ont augmenté les dix paroles d’une infinité d’autres préceptes pour éviter les sandwiches Jambon Beurre, le travail du samedi, les mariages inter religieux et les voisins arabes.

La destruction du Temple 5e siècle av.JC va permettre le développement de la célébration synagogale et le questionnement du texte justement mis à jour par Esdras et Nehémie36.

La reconstruction du Temple par Hérode l’Iduméen37, contesté à l’époque de Jésus par les disciples de Jean Baptiste et les juifs de Qumran, va remettre au centre des polémiques religieuses le statut du temple, de ses servants prêtres, Lévites, pharisiens et autres docteurs de la Loi. Les débats se retrouvent aujourd’hui dans les textes de la tradition juive du Talmud, de Jérusalem ou de Babylone.

7 Le retour aux sources, ou la pérennité de l’intuition initiale

Dans le Livre de l’Exode, lorsque « JE SUIS » se manifeste, ce sont des hommes de chair et de sang, des « messagers » pour Abraham et Sarah par exemple(EX:6:3), un « combattant » pour les retrouvailles de Jacob et Esaü.

Dans le Premier Testament, nous découvrons que « Je Suis » mandate Moïse (Ex 3:14) pour exprimer devant le peuple les dix paroles.

« Je suis qui je suis » l’énigmatique identité de ce Dieu qui va se transcrire par «  יהוה YHWH »

et se faire nommer « Le SEIGNEUR » ou « Adonaï » (Hébreu : אֲדֹנָי)Mes Seigneur38, qui est la forme « plurielle » de « Seigneur », bien que syntacticalement singulier , pour éviter de prononcer son nom en vain, nom qui a finalement été comme effacé de la mémoire et de la tradition.

« Le nom divin  suggère, pour utiliser une expression moderne, la totalité de l’être et de l’existant » écrit Mircea Eliade son « Histoire des croyances et des idées religieuses ».39

Dans la traduction grecque du Premier Testament, le tétragramme «  יהוה YHWH » est traduit par « Kurios Kurios » qui est traduit par « SEIGNEUR » celui qui est très vite associé au terme de

«דבר DAVAR  » la parole créatrice de la Genèse… seule manière d’appréhender l’identité divine. C’est cette même identité à qui est attribuée la création et les dix paroles qui sont au cœur même de l’enseignement de Jésus de Nazareth

Abraham Heschel écrit que « L’hébreu biblique n’a pas d’équivalent au mot « chose », « objet ». Le mot «דבר DAVAR  », qui plus tard servira à traduire « chose », signifie en hébreu biblique: parole, mot, message, nouvelle, demande, promesse, décision, récit, dicton, affaire, occupation, actions, bonnes actions, événement, façon, manière, raison, cause; mais jamais « chose » ni « objet ». Est-ce le signe d’une pauvreté de vocabulaire, ou plutôt l’indication d’une juste vue du monde, qui ne confond pas la réalité (mot dérivé du latin res, chose ) avec le monde des objets ? »

8 Le terme employé par Jean : le « Logos logos  »

dans le contexte hellénistique.

La tradition du premier testament en grec, alimenté par la LXX 40 utilise le terme de Logos pour traduire דבר DAVAR ce qui ne pouvait échapper à Jean l’Evangéliste, ni à Jésus lui même qui baignait dans la culture hellénistique de la région. Une région où aujourd’hui encore la pratique de diverses langues s’impose naturellement… Et nous retrouvons le « Kurios Kurios » dont nous lisons qu’il s’identifie avec Jésus dans les évangiles.

Le « Logos=logos » est un concept qui apparaît au 6e siècle av JC et qui a été explicité – si on peut dire – par Héraclite d’Ephèse qui déplorait que « ce logos qui est toujours, les hommes sont incapables de le comprendre ».

Il est à l’origine de la pensée humaine, c’est le code qui nous permet de mettre des idées et des images en relation et de les formuler pour les partager, et les transmettre. Le logos est à l’origine de la pensée humaine, il est la raison créatrice de sens : « par la parole l’homme parvient à se représenter la réalité, à lui donner un sens » Après Héraclite la notion de Logos, assimilée à la fois à la raison et à la parole, va désigner la rationalité qui dirige le monde. »41

Philon d’Alexandrie, philosophe juif contemporain de Jésus va intégrer ce concept dans la culture juive : « C’est l’image de Dieu la plus ancienne de toutes les choses intelligibles »42

Dans Le Livre de la Sagesse 43 9:1-2, nous découvrons que Dieu a créé le monde à partir de sa parole (logos logos /דבר DAVAR) tandis qu’avec sa sagesse il a formé l’homme :

1 Dieu des pères et Seigneur miséricordieux qui as fait l’univers par ta parole,(logos ) 2 formé l’homme par ta Sagesse afin qu’il domine sur les créatures appelées par toi à l’existence.

Sagesse 9 44

Jean l’évangéliste va encore insister en citant des « paroles de Jésus » : « En vérité, en vérité, je vous le dis, avant qu’Abraham fût, Je Suis. » (Jn 8:58) ce qui va naturellement horripiler les juifs qui l’entourent dans le temple de Jérusalem, et qui vont, évidemment, l’entendre comme « Je suis Dieu », ce que ne vont pas manquer d’expliquer les théologiens ultérieurement avec le dogme de la Trinité..

Dans l’évangile de Jean, en français, Le Verbe, c’est en grec le « Logos » logos

et quand Jésus dit « je suis » il utilise bien le verbe qui dit « l’être » personnel.

Et Jésus insiste – enfin ses amis ont insisté pour le lui faire dire – « Celui qui m’a vu a vu le Père »

Jean,14, 7-14 En ce temps-là, Jésus disait à ses disciples : « Puisque vous me connaissez, vous connaîtrez aussi mon Père. Dès maintenant vous le connaissez, et vous l’avez vu. » Philippe lui dit : « Seigneur, montre-nous le Père ; cela nous suffit. » Jésus lui répond : « Il y a si longtemps que je suis avec vous, et tu ne me connais pas, Philippe ! Celui qui m’a vu a vu le Père. Comment peux- tu dire : ? Montre-nous le Père ?  Tu ne crois donc pas que je suis dans le Père et que le Père est en moi ! Les paroles que je vous dis, je ne les dis pas de moi-même ; le Père qui demeure en moi fait ses propres œuvres. Croyez-moi : je suis dans le Père, et le Père est en moi ; si vous ne me croyez pas, croyez du moins à cause des œuvres elles-mêmes. Amen, amen, je vous le dis : celui qui croit en moi fera les œuvres que je fais.

Logiquement le début de l’Evangile de Jean résume cette affirmation, qui permettra au Rabbi de Nazareth de dire « Je Suis » avec autorité

Jean 1 :1 ¶ Au commencement était le Verbe, et le Verbe était tourné vers Dieu, et le Verbe était Dieu.

2 Il était au commencement tourné vers Dieu.

3 Tout fut par lui, et rien de ce qui fut, ne fut sans lui.

4 En lui était la vie et la vie était la lumière des hommes,

5 ¶ et la lumière brille dans les ténèbres, et les ténèbres ne l’ont point comprise.

« Je Suis » les deux mots qui font « tilt dans l’Evangile de Jean : 59 mentions dans les 4 évangiles pour 91 citations dans la Bible.

« Le chemin la vérité, la vie » « la porte » « la lumière du monde » « le pain de vie » « celui que vous cherchez » et même Jean 13:19-20 : 19 Je vous le dis à présent, avant que l’événement n’arrive, afin que, lorsqu’il arrivera, vous croyiez que Je Suis.

20 En vérité, en vérité, je vous le dis, recevoir celui que j’enverrai, c’est me recevoir moi–même, et me recevoir c’est aussi recevoir celui qui m’a envoyé. »

Nous savons par le nombre de citations bibliques que le fait de dire « je suis » en affirmant sa personnalité : « Je suis celui que Dieu envoie » « Je suis le roi » «je suis prophète » etc, est une affirmation identitaire forte.

Employé dans d’autres circonstances, il est un auxiliaire verbal qui accompagne celui qui prononce les paroles : « je suis venu… » «   Je suis arrivé … » «  Je me suis trouvé … » « Je suis affligé… » etc. Qui ne souligne pas l’identité du locuteur, mais son activité ou sa situation a un moment donné.

Dans le prologue de l’Evangile de Jean cité ci dessus, l’évangéliste, et sa communauté associent directement la personne de Jésus comme expression du VERBE (être) de DIEU.

Dans la Bible on trouve « Je suis » comme affirmation divine 135 fois dans le premier Testament

71 fois seulement chez Ezechiel

et seulement 2 fois dans le second Testament

« Je suis » comme affirmation de son identité ou de son autorité : 124 fois dans le premier Testament 2 fois chez Ezechiel !

84 fois dans le second Testament 65 fois dans les actes et ss.

« Je suis …»  affirmé par Jésus de Nazareth apparaît 61 fois dans les évangiles,

cité 5 fois dans le le reste du second Testament.

Le terme « Je suis le Seigneur » (Adonaï) est mentionné 90 fois dans la Bible

« Je suis Dieu » seulement 3 fois : Ps. 46:10, Esaïe 43:12, Osée 11:9

Esaïe 52:6 : Mon peuple va savoir que JE SUIS Celui-là même qui affirme « Me Voici »

Jean 14:9 « Je suis avec vous… Celui qui m’a vu a vu le Père » (Référence à « Notre Père » dont JC est le « fils »)

Jésus de Nazareth va exprimer « je suis » dans de nombreuses situations

« Je suis au milieu de vous » « Prenez et mangez, ceci est mon corps, ceci est mon sang »…

Là ou deux ou trois sot réunis en mon nom, « JE SUIS » au milieu d’eux ...

Tiens tiens… est-ce que cela ne signifierait pas une autre représentation schématique ?

Car nous le savons bien, c’est quand nous sommes ensemble que nous percevons la présence de « JE SUIS » comme quelque chose d’immédiat, de « personnel » et d’intérieur…

« JE SUIS » est alors le sujet et non plus une forme verbale attribuée à Jésus par les habitudes du Schéma classique : Si Dieu est « tout autre » il n’est donc pas de moi.

Jésus a vécu autrefois, il est certainement (?) ressuscité mais il ne faut pas trop en parler, car il est d’une essence divine, donc inaccessible à nous autres pauvres humains sans « I-phone » céleste…

Essayons alors un autre schéma pour dire « JE SUIS » au milieu de vous.

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ll n’y a plus d’objectivation divine.

Le respect des dix paroles est du ressort de tous et de chacun.

L’autorité est le consensus.

Quand je prie, chacun entend ma prière, ou y est sensible.

JE SUIS me répond à travers l’attention qu’il me porte.

La présence de « JE SUIS » est faite de tous ceux qui sont porteurs de cette conviction intime :  « nous sommes le sel de la terre »  « Nous sommes la lumière du Monde »45.

« Toutes les fois que vous l’avez fait c’est à moi que vous l’avez fait »46, … etc.

9 Le changement de schéma a un impact

sur le mode de célébration

A partir de la « résurrection » nous devons, une fois de plus, nous remettre à examiner la situation des disciples du Supplicié de Nazareth : L’idéal s’est effondré, c’est un cauchemar et le désarroi a gagné les plus fidèles. Pierre a même renié ses relations avec le crucifié47, comme Jésus s’y attendait.

Et puis, le « calme » revenu dans les cœurs et les consciences. Le souvenir de l’autorité de leur ami 48 et surtout la pertinence de ses propos devient évidente : Ils le reconnaissent même dans une conversation de bistrot, à Emmaüs49. Au moment où ils partageaient les souvenirs de son enseignement, il devient clair que « JE SUIS (est) au milieu d’eux ». Ce sont leurs propres sentiments, leurs propres émotions, leurs propres convictions qui le rendent présents, non pas à côté d’eux, puisqu’il n’est plus là, mais dans leurs propres affirmations de pouvoir dire « je suis » porteur de ce « message » pour un monde différent.

Encore une autre manière de recevoir la « tradition » de l’Église qui s’est instituée assez rapidement : Si l’anecdote d’Emmaüs en est une illustration, elle traduit bien l’expérience commune de tous les amis après un traumatisme partagé : On va se retrouver, pour partager nos émotions, pour un repas, « pour  boire un verre » en souvenir de lui.

Alors bien sûr ils se souviennent des repas en commun et en particulier du repas de la veille de Pâque, avec son rituel et sa traditions de partage, de plats spéciaux, de pain partagé et de « coupe du Salut » « On va faire cela en mémoire de Lui » deviendra « En mémoire de Moi » dans la liturgie.

Ce qu’ils ont en commun, c’est la conviction que les « Dix Paroles » sont maintenant de leur responsabilité et qu’ils ont la possibilité de les affirmer en tant que « je suis » leur porte voix.

Le rituel ne s’adresse plus à un Zeus Ex Machina, mais rassemble les fidèles autour d’un événement commun : Le repas de la cène en est le signe organisé par les disciples de Jésus de Nazareth comme modèle de célébration de la présence de « JE SUIS » au milieu de nous.

L’étude de la Torah50 rend évidente « la présence divine » dans le groupe qui la partage…

Pour les convives d’Emmaüs, c’est « culturellement évident ».

A distance, cela demande un éclaircissement. Car pour beaucoup de « croyants », dès que l’histoire passe la naissance de Jésus, nous sommes dans un « monde Chrétien » et tout ce qui se dit et se raconte fait partie du « Christianisme » … Le fait que Jésus soit « juif », et pour certains le plus juif des juifs, est toujours un sujet d’étonnement.51

La communauté réunie est signe de cette présence. Cette « présence » n’est plus le « symbole »52 d’une divinité qui aurait dit « je suis qui je suis » et que l’on va convoquer une fois par semaine dans une « célébration », et aussi souvent qu’on peut quand les choses ne se passent pas trop bien.

Peut-on mettre en question l’idée du « Divin Alpha » cité en exergue de cet article selon Claude Vigée … sauf que maintenant, il a de nombreux « Porte-Paroles » ordonnés ou désordonnés pour interpréter le « silence » ou la totalité de la Bible.

Nous pouvons mettre en évidence que la tradition hellénistique a avalé la tradition judéo-chrétienne dans une philosophie globalisante et rationnelle conforme à une « RELIGIO » qui a besoin d’un ensemble de règles qui permettent de se reconnaître « reliés ».

Et puis, ne nous voilons pas la face : Quand un groupe humain souhaite pérenniser son existence, il se constitue en « association », avec un président, un secrétaire, un trésorier et des membres…

Le Rabbin Marc Alain Ouaknine cite un des maîtres du Hassidisme53 qui demanda un jour à ses disciples quel était le plus grand malheur qui avait frappé le peuple Juif …

  • L’esclavage en Égypte ? Non

  • L’exil à Babylone Non,

  • La destruction du Temple Non

  • La diaspora forcée par les romains ? Non

  • Mais alors quoi ?

Le maître répond « La religion »…

Je ne peux pas manquer de rappeler que ces dix paroles ne sont pas des « commandements » à proprement parler, mais des principes de survie en société, fondamentaux pour la pérennité de l’espèce humaine . Ce sont des conseils – si on peut dire – qui se retrouvent dans toutes les société humaines, sous une forme ou sous une autre, de la Terre de Feu au Kamtchaka, et des Iles Kouriles à San Diego en Californie (en passant par Téhéran ou par l’île de Pâques!)54

10 Le Mystère de l’identification consciente de Jésus.

Pour les besoins de la cause religieuse, nous assistons à une élaboration théologique de la personnalité de Jésus de Nazareth. Nous ignorons absolument s’il « savait » que ces attributions messianiques allaient lui donner le statut divin, dont la Trinité allait couronner son identité quelques années / siècles après sa mort.

En conséquence, l’affirmation « je suis » dans la bouche de Jésus55 doit être intégrée dans le contenu signifiant de ses paroles qui sont traditionnellement attribuées au « Kurios Kurios »«  יהוה YHWH »

Pourtant, 6 lui qui est de condition divine n’a pas considéré comme une proie à saisir d’être l’égal de Dieu. 7 Mais il s’est dépouillé, prenant la condition de serviteur, devenant semblable aux hommes, et, reconnu à son aspect comme un homme, 8 il s’est abaissé, devenant obéissant jusqu’à la mort, à la mort sur une croix56.

Une autre « collision » conceptuelle se produit quand Marie est envisagée comme « Mère de Dieu ». Cela se comprend naturellement, car elle est mère de Jésus, et quand il est devenu « Kurios Kurios », «דבר DAVAR  » de «  יהוה YHWH » … donc reconnu comme identique au Père originel. Ce qu’il n’a jamais lui-même prétendu.

Mais vous comprendrez aussi que cette « qualification » de Marie est une manière de

dire un dogme qui a l’inconvénient d’être totalement incompréhensible au 21e siècle

et qui doit être expliquée dans son contexte historique pour ne pas être ridicule : Comment faire cohabiter la notion de « Notre Père – Dieu – qui est aux cieux, Marie sa mère fécondée par le Saint-Esprit, qui donne naissance à Jésus –encore Dieu – sans faire des études de théologie dogmatique et historique. Se perdre dans ces méandres de l’imagination justifie certainement des bourses universitaires et des doctorats,

mais ne fait certainement pas avancer le « Royaume de Dieu ».

11 La Samaritaine et l’autorité57

La rencontre de Jésus avec la Samaritaine tend à confirmer qu’il et possible de considérer

« JE SUIS » comme une affirmation personnelle des convictions exprimées par les dix paroles.

Jean 4: 19 –« Seigneur, lui dit la femme, je vois que tu es un prophète.

20 Nos pères ont adoré sur cette montagne et vous, vous affirmez qu’à Jérusalem se trouve le lieu où il faut adorer. »

Jean introduit la question dans la bouche de la samaritaine, interlocutrice improbable d’un juif traditionnel. Elle pose la question du lieu, donc de l’objectivation de la référence divine, justement celle dont « JE SUIS » avait voulu libérer le peuple hébreu par les dix paroles transmises par Moïse

21 Jésus lui dit : « Crois–moi, femme, l’heure vient où ce n’est ni sur cette montagne ni à Jérusalem que vous adorerez le Père.

Jésus répond donc dans le sens voulu initialement par « JE SUIS » en libérant l’attachement au lieu de « vénération » ou du respect du divin.

22 Vous adorez ce que vous ne connaissez pas ; nous adorons ce que nous connaissons, car le salut vient des Juifs.

Vous adorez en un lieu qui n’est pas adéquat dit Jésus : ce qui est connu de la tradition juive qui l’a plus ou moins maladroitement transmis.

Ce sont les dix paroles, qu’il faut honorer, elles qui ne sauraient être contenues dans l’enceinte du temple de Jérusalem sous quelque forme que ce soit.

23 Mais l’heure vient, elle est là, où les vrais adorateurs adoreront le Père en esprit et en vérité ; tels sont, en effet, les adorateurs que cherche le Père.

24 Dieu est esprit et c’est pourquoi ceux qui l’adorent doivent adorer en esprit et en vérité. »

Quand vous dites que vous « agissez dans cet esprit » ou que vous dites « C’est dans cet esprit que je voulais l’exprimer » vous soulignez vos références morales ou éthiques, pas un « DIEU-ZEUS » qui vous tiendrait comme une marionnette par ses fils. C’est dans l’intériorisation de « JE SUIS », promoteur des dix paroles, que vous vous exprimez.58

25 La femme lui dit : « Je sais qu’un Messie doit venir–celui qu’on appelle Christ. Lorsqu’il viendra, il nous annoncera toutes choses. »

26 Jésus lui dit : « JE le SUIS, moi qui te parle. »

La samaritaine l’a bien compris puisque le texte se poursuit au v. 39

Beaucoup de Samaritains de cette ville avaient cru en lui à cause de la parole de la femme qui attestait : « Il m’a dit tout ce que j’ai fait. »

40 Aussi, lorsqu’ils furent arrivés près de lui, les Samaritains le prièrent de demeurer parmi eux. Et il y demeura deux jours. 41 Bien plus nombreux encore furent ceux qui crurent à cause de sa parole à lui ; 42 et ils disaient à la femme : « Ce n’est plus seulement à cause de tes dires que nous croyons ; nous l’avons entendu nous–mêmes et nous savons qu’il est vraiment le Sauveur du monde. »

Les paroles de Jésus les délivrent d’une obligation localisée d’obéir à un pouvoir qui leur est extérieur. Il leur permet l’autonomie quand ils peuvent dire à leur tour « JE SUIS responsable de mes actes et de mes paroles… donc LIBRE

12 Le témoignage de 1 Samuel 8 et la demande d’un roi.

Retour aux sources : les livres de la Torah et les livres historiques du Premier Testament sont écrits à la période Perse59. Le territoire de la Palestine entre le Mont Liban et la péninsule du Sinaï est administrée par les souverains depuis l’époque de Cyrus. Les populations de culture hébraïque restaurent leurs lieux de cultes et cherchent à raviver leurs célébrations autour du sanctuaire de Jérusalem.

Les rédacteurs de la Torah vont essayer de mettre les aspirations populaires en face des réalités sociales et politiques de l’époque. Nous sommes loin des « Royaumes » de David et Salomon disparus depuis 5 siècles. Mais la tentation d’une « restauration » restera vivante jusqu’à l’époque de Jésus et au delà60. L’histoire de Samuel va mettre en évidence l’inutilité de l’institution royale d’un « souverain dominant » : Samuel prend sur lui – et « Je Suis » – pour décrire les inconvénients et risques qu’il y a à désigner un roi : Abus de pouvoir, corruption, charges fiscales et militaires, détournement des femmes, etc. Naturellement, le récit nous dit que le peuple veut quand même un « roi ».

Les auteurs expliquent que le peuple refuse d’obéir à « Dieu – Dix Paroles » et préfère avoir un leader qui leur donne une identité pareille à leurs voisins. Cela devrait leur permettre de rendre à leurs familles et villages une certaine cohésion. « Vox populi, vox Dei »61

Et c’est l’institution de la succession royale de Saül, David, Salomon, avec tous les détails qui vont expliquer les échecs de cette « histoire » du « Peuple de Dieu ». Le récit va raconter les errements politiques des rois, les compromissions des alliances, les échecs des batailles, et naturellement, les problèmes posés par « L’Arche de l’Alliance » et la représentation divine qu’il représente. Et nous découvrons que ce « Tabernacle » est plus embarrassant que motivant pour structurer le peuple, qui est pourtant sensé s’inspirer de son contenu.

Lire cette histoire et en débattre est plus utile et motivant que brûler des animaux et brailler des prières dans un temple qui ne peut plus rassembler tout le « peuple ».

Par contre, à Babylone, à Damas, en Égypte, et bientôt tout autour de la Méditerranée la tradition synagogale va se développer. Avec les juifs, nous en avons la trace dans le Talmud.

Tous les croyants sont à même de « célébrer » leur foi, de la mettre en question et d’en faire le meilleur usage en s’affirmant comme des être libres.

13 JE SUIS libre.

La réforme de l’église au 16e siècle a tenté de retrouver l’essentiel du message Mosaïque proclamé par Jésus de Nazareth en mettant en premier les textes de la Bible et la concertation synodale dans l’organisation des églises. Mais les Eglises n’ont pas su éviter le schéma fondamental de la « religio » et de l’objectivation intellectuelle de ce « Dieu tout autre ».

Il reste compris comme un « Divin dominant », qui ne l’était pas autrefois quand « Jésus de Nazareth » apprenait à ses amis à se tenir debout devant la loi et les traditions.

Karl Barth a développé sa dogmatique en relevant le caractère personnel de la relation à Dieu.

Il le décrivait comme « Le tout autre » et donc parfait. Une forme de modèle qu’il était possible, peut-être pas d’imiter totalement, mais nous pouvions au moins essayer d’accompagner « Je suis » dans le « Royaume qui s’est approché ».

L’exemple de Taizé est un compromis intéressant : La célébration y est fonctionnelle et émotionnelle. Dieu y est invoqué comme Présent dans l’Eucharistie et la communauté.

Il n’est pas évoqué comme une identification personnelle. « JE SUIS » reste celui qui a dit « Je suis celui qui dit Je suis »..Il reste sur la colline de Bourgogne, même si il est momentanément convoqué par des groupes pour des Célébrations « Taizé ». L’essentiel est de se sentir en communion et c’est déjà une manière d’assumer…« JE SUIS bien » avec les autres qui se sentent ussi bien.

En ce qui concerne l’Église Catholique Romaine, nous ne pouvons que constater qu’elle vient de loin. Elle est héritière de toutes lers sortes de traditions de la « religio » originelle.

En gardant les formes, elle tente de retrouver les fondements de l’intuition Mosaïque.

Dans l’organisation de certains ordres monastiques, dans des tentatives de réformes démocratiques, encore misogynes, elle n’échappe pas au schéma « religieux » que lui impose sa tradition et son organisation de pouvoir et d’obéissance. « Chassez le mâle dominant, il revient au galop ».

Avec les amis qui vivent un œcuménisme acrobatique en décalage avec les organes de l’institution nous pouvons reconnaître la pertinence du schéma N°2

« JE SUIS » au milieu de / parmi vous ».62

Cela peut orienter notre réflexion et relativiser les élaborations dogmatiques qui ont tenté de faire plier « JE SUIS » entre les pages de nos théologies. Nous n’avons pas besoin d’un « souverain dominant, et encore moins d’une divinité extérieure… même si elle serait pratique et menaçante pour que les enfants restent « sages ».

En résumé : « JE SUIS » est « tout autre » en effet, il n’a rien de « DIEU-ZEUS », ni d’une idole

même intellectuelle. « JE SUIS » est mon propre sujet, et rien ni personne ne peut se l’approprier

en quelque temps ou circonstances que ce soit. Mais nous en éprouvons sa pertinence, lorsque deux ou trois sont réunis en référence à ce qu’il nous a donné : L’audace de la foi.

14 Le devoir de se poser un certain nombre de questions

sans forcément se référer à DIEU

Comment prendre sur soi « JE SUIS » et intégrer personnellement les dix paroles pour faire évoluer cette « Trace intime de Dieu »( יה והYHWH ») en une divinité optionnelle, qui se serait incarnée en Jésus Christ , si on en a la conviction ?

Si « יהוה YHWH » devient le « Tout Autre » insaisissable, il est donc problématique au nom de la liberté de croyance et de la laïcité dans le contexte culturel du 21e siècle.

Cependant son influence est difficilement contestable en référence permanente aux « droits de l’Homme » et à l’exigence de « justice » et de respect des besoins équitables de chaque individu. Nous y ajoutons la « charité » qui est culturellement associée à la tradition judéo-chrétienne, le grand + qui fait toute la différence… peut-être.

Pour quelques auteurs spécialistes de la « Source Q »63 qui rassemble les « paroles de Jésus » et pas grand chose d’autre, nous déduisons que le fils du charpentier de Nazareth a passé pas mal de temps dans une des écoles rabbiniques où se pratiquait la confrontation permanente des textes avec le bon sens, la tradition, les références des sages précédents.

Celui qui explique la « parole avec autorité »64 et non pas comme les scribes, Jésus ne va certainement pas se prendre pour « LE FILS de DIEU. », sinon comme l’un de ses fils, frère en humanité et porteur d’un message de liberté reçu autrefois à la sortie d’Égypte d’un « JE SUIS »

« יהוה YHWH » initial réputé être avec nous à travers vents et marées.

Nous avons tous l’instinct de survie, mais cet instinct est canalisé et orienté par les dix paroles, pour plus de justice, de vérité, de solidarité, de reconnaissance, de charité.

Pas « moi d’abord » mais selon la « volonté de Notre Père » pour le bien de tous, à cause de « יהוה YHWH » ou parce que « JE SUIS » solidaire avec toute l’humanité.

La fonction fondamentale de l’affirmation de soi « JE SUIS » en référence à « יהוה YHWH » est de nous aider a assumer les dix paroles, comme Jésus l’a fait et nous en a donné l’exemple,

« non pas pour abolir la loi, mais pour l’accomplir »65.

Est-ce que cela se reflète dans le concept d’Humanitude cher a Albert Jacqard ?

« Les cadeaux que les hommes se sont faits les uns aux autres depuis qu’ils ont conscience d’être, et qu’ils peuvent se faire encore en un enrichissement sans limites, désignons-les par le mot humanitude . Ces cadeaux constituent l’ensemble des caractéristiques dont, à bon droit, nous sommes si fiers, marcher sur deux jambes ou parler, transformer le monde ou nous interroger sur notre avenir. L’humanitude, c’est ce trésor de compréhensions, d’émotions et surtout d’exigences, qui n’a d’existence que grâce à nous et sera perdu si nous disparaissons. Les hommes n’ont d’autre tâche que de profiter du trésor d’humanitude déjà accumulé et de continuer à l’enrichir . »

C’est à mon sens une façon de dire que nous sommes collectivement frères et sœurs en humanité et héritiers répondants du « Don des dix Paroles » par exemple lorsque nous disons ensemble « Notre Père… » comme le relève J-S Spong, ancien Évêque de Newark, dans sa tentative d’actualiser le message de Jésus.

« Il ne suffit pas de me dire : Seigneur, Seigneur ! pour entrer dans le Royaume des cieux ; il faut faire la volonté de mon Père qui est aux cieux. » Matthieu 7:21 Le reste est accessoire.

15 Pour ne pas tirer de conclusions.

Le parcours que je vous ai proposé dans cet essai ne prétend pas être normatif, ni exhaustif.

Il est le résultat de nos discussions en préparant les semaines du Camp Biblique Œcuménique de Vaumarcus avec « le groupe théologique ».

C’est aussi une tentative de répondre aux questions que se posent les participants à cette semaine annuelle de juillet au bord du Lac de Neuchâtel.

Les participants sont issus des paroisses des églises de Suisse Romande et de France, de leurs amis, croyants ou pas, curieux d’approcher la Bible et d’y expérimenter des techniques de lectures et de compréhension non dogmatiques, innovantes, curieuses, inventives … et traditionnelles.

C’est quoi la Bible ? Qu’est-ce qu’elle a encore à nous dire aujourd’hui ?

– A quoi cela sert de lire ces textes vieux de plus de 2000 ans ?

– Pourquoi les Eglises ne tiennent pas plus compte de nos interrogations ?

– Peut on être non croyant et découvrir que ces textes sont importants pour comprendre notre époque ?

Il n’y a pas UNE lecture, UNE interprétation, UNE vérité,

UNE histoire du texte Biblique,

UNE conception du monde, UNE idée de Dieu.

Il y a vous et moi, il y a des savants qui ont fait des découvertes archéologiques. Il y a des philosophes qui se sont aussi posé de bonnes questions, d’autres qui ont divagué sur leurs

a-prioris dogmatiques, ou l’idée que la Bible était LA VERITE, comme une « PAROLE DE DIEU »66.

Nous avons appris avec le temps que les êtres humains doivent bien se débrouiller avec leur réalité, leurs problèmes, l’air du temps, l’évolution du monde, le progrès, le bien et le mal, l’amour et la haine, la vie et la mort.

Ils ont trouvé dans l’échange de paroles, de quoi s’expliquer, se dire ce qu’ils ressentaient, et ce qu’ils avaient envie de partager sous le soleil et la pluie, en été et en hiver, en famille ou en solitaire, pour expliquer l’inexplicable, et se réjouir du lendemain, peut-être un autre jour.

Au cœur de toutes nos interrogations, la réponse est peut-être simplement

« la vie » comme une autre identité de « Je suis »…

Bernard van Baalen, le 20 mars 2019

PS Mais où a passé le « mâle dominant » ?

YZ WordPress 7

Bibliographie :

L’idée de Dieu chez les hébreux nomades, Daniel Faivre, (préface Martin Rose, univ NE)

l’Harmattan 1996. (ISBN 2-7384-4909-3) Une intéressante exploration des diverses influences qui ont inspiré les auteurs du Premier Testament et organisé leurs traditions.

Comment Jésus est devenu Dieu.

Frédéric Lenoir. (Rédacteur en chef du Monde des religions) Fayard., 2010

La signification de la notion de Parole

dans la pensée chrétienne

F._J Leenhardt Revue d’histoire et de Philosophie /PUF N° 3 1955

Introduction à la Bible II

A.Robert & A.Feuillet Desclée & Cie 1959

The Gospel of John

R.Bultmann Westminster press 1964-1966

L’héritage De La Liberté –

De L’animalité À L’humanitude

Albert Jacquard

Seuil – 1986

Lecture de l’Évangile selon St Jean

vol 1,2,3,4.

X.-L.Dufour Seuil 1988

Histoire des croyances

et des idées religieuses 

Mircea Eliade, Payot 1989

La Source des paroles de Jésus (Q)

Aux origines du christianisme

Andreas  Dettwiler & Daniel Marguerat  Labor et Fidès 1988

La communauté Johannique et son histoire

Ouvrage collectif / Article d’A.Dettwiler p.185 Labor et Fides 1990

L’Ours : Histoire d’un roi déchu,

Michel Pastoureau.Le Seuil, 2007

(ISBN 978-2-02-021542-8)

De la naissance des dieux

à la naissance du Christ

Eugène Drewermann, Seuil 1991

L’idée de Dieu chez les hébreux nomades

Daniel Faivre, L’Harmattan 1996

Liberating the gospels

John Shelby Spong, Harper&Collins 1996

Le quatrième Evangile

Claude F.Molla Labor et Fides 1977

(en particulier sur la lumière : Le pasteur C.Molla est d’origine juive.)

Jean, L’évangile revisité

André Thayse CERF/ Racine 2001

Et l’Homme créa les dieux

Pascal Boyer Robert Laffont 2001

On achève bien les hommes,

de quelque conséquences actuelles

et futures de la mort de Dieu.

Dany-Robert Dufour, Denoël 2005

L’Evangile selon StJean

Jean Zumstein Labor et Fides 2007

Comment Jésus est devenu Dieu

Frédéric Lenoir Fayard 2010

(ISBN 978-2-213-63673-3)

Frédéric Lenoir explore le début du mouvement des disciples de Jésus de Nazareth, et comment se sont développés les titres attribués à Jésus, fils du charpentier, devenu Dieu au fil des conciles…

Jésus

Jean-Christian Petitfils Fayard 2012

(Etat de la question : Un bon résumé des précédents !)

JE SUIS …. Qui ?

יהוה comme on ne l’attend pas.

p.1 Introduction : A l’origine, la meute s’organise autour du Mâle Alpha

p.2. 1 « JE SUIS m’a envoyé vers vous » pour dé-masquer « Dieu »

p.3 2 Le schéma « normal » à l’époque de Moïse comme à la notre.

3 L’improbable gestion du Mâle Alpha dans l’organisation humaine.

p.5 4 Aménophis IV-> Akhenaton et la divinité solaire,

un faux ancêtre, et une filiation incertaine

p.6 5 Les mythes des patriarches migrateurs

p.7 6 Une relation à Dieu qui évite l’objectivation

et la dépendance à « un autre » 

p.9 7 Le retour aux sources, ou la pérennité de l’intuition initiale

8 Le terme employé par Jean : le « Logos logos  » dans le contexte hellénistique.

p.12 9 Le changement de schéma a un impact

sur le mode de célébration

p.13 10 Le Mystère de l’identification consciente de Jésus

p.14 11 La Samaritaine et l’autorité

p.15 12 Le témoignage de 1 Samuel 8 et la demande d’un roi.

13 JE SUIS libre

p.16 14 Le devoir de se poser un certain nombre de questions

sans forcément se référer à DIEU

p.17 15 Pour ne pas tirer de conclusions

p.18 Bibliographie :

1 Albin Michel 1992

2Apocalypse 1: 8 Je suis l’ALPHA & L’OMEGA dit Jésus… ce qui englobe tout l’alphabet grec.

3Précisons « Individu Alpha », Dans la période la plus archaïque, c’était la femme qui était au centre, comme productrice de ses semblables indispensables à la survie du groupe. Chez les éléphants c’est aussi une vieille femelle qui conduit le groupe. Chez le gorille et le chimpanzé c’est le « Male Alpha » qui assure la cohésion de l’espèce et chez les mammifères, le mâle dominant est celui qui possède les caractéristiques génétiques les plus sures.. Les castors sont aussi exemplaires de la prédominance d’un mâle alpha : Non seulement il est le procréateur mais il est aussi l’ingénieur hydraulicien qui va organiser les barrages sur les cours d’eau, et distribuer l’emplacement des résidences et autres terriers de son groupe. Les Lions combinent deux comportements : Une femelle dominante conduit la chasse, le mâle dominant assure la reproduction… Tout cela reste très … humain !

4A l’origine des quatre approches exégétiques traditionnelles du Judaïsme rabbinique, les principes de la Lectio divina ont été exprimés vers l’an 220 de notre ère par Origène.. En 1965, le Concile Vatican II « Dei Verbum » promulgue la Lectio divina non seulement pour le clergé qui l’a toujours pratiqué mais aussi pour tous les chrétiens. Popularisée par le Cardinal Martini dans le Diocèse de Milan la lectio divina est devenue un mode de méditation et de prière commun à toutes les confessions religieuses.

5El = identité de la divinité au singulier. Eloïm = identité de la divinité au pluriel plus souvent utilisé dans les textes.

6Les Dix Paroles

7 Avec un Grand « H » s’il vous plaît

8 300 av JC

9 « On achève bien les hommes », quelques conséquences actuelles et futures de la mort de Dieu.

Dany-Robert Dufour Denoël 2005

10Genèse 1:26-28. « pour dominer la terre »

11Genèse 2 : 5-7 et 2:18 L’homme créé pour cultiver, et la femme pour l’assister !

12Genèse 4:1-15

13Genèse 33 : Le combat avec l’ange et la réconciliation des « patriarches »

14 successivement et pas simultanément

15Michel Pastoureau, L’Ours : Histoire d’un roi déchu, Le Seuil, 2007

16 Moïse et l’exode.

171 Samuel:1 – 8 qui culmine avec la description des inconvénients (du pouvoir ) de la royauté !

18 Cf Zénon 3e s. Av JC, qui recommande de suivre les rituels pour le bénéfice de la société

19Actes 17 : 16-34

20Le monothéisme Égyptien d’Akhenaton n’a rien à voir avec l’histoire de Moïse disent les spécialistes, même Thomas Romer en doute. Cependant nos ancêtres n’étaient pas plus stupides que nous, et peut-être avaient-ils la même intuition.

21La « tente d’assignation » Tabernacle qui abritait l’Arche d’alliance à l’époque de Moïse. Son architecte en chef, Béséléel désigné par Dieu à Moïse. Gen.18 : 1, 6, 9-10 met en évidence le mode de vie des hébreux nomades, et la tente d’assignation devient le sanctuaire (Exode 25 : 8).

22Aussi connu comme Amenhotep IV (né possiblement entre -1371/-1365 et mort vers -1338/-1337,

23 Jusqu’à CF Ramuz « Si le soleil ne revenait pas »

24La région qui couvre des Fleuves du Tigre et de l’Euphrate, jusqu’aux côtes méditerranéennes et l’Egypte.(Aujourd’hui Irak Syrie, Jordanie et une partie du Nord Sinaï)

25Genèse 37 à 46

26La naissance de Moïse : Exode 2 : 1-6 La file de pharaon trouve l’enfant abandonné sur le Nil, et le confie à une nourrice de la tribu même de Moïse, en fait sa mère !

271303-1213 Yul Bryner dans le film

28Jusqu’à la révolution Française, c’était l’argument des « nobles » et autres notables.

29Exode 2 : 11-25. Moïse se réfugie à Madian. Il épouse les filles de Jethro, et leurs convictions.

30Exode 3:1-6.

31 c’est vrai pourquoi pas aller en Lybie, 4000 ans plus tard ils auraient pu exploiter le pétrole !

32 Exode 3:11-15

33Exode 3, 4 etc.

34Thomas Römer, Collège de France, les pérégrinations de l’Arche de l’Alliance . 2018

35 les 5 livres de la Torah la Bible Hébraïque +er testament.

36 Entre – 538 et – 432 après le règne de Cyrus e particulier, plus tolérant envers les traditions des peuples soumis.

37 Ce projet débuta vers 19 av JC, et fut terminé vers + 63

38Note 5 p.2 Comme un refus de singularité, à une époque ou le monothéisme n’est pas à la mode.

39 p.192

4070, Traduction grecque de la Bible Hébraïque 1-2e siècle av JC

41Les scientifiques le raprocheraient aujourd’hui du/des langages informatiques

42 F.Lenoir, comment Jésus est devenu Dieu p. 120

43 appelé en grec Sagesse de Salomon)

44 Ce livre de rédaction grecque fait partie du canon des Écritures inspirées pour les catholiques et les orthodoxes, mais ne figure pas au canon des écritures hébraïques ou protestantes.

45Matthieu 5 : 13-14

46Matthieu 25: 40

47Marc 14: 66-72

48Luc 4 : 31-32, Matthieu 7: 28 etc

49Luc 24 : 13-35

50 de la bible chez les chrétiens

51Martin Buber disait qu’il fut  » le plus juif de tous les juifs « 

52A vec la « présence réelle » qui est devenue incontournable de celle du célébrant attesté.

53Tradition du judaïsme orthodoxe fondé au 18e siècle par le « Baal Shem Tov »

ou Bescht :Israël Ben Eliezer. 1700-1760 Ce sont les « fondamentalistes en noir » d’Israël et Manhattan.

54 On achève bien les hommes, DanyRobert Dufour ou quelques conséquences inattendues de la « mort de Dieu »

55 les textes qui lui ont étés attribués.

56 Phil.2:6-8

57Jn 4:19ss

58En référence à l’informatique, c’est le « programme » ou l’algorithme qui vous permet de fonctionner.

595e-4e siècle av JC.

60Encore actuelle chez les traditionnalistes en Israël au 21e siècle.

61La voix du peuple est la voix de Dieu : 1 Samuel 8 : 22.

62Schéma p. 11.

63Une sélection de « paroles de Jésus » qui sont dans les Evangiles, et que les exégètes considèrent comme plus proches de l’Histoire authentique de Jésus de Nazareth.

64Mc 1 : 21-22 ,Mt 7 :28-29

65Mt 5:17-20

66Dans les liturgies traditionnelles, la lecture de la bible est introduite par ces mots :

« Nous lirons maintenant dans la Parole de Dieu »

La vocation de Samuel dans son contexte

Implication pratique de la lecture de la bible

comme témoignage d’expériences vécues.

Dans mon article avec une proposition d’interprétation du mot « dieu » j’ai essayé d’examiner les besoins des populations qui ont porté ces textes jusqu’à nos jours, en les situant dans leurs contextes historiques et culturels.

En préparant le thème de la « Vocation de Samuel » pour le camp Biblique Œcuménique 2019 à Vaumarcus, nous abordons plus spécifiquement les « livres historiques » qui racontent les situations vécues par le peuple hébreu depuis « les Prophètes » jusqu’à la fin de la Royauté.

Le texte est assemblé entre le 5e et le 4e siècle, sur la base des traditions orales, des récits attachés aux sanctuaires et aux tribus qui ont formé un ensemble pas très homogène, mais linguistiquement proche.

« Les livres historiques » Josué, Juges Samuel et Rois sont utiles à la fin de la royauté, quand les Perses vont régir l’administration de la région, et Jérusalem devient le « centre spirituel » des Hébreux, héritiers des nomades vivant entre la Syrie et l’Egypte.

L’intérêt de ces « histoires » c’est leur vertu pédagogique : Elles paraissent au moment où, dit-on, le peuple juif se recompose et réorganise le culte du Temple.

Les histoires de l’Arche de l’Alliance évoquent le passé lointain du nomadisme qui ne se pratique plus. Les territoires ont été partagés entre les « familles » devenues « tribus ». Son contenu même a quitté les « tables de la Loi » pour entrer dans les « paroles » dont on fait mémoire.

Il est question des « sages-juges » d’autrefois, plus modestes que les rois contemporains. Il est question des « Rois d’Israël et de Juda » à commencer par Saül, David et Salomon dont le modèle culturel sera les Omrides qui lui succéderont deux siècles plus tard. Les rois ne sont que des hommes avec leurs qualités et leurs défauts, les « combats des chefs » ont servi à répartir les territoires. Tout cela, c’est du passé, il faut regarder vers l’avenir.

Une des grandes figures de ce passé est le « Juge-Prophète » Samuel que nous allons suivre dans le premier livre qui porte son nom.

1 Samuel 1 : 1-19

« Dis Maman, pourquoi les rois ne sont pas des Superhéros ? »

Cela pourrait être la question que se posait un enfant d »Hébron au 5e siècle av JC, alors qu’il n’y avait plus de roi depuis -586…

Et son père aurait pu répondre « il était une fois à l’époque des Juges un saint homme au sanctuaire de Silo (…) qui finalement a consacré Saül le premier roi : Le saint homme s’appelait Samuel et il était un grand prophète… »

« Oui mais il venait d’où, et comment savait-on qu’il était un « prophète » ? »

« Je vais te raconter son histoire et sa naissance … » Et pour répondre à la demande avec pertinence, le narrateur va faire appel à ce qui répond le mieux à l’attente de ses auditeurs, à savoir aux récits mythologiques de naissance des « grandes figures symboliques » connues de la culture de l’époque. Le pharaon naît d’une vierge et de Dieu (Le pharaon précédent) La plupart des héros grecs sont dès leur naissance des personnages extraordinaires. Ils sont soit enfants d’un dieu et d’une mortelle comme Héraclès ou Achille, soit enfants d’un roi, comme ou Thésée. Le récit de la naissance de Moïse ressemble de près à la légende de la naissance de Sargon, roi légendaire, fondateur de l’Empire Assyrien. Certes, le thème de l’enfant exposé et miraculeusement sauvé est largement répandu dans le folklore (Romulus et Remus, Cyrus, Horus…); par exemple, le récit de la naissance de Sargon ressemble à celle de Moïse, sans oublier la naissance des fils d’Abraham dont la mère Sarah était stérile, et celle de Jésus de Nazareth, tous nés grâce à Dieu.

Encore faut-il le prouver: Les « gardiens de la religion » se méfient des personnes inspirée par des breuvages inappropriés… ou par des idées qui les mettent en défaut.

1 Samuel 1:20-28

Il est de première importance de souligner la légitimité de Samuel en en faisant un « élu » ou un

enfant né de l’intervention et porteur de l’inspiration divine. Il sera le garant et traducteur de cette volonté. En 587 Nebucadnetzar s’empare de Jérusalem et fait du Royaume de Juda une province de Babylone. Le temple est profané, on y célèbre des « dieux étrangers » comme autrefois dans le royaume de Samarie, et c’est la justification des défaites des héritiers de Moïse.

Pour éviter ça il faut respecter les rituels, les offrandes et holocaustes requis. Cela concerne en particulier les officiants des lieux saints qui se doivent d’être irréprochables, ce qui, à l’époque, était loin d’être le cas : Pour officier légalement, il fallait être formé et accrédité par le clergé local et par le pouvoir occupant. Le slalom spirituel devait être un sport éminemment stimulant intellectuellement et moralement. Si la tradition est respectée, si les responsables « consacrés » ne cèdent pas à la corruption, Dieu sauvera son peuple, comme il l’a déjà fait si souvent. Les fidèles (de l’époque) en sont la preuve. (« Let’s Israël be great again » Un argument qui ne trump pas !).

Si Samuel est obéissant, il sera le messager (du) divin.

1 Samuel 2 évoque les histoires connues : Quand le maître des lieux, Eli, ne contrôle pas ses enfants,et qu’ils se livrent à la corruption, à l’extorsion de fonds, et au détournement de biens sociaux, le châtiment divin s’abattra sur eux. La seule chance d’en sortir est la restauration de la loi et de l’ordre avec un nouveau gardien du temple.

En 538 Cyrus autorise le retour des juifs à Jérusalem et en 432 Esdras viendra rétablir la « LOI » au Temple de Jérusalem.

1 Samuel 3 : 1 – 4:1,

L’appel de Samuel est un récit obligé de tous les catéchismes : Un enfant appelé par Dieu, il y a de quoi faire rêver une grand-maman qui le voit déjà officier le dimanche matin !

Dieu appelle, ce n’est pas le gardien du Temple, héritier d’une dynastie corrompue. Non l’appel vient d’ « ailleurs ». Il vient de la souffrance du peuple qui patiente et subis les pressions de l’occupant et les méfaits de la corruption qui l’accompagne hier comme aujourd’hui. Samuel est appelé à faire le ménage à Silo, et ce ne sera pas sans crainte des représailles. Mais Eli est un brave prophète qui ne se fait pas d’illusion sur ses fils. Les Assyriens et les Babyloniens ont quelque peu dégradé les fonctions sacerdotales, même à Jérusalem. Les autres lieux saints sont disqualifiés pour cause de profanations – y compris Silo – Le Temple de Jérusalem pourrait un jour abriter l’Arche de l’Alliance (Ah bon, il n’y a que les grands prêtres qui le disent !). C’est la chance d’une restauration : C’est Dieu qui le veut, c’est raconté là, dans l’histoire de Samuel : On va y arriver : Il faut respecter les dix paroles des « Tables de la Loi » et c’est inscrit dans l’ADN du peuple, et le peuple ne se trompe jamais quand il se réfère à Dieu…

(Concept assez dangereux, hier comme aujourd’hui, d’où l’intérêt d’un tel livre.)

1 Samuel 4 et 5: Le châtiment de la dynastie d’Eli et les tribulations infligées par les Philistins

Avec ou sans la « Caisse de l’Alliance » le peuple s’est fait bousculer du Nord au Sud, c’est de notoriété historique et mémorielle. Les collines arides de Juda ont servi de refuge. La Samarie au Nord a été convoitée par les Égyptiens, puis par les Philistins dès le 11e siècle. Ils visaient ses ressources agricoles qui transitaient par les ports de la Méditerranée. Les Assyriens et les Babyloniens s’en sont mêlés avec la collaboration des tribus jalouses de la région. Les noms de lieux et les cités mentionnées dans le texte soit étaient désertées depuis longtemps ou pas encore réinvesties à l’époque racontée par les auteurs. La cité d’Hébron est le centre commercial entre l’Arabie l’Égypte et les ports Philistins de Tyr , Sidon, Ashdod et Ashkelon. L’ancêtre tutélaire d’Hébron va devenir le « père des patriarches » Abraham, qui devra bien s’entendre avec les autres figures des tribus de la région. Elles deviennent ses fils dans les récits de la Genèse : Les compromis économiques font les grandes familles.

1 Samuel 6 : 1 – 21

L’ « Arche de l’Alliance » est une sorte de patate chaude, un objet extrêmement encombrant qui rappelle les fondamentaux de l’humanité, donc divins. Si « les autres » ont gagné les batailles depuis pas mal d’années, c’est que nous n’avons pas été fidèles au contenu de l’arche.

Et si ceux qui le détiennent ont des problèmes, c’est qu’ils n’ont pas compris que son « fonctionnement » est exclusif de toute autre allégeance.

C’est le contenu significatif de l’Arche qui pose plus problème que sa réalité matérielle.

Le récit ici se veut encore une fois pédagogique : Au 5e et 4e siècle la situation a changé ce ne sont plus les mêmes qui habitent les villes et les villages. Les mêmes causes produisent les mêmes effets : Va-t-on se battre pour le droit et la justice ou pour le pouvoir sur les voisins, pour les circuits économiques ou pour la liberté de vivre en paix ?

1 Samuel 7: 1- 27 :la restauration d’un « peuple »

Les Philistins sont définitivement vaincus/assimilés par les Perses vers -530.

Entre -520 et – 515 Suite à l’édit de Cyrus les sacrifices reprennent à Jérusalem. Le temple va être reconstruit. Il faut donc le re-légitimer en y réinstallant « la Loi ». Tous les temple de l’époque contiennent des statues ou des symboles de divinités… on ne peut pas y échapper, sauf qu’ici l’expression de « YHWH », ce sont dix paroles qui n’ont plus besoin de support matériel. Il faut également éliminer les restes des Baals et Astartés, et des autres divinités comme Ashéra, la compagne de YHWH qui s’efface des références depuis un siècle.

L’observation et l’étude de la loi vont remplacer les sacrifices dans les communautés éloignées à Babylone, et à Éléphantine, en Egypte. La pratique ouvrira la voie de la spiritualité et de la pratique Synagogale après la destruction définitive du Temple par les Romains.

C’est la période féconde de la rédaction des textes « historiques » de Samuel et des Rois qui vont être « publiés » en -444 avec la proclamation de « la Loi » (les 5 livres de Moïse) par Esdras et renouvellement de l’alliance avec Dieu.

Il faut raconter qu’à l’époque, Samuel, messager de Dieu, « Juge Prophète » a été à l’origine de la défaite des Philistins. – Josué avait vaincu Jéricho, alors pour les Philistins c’est aussi une vieille histoire. Les villes citées en fin de chapitre n’existaient pas à l’époque attribuée à Samuel, par contre elles sont bien réelles au 4-5e siècle, donc l’auditeur du récit comprend le contexte politique. Les Perses ont pacifié la zone… et donc Samuel pourra faire annuellement le tour des sanctuaires où il n’y a plus de conflit ouvert et il s’installe à Rama (Le Hauts), environ 8km au nord de Jérusalem, donc pas au Temple ! – Aujourd’hui en bordure des territoires « palestiniens », le lieu n’est pas répertorié sur les cartes israéliennes… Samuel ne serait sans doute pas bienvenus à Jérusalem.

1 Samuel 8 : 1 -22 « Tu l’as voulu, tu l’as eu ! »

Du point de vue contemporain, c’est le chapitre le plus révélateur de la pertinence des écrits bibliques.

Il faut absolument rétablir la situation, explique le texte aux juifs du 4e siècle. Les Perses libèrent les habitants de la région : Il n’y a plus de rois, ni de juges dignes de ce nom ; Les meneurs sont Esdras et Néhémie, prophètes autoproclamés et défenseurs d’une orthodoxie plus exclusive. Le Temple est en restauration, les cérémonies réorganisées. La paix semble pouvoir durer jusqu’à l’arrivée des romains. Il faut trouver un autre « modus vivendi ».

L’expérience montre que même avec un Juge-Prophète éclairé comme Samuel, la dynastie sacerdotale n’a pas d’avenir. Ses fils sont comme ceux d’Eli sont « dévoyés par le lucre : Ils acceptent des cadeaux, ils firent dévier le droit » (8:3). (Abu Dhabi et le Kremlin ne sont pas si loin!). Donc le bon peuple – il est toujours « bon » – va demander un roi à Samuel, pour faire comme tout les autres peuples du voisinage : Avoir un « Porte Parole » pour s’identifier, quand c’est nécessaire.

La pression exercée autrefois par les Philistins fut telle, qu’elle semble en partie avoir été responsable de l’institution de la monarchie israélite.

(Le personnage littéraire de) Samuel se rend compte que l’Arche de l’Alliance ne fait plus le poids, car elle a été subtilisée au moment de la destruction du Temple. La « Crainte de Dieu » n’est plus un argument de management.

Le peuple veut un Roi pour faire des affaires. Quelqu’un qui a visiblement l’autorité qu’il peut faire respecter, contrairement à une « éthique fondamentale » impossible à enfermer dans un code civil ou religieux. (Il a commencé à se faire à Babylone mais n’aura jamais statut juridique civil.)

Et là Samuel, inspiré par le bon sens et par Dieu va leur faire LE discours qui devrait être répété à toutes les ouvertures de constituantes et à toutes les élections

Samuel a demandé à « Dieu » ce qu’il devait faire avec la demande du peuple.

1 Samuel 8:7 Le SEIGNEUR dit à Samuel : « Écoute la voix du peuple en tout ce qu’ils te diront. Ce n’est pas toi qu’ils rejettent, c’est moi. Ils ne veulent plus que je règne sur eux. 8Maintenant donc, écoute leur voix. Mais ne manque pas de les avertir : apprends-leur comment gouvernera le roi qui régnera sur eux. »”

10 Samuel redit toutes les paroles du SEIGNEUR au peuple qui lui demandait un roi.

11 Il dit : « Voici comment gouvernera le roi qui régnera sur vous : il prendra vos fils pour les affecter à ses chars et à sa cavalerie, et ils courront devant son char.

12 Il les prendra pour s’en faire des chefs de millier et des chefs de cinquantaine, pour labourer son labour, pour moissonner sa moisson, pour fabriquer ses armes et ses harnais. 13 Il prendra vos filles comme parfumeuses, cuisinières et boulangères.

14 Il prendra vos champs, vos vignes et vos oliviers les meilleurs. Il les prendra et les donnera à ses serviteurs.

15 Il lèvera la dîme sur vos grains et sur vos vignes et la donnera à ses eunuques et à ses serviteurs. 16 Il prendra vos serviteurs et vos servantes, les meilleurs de vos jeunes gens et vos ânes pour les mettre à son service.

17 Il lèvera la dîme sur vos troupeaux. Vous-mêmes enfin, vous deviendrez ses esclaves. 18 Ce jour-là, vous crierez à cause de ce roi que vous vous serez choisi, mais, ce jour-là, le SEIGNEUR ne vous répondra point. »1

19 Mais le peuple refusa d’écouter la voix de Samuel. « Non, dirent-ils. C’est un roi que nous aurons. 20 Et nous serons, nous aussi, comme toutes les nations. Notre roi nous jugera, il sortira à notre tête et combattra nos combats. »

21 Samuel écouta toutes les paroles du peuple et les répéta aux oreilles du SEIGNEUR.

L’auteur du texte ne se fait aucune illusion, il a l’expérience de trois siècles de royautés calamiteuses, et donc il sait de quoi il parle.

Le peuple dit « Cause toujours on veut un roi » Samuel leur répondit « Vous l’aurez car Dieu dit : V.22 « Écoute leur voix et donne leur un roi »

Et Samuel les renvoya « foutez moi le camp !».

Le récit Biblique décrit leurs rois, qu’ils s’appellent Saül, David, Salomon et tous les autres.

Aujourd’hui « le peuple » élit Trump, Orban, Netanyahou, Erdogan ou Bolsonaro, ils sont de tous les temps, et agissent toujours de la même manière : Ils se font élire par le « bon peuple » qui a toujours raison… et voilà pourquoi on raconte cette histoire encore aujourd’hui.

Concrètement, et historiquement, ils n’ont plus eu de roi.

1 Le v. 18 préfigure les « Gilets Jaunes » de l’automne 2018