Les «10 Paroles de Vie » à l’épreuve des siècles et des continents.

 

La radio a ceci de bien c’est qu’au hasard du temps on peut tomber sur des pépites.

Eric Julien interrogé par Florence Farion sur sa rencontre avec les Indiens Kogis nous fait découvrir un peuple de l’équilibre et de la bienveillance mutuelle… https://www.rts.ch/play/radio/egosysteme/audio/la-sagesse-de-kogies?id=9323121&station=a9e7621504c6959e35c3ecbe7f6bed0446cdf8da

Ces habitants de Colombie ne sont pas coupeurs de têtes, ni cannibales, pas de sarbacanes empoisonnées : Quand les conquistadores et les missionnaires sont arrivés ils les ont accueillis… et quand ils se sont montrés envahissants et vulgaires, ils sont partis dans les montagnes pour pouvoir continuer à vivre en paix : Dans leur langue le mot « guerre » n’existe pas, les hommes et les femmes sont égaux, personne n’a d’autorité sur personne, et le partage des tâches, des responsabilités et de la gestion des « affaires courantes » se fait dans la concertation respectueuse, et le respect des limites de chacun de telle manière que l’équilibre soit respecté.

Dany Robert Dufour dans son livre « On achève bien les Hommes » (dans le sens de les « terminer » dans leur construction, et non pas de les « exterminer ») (Denoël 2005) arrive à la conclusion étrange pour un incroyant : La véritable « trace de Dieu », ce sont les « dix Paroles » données à Moïse » et transmises par la tradition judéo-chrétienne. Dix paroles qui devraient organiser l’humanité de telle manière qu’elle vive dans la liberté, la vérité et la charité… cherchez l’erreur !

Le peuple « Elu » a oublié son devoir de respecter les recommandations divines pour toutes sortes de raisons économiques, politiques et de survie. Les pays de traditions chrétiennes tergiversent sur la notion de laïcité pour ne pas appliquer l’égalité, la fraternité prônées par celui qui est considéré comme « La lumière du Monde » et relégué à l’éclairage des sacristies ou parfois d’étranges attitudes sont suggérées sous prétexte d’amour et de divine autorité…

La morale laïque se conjugue avec le libre arbitre et le libéralisme amoral du profit pour les plus « méritants » autrement dit la « loi du plus fort ».

Et Eric Julien nous fait faire la rencontre qui est exactement ce que souligne Dany Robert Dufour, à savoir que les « dix Paroles » ou ce qui leur ressemble, sont partagées partout dans le monde comme idéal de la vie sociale, mais… rarement utilisées comme « norme » efficace, à part l’interdiction du meurtre … quoi que certains puissants y recourent en affirmant une piété par ailleurs ostentatoire pour garder le pouvoir sur le bas peuple convaincus que l’autorité est divinement donnée à ceux qui ont « pris le pouvoir ».

Les indiens Kogis ont une spiritualité, une cosmogonie qui explique le monde et ses environs, on peut appeler cela une « religion » ou une spiritualité, qui n’est pas basée sur le pouvoir ou la peur, mais sur la nécessité de vivre ensemble dans de bonnes conditions, malgré les problèmes causés par la « civilisation » à laquelle ils n’échappent pas, mais dont ils se tiennent à distance, en évaluant le pour et le contre de ses pratiques.

Serait-ce un « Peuple Elu de D.ieu » qui aurait réussi ?

Eric Julien en tire des conclusions managériales qui en valent la peine :

http://www.tchendukua.com/association-3/#.WpGZI-fjKM8

Il vient de consacrer un livre à cette aventure hors du commun. « Le choix du vivant » est un plaidoyer étonnant, fruit de 6 ans de recherche et de près de 30 ans dʹobservations et dʹécoute.
(Eric Julien et Marie Hélène Straus: « Le choix du vivant » éditions Les liens qui libèrent. Après
Kogis, le réveil d’une civilisation précolombienne (Albin Michel),

 

Les Indiens Kogis sont les derniers descendants des civilisations précolombiennes. Réveil d’un peuple qui ne veut pas mourir

Ils étaient là avant tout le monde. Avant les Espagnols. Avant les missionnaires. Avant les pilleurs de tombes, les guérilleros, les trafiquants de bois et le cartel de Medellin. Ils sont parmi les derniers représentants vivants des civilisations précolombiennes, comme si 25 000 Mayas avaient traversé (presque) intacts cinq cents ans d’une histoire tourmentée. 

Deux cités enfouies. Les Kogis, héritiers du grand peuple tayrona, vivent en Colombie, sur une montagne à fleur de mer, la sierra Nevada de Santa Marta, 5 800 mètres d’altitude à 40 kilomètres de la mer des Caraïbes. Les conquistadors les ont cru décimés: ils s’étaient seulement repliés sur les plateaux où l’oxygène manque, loin de leurs cités de pierre et des terres cultivables. Redécouverts dans les années 1970 par le comte de Brette, le niveau de sophistication de leur société, son système juridique, ses codex ont impressionné Marshall McLuhan et Gerardo Reichel-Dolmatoff. 

En 1985, Eric Julien, géographe et alpiniste, est sauvé d’un œdème pulmonaire à 4 500 mètres par les Kogis. Repoussés toujours plus loin vers les sommets par les narcotrafiquants et les troupes des Farc, ils ont perdu 70% de leurs terres en trente ans. En signe de gratitude, Eric Julien leur fait alors la promesse de les aider à les récupérer. Depuis 2000, l’association Tchendukua a racheté plus de 1 500 hectares, dans le but de réaliser un corridor jusqu’à la mer et ainsi de faire revivre les traditions agricoles rendues obsolètes par l’altitude. Sur ces terres, deux cités enfouies dans la selva sont en cours de défrichement, que les Indiens souhaitent réinvestir pour les faire revivre. Comme si cinq siècles ne s’étaient pas écoulés. 

 

Un beau sujet de réflexion pour notre monde un peu désenchanté par les utopies et les belles promesses des démagogues de tous les pays.

 

Quelques références prises sur Internet :

Paroles kogis, ce qu’ils nous apprennent.

1) Une mémoire collective:
Ils se racontent leur histoire et ne l’écrivent pas. Ils discutent longuement et prennent des décisions pour le futur en fonction de leurs expériences passées.
Citation Kogis :
« Nous devons apprendre à écouter les anciens, à les respecter comme nous respectons nos enfants, nos épouses. Pour cela, il faut être humble, apprendre à aimer. Les Kogis doivent se respecter et s’aimer: comme ils respectent et aiment la nature. » M.M Dingula.

2) Une forte convivialité:
Les Kogis parlent beaucoup, pour mieux se comprendre, éviter les conflits… Ainsi, leurs relations sociales sont fortes et harmonieuses.
Citation :  » Nous sommes frères, nous sommes égaux entre frères, les jeunes et les anciens. Lorsque nous mangeons, nous ne mangeons pas chacun dans son coin comme les petits frères, c’est trop triste d’être seul. Quand il n’y a pas beaucoup à manger, on partage ce qu’il y a. Il faut toujours essayer d’aider l’autre, l’accompagner pour qu’il soit bien. » Conchacala.

3) Une finalité d’équilibre:
Pour les Kogis, l’équilibre est partout : équilibre de soi, de soi avec les autres et de soi avec le monde et la nature.
Citation :  » Les petis frères ne savent pas ce qui signifie l’idée de justice, d’équilibre. Ils font des trous, ils causent des dégâts partout, ils coupent des arbres, sans savoir, sans comprendre, ils sont aveugles, ils ne voient pas et n’entendent pas, alors les problèmes arrivent. » M.M Dingula

4) Un temps cyclique:
Pour les Kogis, le temps est cyclique. Chaque année, les étapes fondamentales de la vie sont marquées pas un rituel, une cérémonie.
Citation : « Au début, nous sommes petits enfants, peu à peu, nous devenons grands, puis nous finissons par revenir vers là Mère (la Terre) pour mourir… » M.M Dingula

5) L’appartenance à un lieu:
Les Kogis, et tous les peuples racines appartiennent à un lieu et portent cet endroit dans leur coeur.
Citation :  » Pour nous, ce n’est pas simplement un territoire, c’est le coeur du monde, de la vie, c’est comme un corps vivant.. » MM.Dingula

6) Des lois fondés sur le vivant:
Les Kogis vivent en relation permanente avec la nature et le vivant. Leurs lois sociales et politiques sont basées sur l’observation de la nature.
Citation :
« Nous devons écouter les voix de la nature. Si on écoute pas, chacun va de son côtés et sans direction, cela ne peut pas aller. Pour nous, la nature est comme vos livres, tout y est écrit. Essayer de comprendre que la mère terre, c’est la justice, l’équilibre. » MM.Baro

7) Une association des contraires:
Pour les Kogis, il n’y a pas de bien et de mal dans la vie. Mais il y a des principes opposés : le jour et la nuit, le féminin et le masculin, le haut et le bas..

8) Un pouvoir canalisé:
Chez les Kogis, il n’y a pas de « chef » ( c’est pareil dans tous les peuples racines ). Les décisions sont prises tous ensemble, après avoir longuement parlé dans la « Nuhé ».
Citation : « Dans la Nuhé, on peut pas se disputer, on vient pour discuter de choses importantes… » MM.Dingula

9) Une parole partagée en permanence:
C’est la première chose qui frappe quand on arrive chez les Kogis : chacun demande qu’on lui répéte notre histoire. La culture orale inspire bien leurs activités quotidiennes que leurs rituels sacrés.

10) Une prédominance de l’invisible:
Chez les Kogis, c’est « Aluna », la pensée ou l’énergie qui a crée le « vivant ». Certains enfants sont sélectionnés pour être « Mamu »; leur éducation vise à rentrer en relation avec l’esprit de chaque chose. Lorsque leur enseignement prend fin, le Mamu qui a accompagné son élève prononce alors la phrase rituelle :

« Tu as appris à voir à travers les montagnes, à travers le coeur des hommes, tu as appris à regarder au-delà des apparences, maintenant tu es un mamu. » MM.Dingula

 

Voici ce que déclare un chamane kogi, en parlant de nous, les occidentaux, dans le très beau livre, sous la direction d’Eric Julien et de Muriel Fifils, « Les indiens kogis, la mémoire des possibles » paru en novembre 2009 aux éditions Actes sud :

« Nous ne sommes pas pauvres, vous les petits frères êtes plus pauvres que nous.
Nous n’abîmons rien, au contraire nous protégeons ce que nous donne la nature. Nous avons de l’eau en quantité, claire et limpide, des arbres et des fruits… Chez vous, vous avez tout détruit. Chaque jour qui passe vous êtes plus pauvres. Si vous continuez, vous allez devenir vraiment très pauvres.
Nous ne dépendons de rien, ni de personne pour vivre, faire une maison, manger, nous chauffer. Nous sommes libres. Les petits frères deviennent pauvres, car ils détruisent tout ce que la nature leur a donné. C’est parce qu’ils enferment la vie qu’ils pensent qu’ils sont plus riches ? Parce qu’ils traversent les montagnes en faisant des trous pour aller plus vite ? Si je vous faisais un trou dans le ventre pour aller de l’autre côté, quel effet cela vous ferait ?
Nous n’avons pas toutes vos machines et tout votre argent, mais nous ne sommes pas pauvres. Vous êtes sans doute plus pauvres que nous. Ici dans la Sierra, nous protégeons la nature, nous n’abîmons pas les choses. Vous, vous êtes en train de tout détruire et vous allez devenir pauvres de tout ce que la nature vous a donné.
Si vous continuez à tout détruire, la chaleur va arriver et va tout brûler. Le vent va tout assécher et tout va disparaître.
Tous vos objets vont être détruits et vous mourrez. »